"Le Covid-19 est un marqueur de l'histoire de l'humanité qui va changer le monde, on va créer de nouvelles solidarités", Jean Viard
On a l'impression de revenir quelques mois en arrière puisque la courbe des cas de coronavirus augmente à nouveau assez nettement. Ça ressemble clairement au début d'une cinquième vague, nous alerte même le ministre de la Santé, Olivier Véran, qui reste malgré tout optimiste.
Dans Question de société aujourd'hui avec le sociologue Jean Viard, on évoque bien sûr la hausse marquée du nombre de cas de Covid-19 en France, mais aussi dans d'autres pays d'Europe et du monde, avec plus ou moins de gravité. Cela ressemble clairement au début d'une cinquième nouvelle vague, nous alerte même le ministre de la Santé.
franceinfo . Jean Viard, Olivier Véran nous dit que nous pouvons, d'après lui, passer cette cinquième vague comme nous avons passé la quatrième, c'est-à-dire assez vite, et sans saturation générale du système de santé...
Jean Viard : Ce qui est clair, c'est qu'on est au milieu d'une des plus grandes tragédies de l'histoire humaine. C'est ça qu'il faut se dire. Cette tragédie, elle rebondit d'un côté, de l'autre, dans un continent, dans l'autre, dans des pays comme le nôtre. En Allemagne, cette fois-ci plus fort que chez nous. C'est un marqueur de l'histoire de l'humanité qui va changer le monde de façon profonde parce qu'on est tous en train de réfléchir, de créer de nouvelles solidarités.
Regardez les Chinois et les Américains viennent de signer un accord sur la lutte contre le réchauffement climatique, alors qu'ils ne sont d'accord sur rien. Donc, le rapport à la nature, le rapport au climat est en train de changer dans nos imaginaires et nos visions politiques. C'est ça qui se passe.
Alors oui, les courbes remontent. Évidemment, les gens vont se précipiter pour se faire vacciner. L'Etat français étant dans ce rapport d'autorité avec le peuple, il suffit que le président intervienne, et le soir et en une heure 100 000 personnes ont pris rendez-vous pour le vaccin. Au fond, c'est compliqué ce rapport entre le centre et le peuple, si on peut dire les choses comme ça. Mais ça va certainement marcher comme la dernière fois. Parce qu'au fond, on a tous accepté que ce virus était évidemment une calamité, mais qu'il fallait quand même plus ou moins suivre les recommandations pour essayer de se protéger. Et donc, c'est en gros ce qui va se passer.
Alors justement, ça, c'est intéressant, Emmanuel Macron, qui, mardi 9 novembre, conditionne la détention d'un pass sanitaire, à l'avenir, à une troisième dose pour les plus de 65 ans, vous avez parlé de ce net rebond, des prises de rendez-vous et même des vaccinations, vous, vous dites, c'est beaucoup plus du pragmatisme que de la docilité et qu'une habitude ?
Oui en France, c'est toujours pareil : on râle et on paye, je dirais. C'est le modèle de gouvernement de cette société, qui n'a pas été inventé par le président Macron. Peut-être même pas d'ailleurs entièrement par la 5e République. Et donc, je pense que ce n'est pas de la peur, c'est du pragmatisme. C'est un peu comme sur les autoroutes, les alertes comme quoi il va y avoir un radar. On lève le pied dès qu'on voit le panneau. C'est un peu la même chose. On accepte la règle et on attend le dernier moment.
Je pense que la société va y aller, y compris dans les masques qu'on va remettre aux enfants à partir de lundi. Les enfants, c'est totalement un sujet sacré. Donc effectivement, quand on dit les enfants, mettez un masque, personne va être contre, parce que les adultes eux, ils se disent toujours : "j'aime mon libre arbitre, on me bride mon libre arbitre". C'est vrai qu'on bride le libre arbitre. Le virus nous impose des règles qui restreignent nos libertés, et donc c'est normal qu'on renâcle. Mais après, je pense que les gens vont quand même suivre, y compris pour protéger leurs enfants, ce qui est quand même la grande question d'une société.
Il y a peut être d'ailleurs un parallèle à faire, puisqu'on voit que l'idée de la troisième dose et du conditionnement du pass sanitaire à cette troisième dose est visiblement assez accepté. Et sur ce choix du gouvernement de faire porter le masque aux enfants de toutes les écoles de France dès lundi 15 novembre, on n'a pas le sentiment vraiment de contestation de cette mesure. Vous avez expliqué pourquoi pour la protection des enfants, mais pas dans la méthode, et on pourrait se dire qu'il y a eu un peu de cafouillage. C'est arrivé en plusieurs semaines, graduellement, une partie de la France, puis un peu plus, et maintenant tout le territoire. On peut se dire qu'il y a quelques mois, cela aurait entraîné une grogne, une fronde ?
Je crois qu'on a compris qu'on gouvernait dans un monde instable, et donc les gens râlent moins qu'il y a deux ans : "Oui, mais ça n'a pas été prévu, on ne l'a pas annoncé à l'avance, on n'a pas négocié". Après, c'est aussi que c'est le mode de gouvernance de la France. On l'a bien vu sur le nucléaire, le sommet décide et nous suivons. On pourrait être un peu plus souple, mais je crois qu'on a accepté l'instabilité de la période.
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