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Boardwalk Empire revisite la mythologie du gangster

La tradition a du bon. Et Boardwalk Empire appartient à la tradition. La série de la chaîne HBO vient d'achever sa quatrième saison dans une relative discrétion. On peut le regretter car elle s'est imposée comme la gardienne d'un ancien héritage, celui des fictions de gangsters, ce genre primitif du cinéma américain qui a survécu à toutes les époques et à toutes les évolutions. 
Article rédigé par Bertrand Dicale
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
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Boardwalk Empire est bien plus qu'une énième variation sur un sujet presque aussi ancien que le cinéma et la télévision aux Etats-Unis. Cette série diffusée sur HBO de l'autre côté de l'Atlantique et sur Orange en France raconte l'histoire vraie et romancée d'Enoch Johnson, un gangster qui régna sur la cité balnéaire d'Atlantic City pendant près de 30 ans avant d'être arrêté et emprisonné.

Dans la série, le personnage central incarné par Steve Buscemi s'appelle Enoch Thompson, mais le changement de patronyme n'a guère d'importance. Ce qui est essentiel est de rappeler comment la prohibition en voulant moraliser la société américaine, en luttant contre l'alcoolisme, a engendré une criminalité qui n'en demandait pas tant pour s'organiser.

Cette fiction, on la doit à Terence Winter qui a travaillé comme scénariste sur LA grande série de gangsters de ces dernières années, Les Soprano, le chef d'oeuvre du créateur David Chase qui a été considéré comme un tournant dans l'histoire de la fiction télévisée américaine.

Comme le monde est tout petit et que tout est dans tout ou presque, les deux premiers épisodes furent réalisés par Martin Scorsese lui-même, le maître du genre demeurant ensuite producteur de la série au fil des saisons. C'est à grâce à cette filiation que Boardwalk Empire est l'héritière d'une tradition qui remonte aux origines du Septième Art et à Scarface d'Howard Hawk, produit par Howard Hughes, en 1932.

L'identité de l'Amérique

Le grand intérêt de la série est de s'inscrire dans l'histoire et non plus dans une sorte de mythologie qui accompagne depuis l'origine ce genre fictionnel. L'influence de Francis Ford Coppola ou Brian de Palma est évidente, mais en disposant de plus de place, de plus de temps, à raison de  12 épisodes par saison, Boardwalk réussit à aborder les enjeux secondaires, souvent occultés dans ce type de récit.

La place de la communauté noire, la place des anciens combattants après la Première guerre mondiale, celle des femmes dans une époque marquée par la libération des moeurs, le poids des mafieux dans la vie politique locale mais aussi nationale viennent se mêler à la rivalité entre gangsters, aux alliances qui se font et se défont au fil des circonstances.

Pour ne rien gâcher, la série dispose de gros moyens financiers et cela se voit dans le casting, dans les décors, dans le nombre de figurants, etc. Boardwalk Empire apporte ce message assez simple: les Etats-Unis ne se sont pas seulement construits en accomplissant une conquête de l'Ouest du territoire. Ils se sont forgés les armes à la main en abritant une criminalité forte, structurée, puissante, qui ne se cachait pas réellement.

Les gangsters, au même titre que les cowboys et les fermiers, font partie de ceux qui ont construit l'Amérique, qui lui ont donné son identité. Et il est donc assez logique que leurs aventures soient régulièrement remises en scène.

 

 

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