Le jour où Herbie Hancock a voulu filer avant son concert
Dans "Petite Histoire de Festivals", Yann Bertrand vous raconte les anecdotes, les moments forts de ces petits et grands événements qui n'auront pas lieu cet été ou en tout cas, pas dans leur forme initiale… Dans le rétroviseur aujourd'hui, la venue pour le moins stressante du grand Herbie Hancock, à Jazz in Marciac, en 1998.
Nous sommes le samedi 15 août 1998, au festival Jazz à Marciac. L’édition des 20 ans s’annonce de toute beauté dans le Gers. Et pourtant, pour Jean-Louis Guilhaumon, président-fondateur du festival et maire de la ville, la soirée devient vite stressante. "Ce que nous n'avions pas prévu, c'est que ce jour-là, le ciel s'est déchaîné. La presse a parlé 'd'orage tropical'."
Les organisateurs sont obligés d’évacuer le chapiteau dans la soirée, 5 000 personnes sont venues voir le grand Herbie Hancock. Pour l’heure, le public est trempé, et le pianiste américain se fait bien du souci en coulisses. "Donc, il a patienté un long moment, le temps que le premier orchestre s'exprime, continue l'organisateur. Et puis son manager est venu me trouver en me disant : 'Herbie Hancock regagne son véhicule et ne jouera pas ce soir.' Inutile de dire que je n'ai pas traîné pour rejoindre ledit véhicule et entamer un échange avec Herbie Hancock."
Je vais passer sur les détails, mais au terme d'un échange, que je qualifierais de vif, j'ai réussi à le convaincre de jouer.
Jean-Louis Guilhaumonà franceinfo
C’est le premier exploit, le deuxième sera de le convaincre de faire le show comme si de rien n’était. Herbie Hancock est censé prendre la route à 4 heures du matin pour Toulouse le lendemain. Et là, il est déjà minuit passé… "Il est monté sur scène en disant qu'il allait jouer une demi-heure, trois quarts d'heure dans le meilleur des cas. Herbie Hancock s'assoit au piano furieux, se souvient-t-il. Au final, il est descendu de scène à 2h35." Plus de deux heures d’un concert exceptionnel.
Une conversation gravée dans les mémoires
"Depuis, avec Herbie, à chaque fois que nous nous rencontrons, et il devait être des nôtres cette année, nous évoquons ce souvenir qui le fait toujours sourire." Et en passionné de jazz, et néanmoins fin politique, Jean-Louis Guilhaumon est tout en nuance quand il dévoile ce qu’il a bien pu dire à l’Américain… "Je l'ai invité à considérer les choses. Nous sommes un petit village de 1 350 habitants, nous produisons un événement d'importance. Je lui ai fait part de la déception que constituerait son départ."
L’orage est passé, seuls les souvenirs restent. Le festival propose ces jours-ci une version en ligne, avec des souvenirs, des concerts passés et des paniers garnis à se faire envoyer chez soi, préparés par les producteurs du coin. Jazz in Marciac, plus de 40 ans de miracle permanent réinventé et de légendes en concert dans un village gersois tout entier tourné vers le jazz.
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