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Les limites de la Banque centrale européenne

La Banque centrale européenne a déçu. Ses annonces très attendues pour soutenir la zone euro ont été mal accueillies par les marchés. Elle continue pourtant à inonder le marché de liquidités.
Article rédigé par Lise Jolly
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (BCE © Maxppp)

C’était même un vrai coup de colère. L’euro a remonté face au dollar, les places boursières ont baissé. Tout le contraire de l’effet recherché. La Banque centrale européenne avait laissé entendre qu’elle allait jouer au père Noël. Ce n’est pas le cas. Elle continue sur sa lancée, elle prolonge sa politique de rachat massif de dette. Ce programme a commencé en mars. Il est prolongé jusqu’en septembre 2017 mais le montant mensuel sera le même : 60 milliards par mois, les marchés espéraient plus, c’est raté, même Wall Street a fait la tête. Cette politique consiste donc à faire tourner la planche à billets, à inonder le marché de liquidités mais pas encore assez apparemment. L’autre mesure prise par la BCE, c’est de taxer encore davantage les banques si elles déposent leur argent à la BCE : désormais pour 100 € déposés, elles payeront 30 cts. L’idée c’est de les décourager pour qu’elles fassent circuler le crédit et relancent l’investissement et donc la croissance. La BCE est la première banque centrale à pratiquer cette politique qu’utilisent déjà certaines banques nationales.

Elle est molle et elle va le rester. Ce sont les prévisions de la BCE elle-même, seulement 1,9 % en 2017, ça n’est pas terrible. Mais c’est surtout l’absence d’inflation qui inquiète, il faudrait qu’elle retrouve le niveau des 2 % pour oxygéner un peu l’économie. Car quand il n’y a pas d’inflation, on fait du sur place et le risque de déflation n’est pas loin avec son cortège de baisse des prix et, par voie de conséquence, des salaires. En 2015, avec une inflation à 0,1%. On frôle le zéro. C’est beaucoup trop peu.

Elles profitent d’abord à l’euro, qui normalement devrait baisser face au dollar et donc faciliter nos exportations. Une fois passé le mouvement d’humeur des marchés, ce devrait être le cas. Elle profite aux pays du sud comme l’Espagne ou l’Italie, et même à la France, puisque l’État va pouvoir emprunter sur les marchés à des taux intéressants, et donc limiter la hausse de notre dette. Mais elle fait grincer des dents aux pays du Nord, et notamment à l’Allemagne qui ne dit plus rien, ronge son frein mais n’apprécie guère cette politique et cet euro faible qu’elle génère.

La BCE peut-elle rester seule à la manœuvre ?

Évidemment non, que faire de plus ? Les taux d’intérêts sont extrêmement bas, les banques ne sont pas incitées à garder leur argent en dépôt à Francfort, le marché ruisselle de liquidités, mais la BCE est proche de l’essoufflement. Elle attend maintenant que Wall Street dévoile sa stratégie et remonte ses propres taux d’intérêt pour que tout ça profite encore davantage à l’euro. Mais rien ne remplacera les politiques d’assainissement budgétaires que doivent mener les États dont la dette continue de grossir.

Mais en pleine crise des réfugiés, et en pleine intervention militaire en Syrie, ça va être compliqué de demander des efforts aux participants, la France en tête. Pourtant, c’est dans le camp des gouvernements que la reprise se joue aujourd’hui. Et la France, son déficit chronique toujours pas dans les clous depuis 6 ans, son chômage chronique aussi et sa fiscalité très pénalisante pour l’économie, sera sans doute une des dernières à sortir de l’ornière.

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