Vrai ou faux
Permis de conduire : efficacité des visites médicales, risque d'accidents des seniors, modalités du contrôle... quelle est la situation ?

Alors que les eurodéputés doivent se prononcer mercredi sur une proposition de loi qui envisage d'instaurer une visite médicale obligatoire tous les 15 ans pour renouveler son permis de conduire, les réactions se multiplient sur les réseaux sociaux ou dans les médias. Franceinfo démêle le vrai du faux.
Article rédigé par Lise Roos-Weil
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
D'après les derniers chiffres consolidés de la sécurité routière, en 2022, les jeunes et les seniors sont tout autant de mauvais élèves sur la route. (MAGALI COHEN / HANS LUCAS)

Faudra-t-il bientôt passer une visite médicale pour renouveler son permis de conduire ? Les eurodéputés se prononcent mercredi 28 février sur ce projet de révision de directive, dans le cadre d'une réforme des règles européennes en matière de conduite. Le sujet fait beaucoup réagir sur les réseaux sociaux ou sur les plateaux télé. Démêlons le vrai du faux.

"Ce projet de loi, c'est comme repasser son permis tous les quinze ans", vrai ou faux ?

C'est faux. Certains internautes sur les réseaux sociaux s'inquiètent de devoir "repasser leur permis". Pierre Chasseray, porte-parole de 40 millions d'automobilistes a, lui, comparé la situation avec le baccalauréat. "Est-ce qu'on vous demande de repasser le bac tous les quinze ans ?". Si le texte est voté, il ne faudra pas repasser le code de la route ou refaire un créneau devant l'examinateur. L'idée est d'avoir une visite médicale, tous les 15 ans, obligatoire, pour vérifier avant tout la vue, l'ouïe et les réflexes. Si le test médical n'est pas validé, le permis n'est pas renouvelé. Le texte propose de rendre obligatoire ce contrôle médical dès l'obtention du permis, et pas à partir d'un âge minimum.

Par ailleurs, les discussions sont toujours en cours. Si le texte est voté au Parlement européen, il sera ensuite négocié avec les États membres. Or, la Commission, comme les 27, veut laisser le choix aux différents pays d'imposer ou non la mesure. Si un gouvernement n'en veut pas, comme c'est le cas de la France, ces visites médicales pourraient être remplacées par une "auto-évaluation".

Aucune étude ne prouve l'efficacité de ces visites médicales, vrai ou faux ?

L'association Prévention routière ou encore 40 millions d'automobilistes affirment que l'efficacité de ces visites médicales n'a jamais été prouvée. En réalité, il n'y a pas beaucoup de publications sur le sujet. En 2001, l'OCDE a écrit dans un rapport que "rien ne permettait d'affirmer" l'efficacité des visites médicales pour les personnes âgées. Le Conseil européen de la sécurité des transports a aussi publié un rapport, en 2021, intitulé "l'aptitude médicale à conduire est-elle adaptée à l'usage prévu?". Les auteurs ont regardé l'effet de la mesure dans des pays qui l'ont instaurée. Ils concluent qu'il "n'a pas été montré que le contrôle obligatoire des conducteurs âgés est efficace pour prévenir les collisions graves". Selon eux, ça peut même avoir un effet négatif car les personnes âgées se reporteraient sur la marche à pied, où ils sont plus souvent victimes d'accidents mortels.

Mais les auteurs de l'étude écrivent aussi que les contrôles médicaux "peuvent être utiles pour identifier des conditions médicales susceptibles d'affecter l'aptitude à conduire", c'est-à-dire des maladies spécifiques, comme l'épilepsie, le diabète, la toxicomanie ou les troubles mentaux. Selon eux, il ne faut pas se concentrer sur l'âge, mais sur les pathologies à risque.

Les auteurs, eux-mêmes, déplorent le manque de données au niveau européen sur le sujet. À noter aussi que les contrôles médicaux analysés dans l'étude sont très variables : dans certains pays, il s'agit uniquement d'un test médical rempli par l'automobiliste lui-même.

"Les seniors sont les plus dangereux sur la route" ou "la population la moins accidentogène", qu'en est-il vraiment ?

Certains internautes affirment, exemples ou témoignages à l'appui, que les personnes âgées sont "les plus dangereuses" sur les routes. Au contraire, le porte-parole de 40 millions d'automobilistes, Pierre Chasseray, affirme, lui, que "c'est la population la moins accidentogène". D'après les derniers chiffres consolidés de la sécurité routière, en 2022, les jeunes et les seniors sont tout autant de mauvais élèves. 80% des 75 ans et plus, quand ils sont impliqués dans un accident mortel, sont responsables de la collision. Les jeunes et les personnes âgées sont aussi les plus tués sur la route. Mais pas pour les mêmes raisons. Chez les plus âgés, les malaises arrivent en tête des causes d'accident, devant le non-respect des priorités et l'inattention. Chez les jeunes, c'est la vitesse qui est surtout en cause. 

Le chiffre de 17% des accidents mortel causés par des seniors est aussi souvent avancé, pour justifier qu'il s'agit de la population "la moins accidentogène". Mais il s'agit d'un chiffre issu du bilan de la sécurité routière de 2017, il y a sept ans.

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