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Le film "Afghanes" raconte le calvaire des femmes en Afghanistan

"Afghanes", le film de la journaliste Solène Chalvon-Fioriti, diffusé ce soir sur France 5, ne ressemble à aucun autre. Des témoignages forts sur une condition d’enfermement mental et physique de la femme qui ne doit plus exister en société.
Article rédigé par franceinfo - Eric Valmir
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Solène Chalvon-Fioriti est allée dans familles afghanes où elle a rencontré des femmes qui lui ont parlé de leur sort. (ELEPHANT DOC)

C’est bien une guerre qui est déclarée contre les femmes en Afghanistan. Afghanes, le film de la journaliste Solène Chalvon-Fioriti, rassemble des témoignages forts. Rarement, dans l’histoire afghane, la situation n’a été aussi dramatique qu’aujourd’hui, avec des féminicides ou des femmes lapidées à mort par décision de justice. Leur seul crime étant de vouloir vivre.

Une des phrases fortes prononcée par Solène Chalvon-Fioriti au début de son film - "La cible prioritaire des talibans, c’est le corps des femmes afghanes" - n’est pas un effet de genre. Elle décrit une réalité du terrain. Celle que portent les reportages à rebours des idées faites un peu trop rapidement. Et l’on entend aussi dans le film ce prêche dans un micro : "Les femmes découvertes (sous-entendu sans burka) ressemblent à des bonbons sans emballage".

Solène Chalvon-Fioriti, la réalisatrice du film "Afghanes". (KIANA HAYERI)

La répression et l'enfermement

Depuis que les Talibans sont revenus au pouvoir en 2021, la pression s’accentue jour après jour. La liste des restrictions s’allongent. Outre le fait qu’on ne doit pas voir leur visage ni entendre leur voix, elles doivent obéir à la police religieuse, ne peuvent pas prétendre à un emploi dans la fonction publique, ne peuvent pas fréquenter les parcs ni les bains publics qui constituent pourtant un moyen d’hygiène. Elles ne sont pas non plus autorisées à entrer dans les universités, à travailler dans des ONG, et conduire des voitures leur est interdit.

Si certaines d’entre elles ont commencé à manifester, un peu comme en Iran, la répression violente par le sang et les meurtres ont eu raison des cortèges qui se sont effilochés au fil des mois. Les femmes restent chez elles. Mais dans cet enfermement, la santé mentale vacille. Il y a dans le film de Solène Chalvon-Fioriti cette jeune femme qui pleure, et ne peut s’arrêter de pleurer tout en mettant des mots sur ses larmes : "Être une femme n’est pas un pêché. J’ai travaillé dur pour espérer une belle vie mais les yeux posés sur nous ne nous accordent aucune valeur. Je n’ai droit à rien. Pourquoi avons-nous été créées ?".

Cette question glaçante trouve un écho dans une scène effroyable du film : les naissances à la maternité. Les cris de joie quand c’est un garçon, une toute autre ambiance quand c’est une fille. Jusqu’à cette belle-mère qui parle à ce bébé fille qui vient de naitre il y a quelques minutes : "Tu n’as pas honte de faire cela à ta mère. Tu es fripée, visqueuse, moche" et de l’appeler alors "petite mocheté". Une sage-femme témoigne, fait état de cas sévères de malnutrition. Quand le nourrisson est une fille et qu’elle est délaissée par sa mère, le bébé le ressent aussitôt et l’impact sur son développement agit sur l’alimentation. Il y a une forme de désespoir de la mère qui déconsidère son enfant.

Des femmes dans un marché de Kaboul. Depuis le retour au pouvoir des Talibans, les femmes qui osent encore sortir le font vêtues d'une burqa ou d'un voile intégral. (ANTONIN BURAT / LE PICTORIUM / MAXPPP)

Effacer la femme de la société

Le projet des Talibans d’effacer la femme de la société afghane n’est pas une vue de l’esprit. Effacer est le mot juste. Elles ne doivent pas exister. C’est une guerre ouverte contre les femmes. Contre les filles qui n’iront pas à l’école et ne seront pas éduquées. Vendues à la puberté, enfermées et cachées. C’est au-delà d’une question des droits de femme, c’est l’effacement d’une condition. Et ne parlons pas de la violence dans l’intimité des foyers, à l’abri de tout regard.

Pour cette raison, Solène Chalvon-Fioriti - après avoir publié chez Flammarion La femme qui s’est éveillée où elle retranscrivait les paroles des Afghanes - a voulu ce film : pour qu’on entende leurs voix, qu’on puisse voir leurs visages non couverts, non floutés. La journaliste, après avoir vécu dix ans en Afghanistan, n’a pas vu son titre de presse renouvelé; elle a dû quitter le pays. Les journalistes peinent à travailler à Kaboul. Preuve en est avec le cas de Mortaza Behboudi, un homme qui parle des femmes et de son pays qu’il aime, un journaliste franco-afghan accusé à tort d’espionnage et qui est en prison depuis plus de deux mois. Ce journaliste brillant dont on parlait il y a 15 jours dans cette chronique.

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