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Nouveau monde. Levées de fonds records dans la French Tech : vers les "super licornes" de demain ?

La France peut-elle créer des entreprises du numérique à 100 milliards de dollars pour peser à l’échelle mondiale ? Emmanuel Macron rêve de dix de ces "super licornes" d’ici 2030. Les levées de fonds récentes donnent des raisons d’espérer.

Article rédigé par franceinfo - Benjamin Vincent
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Jeune entrepreneur tenant une figurine en forme de licorne. (Illustration) (GETTY IMAGES / WESTEND61)

Mi-juin, Emmanuel Macron fixait l’objectif de 10 entreprises valorisées 100 milliards d’euros en Europe d’ici 2030. Cette semaine a été marquée, en France, par plusieurs levées de fonds spectaculaires : 580 millions d’euros pour Sorare, 473 millions pour Mirakl : des entreprises désormais valorisées plusieurs milliards d’euros, mais le chemin est long jusqu’aux 100 milliards.

Alors, comment y parvenir ?

Pour comprendre, direction le musée des Arts forains à Paris. Mercredi 22 septembre 2021, il accueillait la 9è édition du France Digitale Day : 2 600 entrepreneurs, investisseurs, directeurs de l’innovation et décideurs publics y ont participé. C’est une coïncidence du calendrier mais, en ce mercredi 22 septembre, deux entreprises françaises viennent de lever plus d’un milliard d’euros en 24 heures à peine.

Dans les allées, entre les manèges en bois et les cahutes du musée des Arts forains où se déroule la 9è journée annuelle de France Digitale, cette actualité brûlante donne le sourire : les levées de fonds de Sorare et Mirakl font les gros titres et agissent comme une piqûre de vitamines dans un écosystème lui aussi marqué par 18 mois de pause forcée.

"En 2012, année où France Digitale a été créée, une année de levées de fonds, c’était environ 500 millions d’euros, explique Maya Noël, la nouvelle directrice générale de France Digitale, cette association qui réunit plus de 1 800 start-up et une centaine d’investisseurs. Et là, en une seule journée, on a fait plus d’un milliard. Clairement, l’écosystème a évolué, ça va dans le bon sens, mais ça ne suffit pas".

Fleur Pellerin en sait quelque chose. L'ex-ministre déléguée à l’Économie numérique est aujourd’hui à la tête du fonds d’investissement Corelya Capital et se dit impressionnée par les annonces de la semaine :

"Je suis très admirative du chemin qui a été parcouru. Moi, j’ai fait une école de commerce dans les années 90. Les nouvelles générations ont un esprit d’entrepreneur qui n’existait pas à l’époque, qui est à la fois remarquable et dont on peut se réjouir parce qu’il est le signe que le rapport au risque a changé, que le rapport à l’ambition a aussi changé. Je vois donc venir de très, très belles histoires".

Pour elle, il reste néanmoins un progrès à réaliser pour viser encore plus grand :

"Ce que j’aimerais encore plus à l’avenir, c’est voir des gens qui sont capables de penser "global" dès le début : nous devons être plus mondiaux dans nos têtes, dès les premières phases de la création de l’entreprise".

Fleur Pellerin, ex-ministre déléguée à l’Économie numérique

Peser plusieurs milliards d’euros comme Sorare, quand on n’a que trois ans d’existence, c’est déjà un exploit. Mais atteindre une valorisation à 100 milliards suppose de multiplier l’existant par 30, 40, 50… D’où l’enjeu de changer d’échelle. Mounir Mahjoubi a baigné, lui aussi, dans cette atmosphère de la French Tech quand il était au gouvernement. Ex-secrétaire d’État chargé du numérique, il est aujourd’hui député LREM du 19è arrondissement de Paris et explique ce que ce changement d’échelle signifierait :

"Quand une entreprise vaut plus de 100 milliards d’euros, ça veut dire que plus de la moitié du monde connaît son nom, que plus de la moitié du monde veut acheter ses produits et services. Il faut devenir l’évidence, dans le monde entier, sur un secteur donné. Et ne pas oublier qu’à chaque fois qu’on lève des millions, les emplois vont suivre et donc, tout cet argent, on le dépense immédiatement pour recruter en France et dans les autres pays, et partir à la conquête des clients en développant les meilleurs produits possibles".

"Nos entreprises ont un boulevard"

Inventer des produits qui deviennent indispensables, c’est la clé du succès pour Frédéric Mazzella, fondateur de BlaBlaCar, l’une des principales licornes françaises :

"C’est important de montrer qu’on a en France, des sociétés qui développent non seulement des nouveaux emplois et des nouveaux services mais surtout des services utiles à tous. Juste un exemple : si on avait dû vacciner toute la population sans avoir DoctoLib, je ne sais pas trop comment on aurait fait. C’est ça aussi, la beauté du numérique : c’est pouvoir créer des services utiles à tous".

Dans quels secteurs ?

La France inspire particulièrement confiance dans les univers de la santé, de l’alimentation et de la cybersécurité. Mounir Mahjoubi y croit dur comme fer : "A travers le monde, les gens ont confiance en nous, Français, pour les soigner parce que nous avons une grande culture du soin. De la même manière, ils pensent qu’on peut parler d’alimentation parce que nous avons la plus belle culture mondiale sur le sujet. Quant à la cybersécurité, la France a l'une des plus belles réputations de confiance. Et donc, nos entreprises ont un boulevard pour se développer".

Les entrepreneurs de la French Tech pourraient ainsi profiter du retour des investisseurs pour battre de nouveaux records avec les prochaines levées de fonds. Pour autant, l’enjeu ultime c’est de peser au sein de l’Europe. A partir du 1er janvier, la France assurera la présidence de l’Union européenne pour 6 mois : l’occasion de ne plus seulement penser "French Tech" mais "Euro Tech".

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