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Si j'étais... un Français sur deux

Un Français sur deux, sur trois, sur quatre, etc. Les instituts de sondages ont souvent des termes réducteurs pour analyser leurs sondages en vue de la présidentielle. Karl Zéro s'est mis dans la peau du Français sur deux.

Article rédigé par franceinfo - Karl Zéro
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Une enveloppe glissée dans une urne. (MAXPPP)

Si j’étais un Français sur deux, j’aurais la "ras-l’-bolite" aigüe. Je serais excédé à un point incalculable, incalculable surtout dans vos enquêtes d’opinion. Oooh ! si vous saviez ! Ulcéré, furieux, furibard depuis tant d’années, exaspéré par tout ce qui ressemble de près ou de loin à un  politicien, aux partis, à leurs dirigeants, aux ministres, à Matignon, à l’Elysée, aux puissants, à la finance, aux banque, aux riches. Plic ! Plic !, Plic ! Ce furent d’abord des gouttes qui firent déborder le vase, puis des vases qui ont fait déborder le fleuve et maintenant les fleuves s’apprêtent à faire déborder la mer.

D’où vient tant et tant de liquide ? Pour ma part, en tant qu’un Français sur deux, ce sont mes larmes de joie, à l’élection de tel ou tel polichinelle en qui j’avais cru bon de croire. Puis mes larmes de dépit le jour où je compris qu’il ne tiendrait pas une seule des promesses qui m’avaient fait voter pour lui. Tous les autres Français moyens ont pleurés avec moi, de chagrin et d’aigreur et bientôt de haine rentrée, puis plus du tout rentrée. N’entendez-vous pas le grondement sourd de ces vagues de larmes, ne voyez-vous pas venir les déferlantes de cet océan salé de colère ? 

And the winner is...

Au début, on ne le distinguait pas vraiment, ce grondement, tout était normal, c’était juste un murmure. Puis, il y eut la primaire à droite et si j’étais un Français sur deux, l’occasion était trop belle, j’aurais été voté en loucedé pour le plus terne, le plus effacé, Fillon. Rien que pour me venger des autres, pour bien faire comprendre à Juppé qui s’y voyait déjà et à Sarko qui s’y voyait encore, que je ne voulais plus jamais les voir.

Fillon, c’était le Kinder surprise et le bonnet d’âne pour les journalistes et les sondeurs, si fiers de leurs de leurs pronostics péremptoires et de leurs analyses bidons. Les faire se planter en live fut un régal, c’est la seule arme qui me reste, en tant que moi, un français sur deux. Du coup, je ne me serais pas arrêté en si bon chemin, j’aurais remis ça, – et avec férocité encore – à la primaire à gauche : j’aurais été voté Hamon. Le petit mec qu’a une chance sur un million, que personne ne voit venir  et un bon coup sur la tronche des Valls et autres Montebourg qui s’y voyaient déjà, bien fait, un régal ! Résultat: même bonheur à 20 heures, voir les mines ahuries des présentateurs télés et autres éditorialistes mis devant un fait accompli qu’ils n’avaient ni poussés ni prévus.

Le Pen Mélenchon le 7 mai

Si j’étais un Français sur deux, je ne souhaiterais nullement voir un Fillon ou un Hamon à l’Elysée. C’était juste deux tours de chauffe, pour rire un peu, montrer qu’on existe, disons. Non, je vous préparerai, dans le secret de mon sac à malices, dans la partie la plus retorse de mon cerveau reptilien, une bonne leçon pour dimanche qui vient.

Il est 20 heures ! Oh oh, bizarre Pujadas a sa moumoute de traviole, l’oeil hagard. Sur BFMTV, ils ont l’air de morts-vivants et là, moi le français sur deux, je suis heu-reux, je savoure enfin ma revanche, je tiens mon putsch légal ! Le système c’est terminé, les énarques et les technos, les journalistes et les bobos, terminus vous descendez : ce sera un duel Le Pen Mélenchon au second tour !

Peu importe le résultat 15 jours après: dans les deux cas de figures c’est bye bye l’Europe, auf wiedersehen l’Otan, tchao la dette et vive la retraite à taux plein à 60 ans ! Peu importe que vous me rabâchiez que ce faisant je me tire une balle dans le pied, voire que je regretterrais cruellement mon coup de sang après. Quand déjà t’as rien qu’est ce que t’as à perdre ? La "ras l’-bolite" quant ça te lance ! Tu deviens dingue, c’est à se taper la tête contre les murs !

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