Cet article date de plus de quatre ans.

Coronavirus : non le port du masque n'est pas dangereux, contrairement à ce qu'affirme une publication sur Facebook

Un visuel partagé sur des groupes Facebook laisse entendre que le port du masque est dangereux. "C'est faux et cela ne repose sur rien" répondent les médecins interrogés par franceinfo. 

Article rédigé par franceinfo - Emilie Gautreau
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Clientes masquées sur le marché de Lesneven, dans le Finistère, le 20 juillet 2020 (VINCENT MOUCHEL / MAXPPP)

"Porter un masque pour se protéger, ce que vous devez savoir avant d'en porter un" : ce visuel, partagé notamment sur Facebook, énumère des dangers supposés liés au port du masque. "Un tissu d'âneries", commente  le Dr Gilles Dixsaut, médecin à la Fondation du Souffle, président du Comité Francilien contre les Maladies Respiratoires. Explications point par point. 

Non, le port du masque ne "diminue pas l'apport en oxygène"

La publication prétend que "la respiration au travers d'un masque diminue la quantité d'oxygène dont nous avons besoin pour vivre et être en bonne santé". 

"C'est faux, commente le Dr Dixsaut. La concentration d'oxygène est la même des deux côtés du masque, le masque ne peut en aucun cas diminuer la concentration en oxygène". Le médecin ajoute que le masque crée une résistance supplémentaire à la respiration et peut entrainer une gêne chez des personnes qui ont déjà des résistances respiratoires élevées (bronchopathies chroniques obstructives, asthme...) sans diminuer pour autant la quantité d'oxygène. "Cela se règle, dit-il, par le port d'un masque approprié". Il rappelle par ailleurs la nécessité de changer régulièrement de masque, d'autant que le masque, en se chargeant en humidité (contenue dans la respiration) fait augmenter au bout d'un moment la résistance respiratoire. 

Non, on ne se met pas en danger en inhalant l'air qu'on a expiré 

Le visuel prétend également que le port du masque augmente l'inhalation de toxines et que "les toxines que nous expirons [...] sont piégées dans le masque et ré-inhalées dans les poumons, ce qui augmente les symptômes". D'autres publications du même type prétendent qu'il y aurait un risque à inhaler le dioxyde de carbone qu'on expire. 

"C'est une grosse ânerie, répond le Dr Dixsault. Le dioxyde de carbone est exhalé par la respiration mais il traverse le filtre parfaitement bien. En aucun cas le filtre ne peut retenir le dioxyde de carbone qui passe plus facilement le filtre encore que l'oxygène". Le médecin ajoute que le masque ne fait qu'ajouter un "espace mort" supplémentaire (espace dans les voies aériennes qui ne participe pas à la respiration) mais que cette augmentation de quelques millilitres est tout à fait négligable par rapport à l'espace mort physiologique qui est de l'ordre de 150 millilitres. 

Egalement interrogé sur ce sujet par franceinfo, le chef des urgences de l'hôpital Delafontaine de Saint-Denis, Mathias Wargon, met en avant le fait que les masques sont portés sans souci par les médecins, qui ont réclamé pendant des mois des masques FFP2 avec lesquels on respire pourtant moins bien. Prétendre que c'est dangereux d'en porter "est totalement faux", martèle-t-il lui aussi. 

Non, le port du masque ne détériore pas le système immunitaire

La publication affirme que le port du masque, en diminuant l'apport en oxygène, "soumet l'organisme à un stress, libère du cortisol et détériore le processus immunitaire". 

"Cela n'est fondé sur rien du tout, commente Gilles Dixsaut. Même si toutes les situations de stress peuvent entraîner une augmentation de la production de cortisol, aucun argument de preuve ne va dans le sens de ce qui est avancé [ par les auteurs de la publication ] qui n'apportent aucun élément de démonstration"

Non, le port du masque ne réveille pas des virus dormants

Le visuel affirme que le masque "favorise le déclenchement et l'infection de rétrovirus dormants déjà présents dans l'organisme". 

"C'est encore une ânerie", rétorque Gille Dixsaut qui pointe le fait que des éléments sont avancés sans aucun élément de démonstration. "C'est du vent, cela ne repose sur rien", ajoute t-il. 

Non, le masque n'est pas "une passoire pour le virus" 

La publication met également en cause le tissage du masque qui serait inadapté et s'apparenterait à une "passoire" laissant passer les virus. 

Pour le Dr Dixsaut, "cela montre que ces gens ne connaissent pas les mécanismes physiques de filtration dans des dimensions nanométriques". Cela n'a rien à voir, explique-t-il, avec un filtre type filtre à sable qu'on utilise sur la plage. 

"Le nez, ajoute le médécin, est par exemple un excellent filtre de nanoparticules alors que c'est un gros trou". C'est dû, ajoute-t-il, à un certain nombre de mécanismes qui interviennent. Compte tenu de la dimension du coronavirus -130 nanomètres environ- la filtration repose sur des mécanismes dont l'agitation moléculaire (mouvement brownien) ainsi que des mouvements toubillonnaires de l'air qui traverse le filtre qui font que les particules vont se fixer sur les éléments du filtre. 

Mathias Wargon pointe lui la contradiction des auteurs de la publication qui prétendent que l'oxygène ne passerait pas à travers le masque mais que le masque laisserait en revanche passer le virus. "C'est vraiment n'importe quoi, d'autant, commente-t-il, qu'un virus est beaucoup plus gros que des molécules d'oxygène ou de CO2".

Non, le masque n'est pas inefficace

Quant au fait de dire que le masque est inefficace, "c'est faux depuis la fin du 19ème siècle", commente Gilles Dixsaut. "Si les chirurgiens portent des masques depuis cette époque, c'est, dit-il, parce qu'on a clairement démontré sa double efficacité: protéger le malade contre les bactéries et virus qui peuvent être émis par le chirurgien et protéger le chirurgien contre les bactéries et virus que le malade peut émettre"

Depuis juin dernier, l'Organisation Mondiale de la Santé recommande de porter un masque dans les zones très fréquentées et à fort risque de transmission du virus. L'OMS met en avant dans son communiqué de récentes études qui montrent que le port du masque réduit considérablement la probabilité d’être contaminé en cas de rencontre avec une personne infectée. 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.