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Ici et ailleurs: BD et immigration

Munoz et Sampayo, Marjane Satrapi et Enki Bilal sont auteurs de bande dessinée et immigrés. Ils se côtoient dans l'exposition " Albums " au Musée de l'histoire de l'immigration, Porte Dorée à Paris.
Article rédigé par Bertrand Dicale
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
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L'ambition de cette exposition,
" Albums ", est de démontrer que, parce qu'elle serait un art
mémoriel, la Bande dessinée est un outil propre à raconter l'immigration, les
migrations.

Il y a les Américains du Nord : Mac Manus, d'origine irlandaise et Will Eisner, l'un des maîtres de la
Bande dessinée mondiale, célèbre pour ces évocations de la vie des quartiers de
New-York, et dont le super héros un peu dérisoire, le Spirit, s'affiche à la
Cité de l'immigration, une torche à la main, telle la statue de la Liberté qui
accueille les nouveaux venus dans le nouveau monde.

L'Amérique du
Sud est là aussi.
Une large place est faite à l'Argentine. C'est
pour nous l'occasion de rappeler que Corto Maltese n'existerait sans doute pas
si l'italien Hugo Pratt n'était pas passé par l'Argentine. Il a puisé à Buenos
Aires autant que chez les Américains du Nord son noir et blanc puissant,
graphique, presque abstrait.

Mais
pour parler de l'Argentine, l'exposition Albums a choisi de nous raconter
le parcours chaotique de deux autres maîtres du noir et blanc: Munoz et
Sampayo. Les créateurs du personnage Alack Sinner se sont rencontrés en Europe après avoir quitté leur pays pour des raisons économiques. Quand ils ont voulu y retourner, le pays avait basculé dans la dictature.

L'Europe: Baru, Bilal, Satrapi, Uderzo et Goscinny, encore et toujours...

Goscinny et Uderzo, on en a beaucoup parlé ces dernières semaines pour cause de nouveauté Astérix. L'exposition du Palais de la Porte Dorée
rappelle qu'Albert Uderzo était fils d'immigrés italiens et que
les parents de René Goscinny étaient polonais du côté de son père - Goscinny a
même depuis peu une statue, un buste en bronze à sa gloire à Varsovie- et
ukrainien du côté de sa mère.

Bilal est aujourd'hui cet auteur qui vend des planches et des peintures à plus de
100.000€ sur les Champs-Elysées. Il est arrivé en France enfant, avec sa mère, venant de Belgrade. Sur la couverture de "l'Etat des stocks" (éd. Futuropolis) qui retrace son parcours, l'homme des Balkans porte sur son dos une lourde valise.  Ses personnages le regardent. On voit quelques monstres, la fille aux cheveux bleus, les apparatchiks de
l'est.

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                                        © Bilal, Futuropolis

A noter, la réédition magnifique, grand format d'un des chefs
d'œuvre de Christin et Bilal "Partie de chasse", formidable récit
qui, il y a 30 ans exactement, n'annonçait rien moins que la fin prochaine de
l'URSS (éd. Casterman).

A découvrir
encore au musée de l'histoire de l'immigration...

Marjane Satrapi, l'iranienne, auteur de
Persépolis, l'ivoirienne Marguerite Abouet à qui l'on doit le scénario d'Aya de
Yopougon, Baru et ses BD sociales, car l'immigration est aussi une question
sociale, l'australien Shaun Tan ou Farid Boudjellal, né à Toulon, qui
raconte aussi bien " Mémé d'Arménie " que " les Beurs " ou
" Le Cousin harki ". Et beaucoup d'autres...

L'exposition " Albums ", des histoires dessinées entre ici et ailleurs, Bande dessinée et immigration 1913-2013, jusqu'au 27 avril 2014, au Musée de l'Histoire de l'Immigration, à Paris.

Le catalogue, sous la direction de Vincent Marie et Gilles Ollivier (coédition Futuropolis/Musée de l'Histoire de l'Immigration).

 

 

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