Chypre, un sauvetage coûteux et risqué
Chypre va payer par où elle a péché : le laxisme de ses banques. Les actifs bancaires chypriotes représentent 8 fois le PIB de l'île (8 fois la richesse nationale) grâce à qui ? Pas aux petits épargnants bien sûr. 40% des 70 milliards d'euros qui dorment au fond des coffres forts chypriotes appartiennent à des déposants russes (oligarques, mafias... on ne sait pas vraiment qui est qui et à qui appartient l'argent) : le groupe Gazprom y aurait de gros intérêts via ses filiales, ainsi que le milliardaire russe Roman Abramovitch.
Il faut dire que l'île est réputée pour ses avantages fiscaux
Chypre attire de nombreuses sociétés off shore, la finance apatride – sans réelle nationalité – et des entreprises qui viennent profiter d'un taux d'imposition sur les sociétés parmi les plus avantageux d'Europe (10% contre 13% en Irlande, près de 35% en France). Nicosie a compris depuis bien longtemps que l'on n'attrapait pas les mouches avec du vinaigre. Mais aujourd'hui la situation se retourne. C'est un signal politique que l'Eurogroupe envoie au nouveau Président chypriote ainsi appelé à engager rapidement de profondes réformes. Message envoyé également aux autres pays européens : l'épée de Damoclès existe. Pour ce qui est du petit épargnant chypriote, passé l'effet de surprise de la mesure annoncée ce week-end, un très probable accord avec l'Eurogroupe permettra de lui éviter le pire.
Ce sont donc les grosses fortunes qui sont visées... l'économie locale peut-elle s'en ressentir ? *
C'est ce que craignent beaucoup d'observateurs car les services bancaires, financiers et commerciaux sont à ce jour pratiquement les seuls secteurs générant des revenus fiscaux et de l'emploi dans le pays. Il faut toutefois relativiser. Outre le poids des chiffres et du choc de l'image, l'économie chypriote pèse peu en Europe. Son PIB de 18 milliards d'euros représente le 1/10ème de celui de la Grèce ou de l'Irlande (c'est, en gros, 0.1% du PIB européen). Mais ce nouvel épisode traduit un échec pour l'Europe qui n'a pas su intervenir en temps utiles. Cette Europe qui mériterait d'anticiper les abus plutôt que sanctionner une fois que le mal est fait. L'harmonisation fiscale sera-t-elle la prochaine étape après l'harmonisation bancaire ? La question est plus que jamais posée et attend une réponse rapide. Le cas chypriote – encore une fois, pour l'exemple – présente le risque d'un possible soulèvement social. Gageons que ce test ne serve d'exemple pour sauver d'autres pays en crise car pour beaucoup d'européens, la coupe est pleine.
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