Vrai ou faux
Peut-on se faire poser un anneau gastrique grâce à l'Aide médicale d'État ?
L'Aide médicale d'État est-elle "open bar", comme le dit Laurent Jacobelli ? Invité du 8h30 de franceinfo lundi 30 septembre, le porte-parole du Rassemblement national a appelé à une réforme de l'AME qui est attribuée trop largement aux étrangers. Laurent Jacobelli s'est dit d'accord pour financer la prise en charge de migrants clandestins qui ont des maladies graves et contagieuses, mais "il faut dire stop" à "ceux qui viennent en France illégalement, qui se font poser un anneau gastrique et qui repartent". La journaliste Salhia Brakhlia lui a rétorqué que "ça n'existait pas, ça", mais le député RN de Moselle a assuré que "bien sûr que ça existe et ça a été documenté". Vraiment ?
Aucun rapport sur l'AME ne parle d'anneau gastrique
C'est faux de dire que ce type d'opération a été documenté. Aucun rapport sur l'AME n'est précis au point de parler de pose d'anneau gastrique. Le dernier rapport qui a été publié à ce sujet, remis au ministère de la Santé en décembre 2023, donne le nombre de séjours dans les établissements de santé publics en 2022, en fonction des domaines médicaux concernés (page. 57), mais il ne donne jamais le détail des actes qui ont été réalisés.
Selon ce rapport, plus d'un tiers des séjours à l'hôpital payés par l'AME sont des séances de dialyses ou de chimiothérapie (38%), soit 50 399 sur le total de 128 421 séjours dans l'année. C'est le premier domaine médical à bénéficier de l'AME à l'hôpital. Le deuxième, c'est l'obstétrique (15%) avec notamment plus de 14 000 accouchements.
Le troisième domaine est le digestif (7%). Ce domaine est divisé en quatre spécialités : la chirurgie digestive majeure, la chirurgie hépato-biliaire et pancréatique, la chirurgie viscérale et l'hépato-gastro-entérologie. La chirurgie digestive représente 0,2% des séjours à l'hôpital financés par l'AME en 2022 (257 séjours) et c'est dans ces 0,2% que figurent, peut-être, des poses d'anneaux gastriques, mais aussi d'autres opérations de l'estomac, des opérations de l'œsophage, de l'intestin grêle, du colon et du rectum. Le rapport ne donne pas davantage de détails.
Être en France depuis au moins neuf mois
Nous écrivons "peut-être", car rien ne prouve que des poses d'anneaux gastriques aient vraiment été financées par l'AME, puisque le rapport n'est pas aussi précis. Tout ce que l'on sait, c'est que, en effet, il est possible de bénéficier de l'AME pour se faire poser un anneau gastrique à condition d'être en France depuis au moins neuf mois, comme le précise le site de l'Assurance maladie. Cette opération fait partie des 16 soins qui sont soumis à cette condition, avec le recollement des oreilles décollées qui est aussi souvent brandi par la droite et par l'extrême droite pour appeler à une réforme de l'AME, sans que l'on sache pour autant si l'AME est réellement utilisée pour cela.
En conclusion, il est en théorie possible de bénéficier de l'AME pour se faire poser un anneau gastrique, mais on ne sait pas si ça se fait réellement, aucune donnée publique ne permet de l'affirmer, ni, encore moins, de dire que des migrants viennent en France uniquement pour ça et repartent après.
Pour compléter ces informations, Médecins du Monde explique à franceinfo, mardi 1er octobre, que l'AME ne prend en charge que la part de la sécurité sociale dans les soins qui sont prodigués aux étrangers. Pour le cas de la pose d'un anneau gastrique, la part de la sécurité sociale est de 450 euros environ, alors que le coût total de la pose est de 3 000 à 4 000 euros. Cela revient à dire que le bénéficiaire de l'AME qui voudrait se faire poser un anneau gastrique devrait payer lui-même entre 2 500 et 3 500 euros, alors même que, par principe, les bénéficiaires de l'AME gagnent moins de 850 euros par mois. Ils n'en pas non plus de complémentaire ni de mutuelle pour payer ces frais. Les bénéficiaires de l'AME "sont donc tout simplement loin de pouvoir payer les milliers d'euros de dépassement d'honoraires que coûterait ces prestations", conclue Médecins du Monde.
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