Le vrai du faux. Un homme a-t-il été condamné pour "non-partage des tâches domestiques" en Espagne, comme le dit Sandrine Rousseau ?
La députée écologiste de Paris s'est félicitée de cette condamnation sur Twitter et a dénoncé les inégalités de répartition des tâches entre les hommes et les femmes, "au cœur du patriarcat" selon elle.
A l'occasion de la journée internationale des droits des femmes, le 8 mars, Sandrine Rousseau a voulu célébrer une bonne nouvelle pour les femmes. Sur Twitter, elle a partagé un article de RTL et a écrit : "En Espagne, un tribunal condamne un homme pour non-partage des tâches domestiques. 200 000 euros tout de même ! L'inégalité des tâches domestiques (comme les violences) sont le cœur du patriarcat." Mais elle déforme un peu la réalité.
En Espagne, un tribunal condamne un homme pour non partage des taches domestiques. 200000 euros tout de même!
— Sandrine Rousseau (@sandrousseau) March 8, 2023
L'inégalité des tâches domestiques (comme les violences) sont le coeur du patriarcat.#DelitDeTachesDomestiques #8mars #8mars2023https://t.co/ntDFF7Qvg2
Un homme a bien été condamné
L'information sur laquelle elle se basait est vraie, un homme a bien été condamné à verser 204 000 euros à son ex-femme - et à lui verser une pension - mais ce n'est pas pour "non-partage des tâches domestiques". De nombreux internautes l'ont relevé et l'ont signalé à la députée féministe.
L'homme a été condamné parce que, pendant leurs 24 ans et demi de mariage, cette femme n'avait pas le droit de travailler. Son mari voulait uniquement qu'elle s'occupe de la maison et de leurs deux enfants. Ivana Moral était entièrement dépendante financièrement de son époux et devait lui réclamer de l'argent pour faire la moindre course, comme elle l'a expliqué à plusieurs médias espagnols. Pendant ce temps, lui a mené une belle carrière. Il a ouvert des salles de sport, a investi et a fait fortune. Sauf qu'en 2020, à leur divorce, la femme s'est retrouvée avec quasiment rien, car ils étaient mariés sous le régime de la séparation de biens.
Compensation et reconnaissance du travail domestique
L'article 1438 du Code civil espagnol stipule que "les époux contribuent à l'entretien du mariage. A défaut d'accord, ils le feront au prorata de leurs ressources économiques respectives. Les travaux de la maison seront comptabilisés comme une contribution aux charges et donneront droit à obtenir une indemnité que le juge indiquera, à défaut d'accord, à l'extinction du régime de séparation". C'est une forme de reconnaissance du travail accompli sans aucune rémunération.
En France, il existe également une prestation compensatoire pour indemniser une personne qui perd beaucoup en niveau de vie après une rupture. Ce n'est pas un salaire rétroactif, comme en Espagne, mais plutôt une compensation tournée vers l'avenir, comme l'explique l’avocate Me Muriel Guillain à CheckNews de Libération.
Sandrine Rousseau veut créer un "délit de non-partage des tâches domestiques"
En conclusion, l'homme n'a donc pas été condamné en soi parce qu'il ne s'est pas occupé de la maison, mais parce que son ex-femme a sacrifié sa carrière et a été lésée. Cela n'équivaut donc pas au délit de non-partage des tâches domestiques évoqué par Sandrine Rousseau. En fait, l'écologiste profite de cette information pour reparler du délit qu'elle aimerait créer, elle en avait parlé pendant la campagne présidentielle de 2022.
Faire reconnaître dans un couple un non-partage des tâches domestiques comme on reconnaît les violences au sein des couples ?
— Madmoizelle (@Madmoizelle) March 21, 2022
C’est la proposition de @sandrousseau. ⬇️https://t.co/Cb6tOkcZrj pic.twitter.com/mHYjSm3oUk
Elle avait fait cette proposition lors d'une interview par Madmoizelle. Son projet visait plutôt les déséquilibres de répartition des tâches au quotidien, dans un couple où les deux personnes travaillent et où il est vrai, les femmes font encore bien souvent des doubles journées. "C'est vraiment un impensé des politiques d'égalité femmes-hommes, les femmes font quand même huit heures de plus de travail domestique par semaine, non payé, et c'est crucial", expliquait-elle. À l'époque, la proposition avait beaucoup fait réagir.
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