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Si j'étais... Jean-Pierre Elkabbach

Jean-Pierre Elkabbach donne ce lundi sa dernière interview politique sur Europe 1. Karl Zéro s'est imaginé dans la peau du journaliste.

Article rédigé par franceinfo - Karl Zéro
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Jean-Pierre Elkabbach, journaliste, à Marseille pour les élections régionales, le 21 octobre 2015. (BORIS HORVAT / AFP)

Si j’étais Jean-Pierre Elkabbach, ils n’auraient pas eu ma peau ! Grand amiral de la République, distributeur à parole politique depuis l’invention du suffrage universel, j’aurais survécu à tant de tempêtes, d’ouragans et de tsunamis que ce ne sont pas quelques moussaillons à peine sortis de l’œuf, avec encore du lait derrière les oreilles, qui auraient pu me balancer par dessus le bastingage !

Je me serais précipité dans le bureau de Jean-Luc Lagardère pour exiger le renvoi desdits mousses, et j’aurais obtenu leurs têtes dans la seconde. J’ai essayé d’ailleurs, mais il n'y a plus de Jean-Luc, c’est son fils, et il partait au tennis.

On m'arrête, et je devrais me taire ?

Et pourtant, oui, j’ai de l’eau dans la bouche. C’est bien ce qui s’est produit hier. Plouf, le Jean-Pierre ! À 79 ans, sans ménagement. Pas très élégant. Le rédacteur en chef d’une station privée dont, par décence, je préfère taire le nom qui, un indice, commence par  "Euh…"  et se termine par "Hein ?", m’a supprimé mon interview quotidienne, point d’orgue, que dis-je, climax de ladite station depuis vingt ans, pour me remplacer au pied-levé par… lui-même. On rêve ! Et je devrais me taire ? Moi qui l’ait toujours ouvert ? Trop, parfois, au point d’irriter Georges Marchais qui voulait tant me faire taire.Ou plus récemment de blesser le pauvre petit Calimero Hamon en lui demandant s’il s’était masturbé sur le canapé de Karine Lemarchand, ou un truc comme ça…

Tout ça n'est pas très sérieux

Si j’étais Jean-Pierre Elkabbach, c’est vrai que ces dernières années, je me suis peut-être un peu trop lâché. Normal : la politique, quand j’étais jeune, pour moi c’était sacré. J’étais aux ordres, les questions étaient préparées à l’avance avec les invités de la majorité et celles pour l’opposition dictées par les mêmes de la majorité. Toujours du côté du manche, le Jean-Pierre !

Mais avec le temps, ça finissait pas se voir, alors comprenant que tout cela n’était pas bien sérieux, je le vivais comme un jeu. Le niveau des intervenants avait drôlement baissé, aussi. Autrefois, face à un Pompidou, ça ne rigolait pas, il y avait un enjeu, aujourd’hui face à un Copé y’en a moins.

Taisez-vous Elkabbach !

C'est loin, tout ça, Marchais, les jeunes ne savent plus qui c’était, il a été remplacé par Mélenchon, piètre doublure. Et c’est justement ça, le problème, c’est ce qu’on m’a fait comprendre : que je n’étais plus bon qu’à interviewer des politiques disparus et que donc, il était temps de les rejoindre.

Je sais, je ne vais pas me plaindre, j’ai eu une belle vie, et c’était écrit : à mon âge, il se rapproche chaque seconde, ce moment tragique où on te signifie que c’est le terminus. Pour moi, c’est fixé au 2 janvier. Il y aura un pot d’adieu avec du mousseux tiède dans les gobelets de la machine à café, le patron passera en coup de vent, s’excusant d’avoir toujours une vie trépidante, lui, et je repartirai les bras chargés de cadeaux inutiles pour retraités. Et comme ça tombe juste après Noël, estampillés seconde main.

Vive la retraite !

Si j’étais Jean-Pierre Elkabach, j’irais donc à la pêche. Pour combien de temps ? Guy Lux a survécu neuf ans, Jacques Martin un seul, Bouvard n’est pas très frais, et le jour où l’on retirera le tapis sous les pieds de Drucker, hypocondriaque comme il est, il ne tiendra pas 24 heures. Et puisque Jean-Michel Aphatie nous a rejoint dans le studio, je lui passe le flambeau et lui dis : tu es jeune ! Profite, Jean-Michel ! Prends de la caillasse ! Tire tout ce qui bouge ! Eclate toi, ça dure pas !

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