Emploi des jeunes : le diplôme, condition nécessaire mais pas suffisante
Un résultat moyen et
surtout rempli de paradoxes que nous allons tenter de décrypter.
Premier
de ces paradoxes : l'entrée dans l'emploi est difficile, pourtant neuf dirigeants d'entreprise sur dix déclarent faire
confiance aux jeunes.
Oui. Il n'y a pas de
refus a priori, être jeune n'est pas un handicap en soi. Mais cette confiance
varie selon la taille de l'entreprise : plus elle est importante, plus la
confiance est là, plus on se tourne vers les PME ou les TPE, moins les
dirigeants sont à l'aise avec les jeunes. 80% des dirigeants également acceptent
tout à fait de leur confier des fonctions de représentation extérieure de
l'entreprise. Mais de là à leur confier trop de responsabilités il y a un pas
que la majorité de franchissent pas : 57% seulement des dirigeants
confieraient le management d'une équipe de cinq personnes ou plus à un jeune de
moins de 25 ans, 51% leur déléguerait la résolution d'un problème de ressources
humaines et 56% la gestion d'un projet ayant un impact financier important sur
leur activité. C'est donc une confiance pour le moins raisonnée.
Sur
quoi repose la confiance qu'une entreprise accordera à un jeune diplômé ?
Avant tout sur sa
façon de se comporter, ce qu'on appelle aussi le "savoir être", et
qui renvoie probablement, en langage courant, à la notion de maturité. C'est un
enjeu que les écoles de commerce et d'ingénieurs ainsi que certaines
universités ont bien perçu. Elles ne se contentent pas de délivrer des cours mais
multiplient les expériences, et surtout intègrent ces expériences dans la
validation du diplôme.
Par
exemple ?
Il y a le classique,
à savoir tout ce qui permet de découvrir in vivo la réalité du monde du
travail - les stages, l'alternance, l'apprentissage.
Mais aussi la valorisation de la vie associative qui permet de s'entraîner très
concrètement à la gestion de projet et d'animation d'une équipe, les voyages
notamment humanitaires qui se développent, afin d'aider les jeunes à devenir
autonomes mais aussi à éveiller leur empathie... Et puis on peut aussi citer la
montée d'approches pédagogiques qui elles aussi invitent à l'initiative, à la
prise de responsabilité ou à la capacité à travailler en collaboration et non
en concurrence – c'est tout ce qui touche à l'intelligence ouverte (quand on se
met à plusieurs pour résoudre un problème), au learning by doing (l'apprentissage
par le projet, par le "faire"), etc. Et c'est déterminant, selon
les dirigeants interrogés dans ce sondage, ce "savoir être" compte
plus que le diplôme et même que l'expérience professionnelle, peut-être pas
dans la décision d'embauche, mais en tout cas dans la confiance qui sera donnée
ou pas au jeune : 53% des entrepreneurs interrogés ont répondu baser leurs
décisions de recrutement sur la personnalité et les qualités individuelles des
candidats, 33% sur les compétences professionnelles et seulement 12% sur le
diplôme.
12%.
Est-ce à dire que les diplômes comptent moins qu'on en le dit ?
Non. D'ailleurs
toutes les études confirment que le diplôme demeure le meilleur atout pour
trouver un emploi. Mais des diplômes, aujourd'hui, il en existe des milliers :
on en délivre chaque année deux millions en France. Ils sont donc nettement
moins discriminants et tendent à devenir une condition nécessaire mais pas
suffisante pour décrocher un emploi.
On
dit aussi que les jeunes d'aujourd'hui, qu'on a surnommé la "génération Y",
sont moins faciles à gérer.
On le dit : ils
seraient moins engagés dans le travail, dans l'entreprise, moins soumis à l'autorité
ou en tout cas plus prompts à en interroger la légitimité, ils fonctionneraient
de manière plus horizontale, moins hiérarchique, et ils préserveraient plus que
les générations précédentes leur vie privée. D'un mot ils y croiraient moins.
Vous
employez le conditionnel.
Oui, car il y a débat
sur la singularité de cette "génération Y" par rapport à celles qui
l'ont précédée. Et certains chercheurs, sans contester totalement ces analyses,
les relativisent. Reste que pour les
dirigeants interrogés par Opinion Way, je cite, "l'embauche d'un jeune de
moins de 25 ans reste perçue comme plus risquée que l'embauche d'un salarié
plus âgé par une entreprise sur trois".
L'essentiel des emplois sont dans les TPE et les PME, et c'est également
là que les dirigeants sont les plus méfiants.
Oui. "Dans les PME, le ressenti d'un risque potentiel lié à
l'embauche d'un jeune est plus présent du fait de la petite taille des équipes
et d'impératifs opérationnels à plus court terme dans un contexte de faible
croissance économique". Autrement dit quand on travaille sous tension et
sans filet, on est moins tenté de prendre des risques. Ça se retrouve dans les
chiffres de ce baromètre : 39% des entreprises interrogées ont déclaré
avoir embauché un jeune de moins de 25 ans au cours de l'année écoulée, un
chiffre qui monte à 83% pour les entreprises de 250 salariés et plus.
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