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"Les enfants de la Libération" (6/8) : Les "grandes vacances"

À l'approche du 80e anniversaire du débarquement, notre série "Les enfants de la Libération" part à Lorris dans le Loiret avec le récit de Philippe Leturcq. À l'époque, il avait huit ans. Pour le protéger d'éventuelles représailles des Allemands, son père l'avait installé dans une ferme, à l'écart de la commune, où il se souvient avoir vécu une période de bonheur, de liberté et de jeux avec ses frères, sœurs et cousins.
Article rédigé par Samuel Aslanoff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Philippe Leturcq, chez lui en mai 2024. Il avait 8 ans à l’époque du Débarquement et résidait à Lorris dans le Loiret. (SAMUEL ASLANOFF / RADIO FRANCE)

"Mon père nous avait emmenés dans des petites fermes où il n'y avait pas d'eau courante, pas de commodités qui étaient à cinq kilomètres de Lorris, et des cousins parisiens nous avaient rejoint avec leur maman", se souvient Philippe Leturcq. Aujourd'hui âgé de 88 ans, il se souvient très bien de cet été 1944 où Lorris a été libérée par la 3e armée américaine, commandée par le général Patton.  

Le maquis de Lorris qui comptait jusqu'à 500 hommes a été violemment attaqué par les Allemands le 14 août 1944 et 50 maquisards et civils furent tués ce jour-là. "Voyant que les Américains arrivaient, les maquisards prenaient davantage de risques et donc ils nous ont mis à l'abri", raconte Philippe. C'était le cas dans de nombreuses familles, se souvient-il, les enfants et les femmes étaient mis à l'abri dans de petites fermettes, en dehors du bourg, "par crainte de représailles des Allemands sur la ville de Lorris"

"À huit ans, c'étaient les vacances qui comptaient"

"Les souvenirs que nous avons d'août 44, c'est un grand souvenir de joyeuseté, de vie à la campagne", explique Philippe. Réfugié dans la ferme de sa tante Jacqueline avec ses frères, ses sœurs et leurs cousins, "on vivait en quasi-liberté", se souvient-il. "On jouait ensemble, sans accessoires, si ce n'est des bouts de bois taillés, on faisait aussi des cabanes... Pour moi, août 44, c'étaient des grands jeux. Ça a été des grandes vacances". 

"On savait qu'on était en guerre puisque Lorris avait été occupé par les Allemands, poursuit Philippe. Mais nous, on a vécu ça au ras des pâquerettes. Moi, à huit ans, c'étaient les vacances qui comptaient parce qu'on avait nos cousins. C'était une période heureuse". Une période qui lui a semblé longue à l'époque et qui pourtant n'a duré qu'une dizaine de jours. 

L'arrivée "des colonnes d'Américains" du général Patton

Les premiers soldats américains sont arrivés à Lorris le 22 août 44, ironie de l'histoire, c'était le jour de son anniversaire. "On est rentrés le 23 ou 24 et on a vécu Lorris traversé par des colonnes d'Américains", raconte Philippe. "C'étaient des colonnes de Patton qui avaient contourné Paris par le sud. Donc c'était le grand contournement de Paris par l'armée de Patton", poursuit-il. Philippe se souvient d'avoir donné des fruits aux soldats américains "et en échange, j'ai découvert les bonbons acidulés et les chewing gum"

Mais ses souvenirs ne sont pas uniquement joyeux, il se souvient également de la rentrée à l'école qui a suivi, au début du mois d'octobre. Les enfants découvrent alors que le père de l'un de leurs camarades, qui était "agent de liaison du maquis entre Lorris et les maquis de la forêt" avait été assassiné le 14 août. "C'est un souvenir qui m'a toujours marqué, qui en a marqué d'autres, raconte Philippe, c'est là qu'on a découvert qu'il y avait eu quelque chose." 


"Les 'grandes vacances'", épisode réalisé par Samuel Aslanoff. "Les enfants de la Libération", un podcast original franceinfo avec la Mission Libération, à retrouver sur franceinfo.fr, l'application Radio France et plusieurs autres plateformes comme Apple podcasts, Podcast Addict, Spotify, ou Deezer.

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