2,39 millions d'étudiants : la ruée vers le supérieur
Elle ne se dément pas et elle
est logique : le taux de réussite au bac augmente quasiment chaque année, et la
pression sociale en faveur des études supérieures est considérable.
Parce que le diplôme est la
meilleure arme anti-chômage.
Il est en tout cas réputé tel. En
fait c'est une vision un peu réductrice. Ce ne sont pas les diplômes qui
donnent du travail, ce sont les entreprises. Mais effectivement ces dernières
font confiance à certaines filières.
Au premier rang desquelles les
écoles de management et d'ingénieurs.
Oui. Les filières sélectives
professionnalisantes, qu'elles soient payantes ou gratuites, ne se sont jamais
aussi bien portées. Ce sont elles qui gagnent des parts de marché et c'est une
deuxième tendance lourde si on observe les chiffres depuis dix ou vingt ans - à
titre d'exemple les effectifs des écoles d'ingénieurs augmentent de 7% par an
depuis le début des années 1990, ceux des écoles de management de 9%.
Ces deux tendances vont donc se maintenir.
À l'évidence. Le nombre global
d'étudiants va continuer à augmenter sous la pression des bacheliers
professionnels que l'Education nationale pousse aujourd'hui de manière résolue
vers les BTS et l'attractivité des écoles de management et d'ingénieurs va
persister : elles sont toutes en train de créer de nouvelles offres destinées
aux bacheliers autour d'un nouveau label, le bachelor - il s'agit d'une filière
en trois ou quatre ans, tournée vers la professionnalisation mais permettant
aussi, pour certains, de rejoindre un master de grande école, aux mêmes
conditions que s'ils avaient suivi le cursus classique de la classe
préparatoire.
C'est pourtant l'université qui
continue à accueillir le plus d'étudiants...
Oui, avec près d'un million et demi
d'étudiants dont 230.000 en sciences humaines et sociales. Plus de 200.000
étudiants également en droit, sciences politiques et sciences économiques. Mais
c'est une augmentation mécanique, pas un gain de parts de marché, en tout cas
en premier cycle. Il y avait en 2012 36.000 étudiants de plus qu'en 2011. mais
seulement 12.000 de plus à l'université. Seule exception là encore les filières
qui sélectionnent fortement à l'entrée ou à la fin de première année comme les
études de santé, les bilicences ou les sciences et techniques des activités
physiques et sportives.
Donc il y a moins un rejet de
l'université qu'une quête de sélection et de professionnalisation...
Oui. Pour preuve quand l'université
va sur ce terrain, elle séduit. Exemple les licences professionnelles. Elles
ont été crées en 2000 et leurs effectifs croissent depuis de 30% par an. On
remarquera que le modèle du bachelor que j'évoquais est un peu le pendant de
ces licences, côté écoles. Autre exemple l'apprentissage, qui représente
123.000 étudiants du supérieur - là, la tendance pourrait s'inverser car la
réforme de la formation professionnelle se fait clairement au détriment de
l'apprentissage dans le supérieur, ce qui est un peu curieux car c'est vraiment
une voie de réussite et une excellente façon de préparer les jeunes à l'emploi.
Point noir toujours en sciences...
Oui. Autre tendance, pas seulement
française d'ailleurs. La concurrence des filières sélectives est très rude et
elle décime les rangs des premiers cycles scientifiques à l'université.
Dernier enseignement : il y a
toujours plus d'étudiants, mais toujours pas plus de démocratisation.
Non. "Le monde étudiant reste
encore majoritairement celui des professions libérales et des cadres supérieurs"
écrit l'Insee. Et pas seulement dans les filières payantes. Plus de 30% des
étudiants à l'université sont ainsi issus de ces catégories
socio-professionnelles, loin devant les professions intermédiaires (12,8%) et
les familles d'ouvriers (10,7%). C'est la conséquence logiques de ce que montre
notamment la fameuse enquête Pisa de l'Ocde, dont on a beaucoup parlé en
décembre dernier. Elle montre que les écarts scolaires entre enfants issus de
catégories favorisées et fragiles s'est accru en france ces dernières années.
Et cette étude Pisa porte sur les
élèves de 15 ans
Oui. L'écart est déjà creusé à ce
moment là, le lycée ne le compense pas, si bien que le supérieur reflète cet
état de fait, et ce en dépit des divers dispositifs qui ont été crées depuis
dix ans dans la foulée des conventions Éducation prioritaire de Sciences Po,
qui avaient un peu agi comme un électrochoc. Les principales d'entre elles sont
désormais regroupées sous le label "cordées de la réussite" mais elles
ne touchent que quelques milliers d'étudiants par an. Ce n'est pas assez pour
inverser la tendance.
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