Le vrai du faux. Non, des enfants ne sont pas enlevés par "des Roumains" dans des magasins Kiabi
Antoine Krempf passe au crible des faits repérés dans les médias et les réseaux
sociaux. Aujourd’hui, une rumeur d'enlèvements d'enfants dans des grandes surfaces qui fait son retour sur Facebook.
Retour d'une rumeur vielle de 60 ans. Depuis une dizaine de jours maintenant, des dizaines de milliers de personnes partagent un petit texte sur Facebook qui alerte sur une tentative d'enlèvement d'enfant - l'une des plus grandes craintes dans la vie de parents - dans un contexte tout à fait banal, histoire de dire que cela peut arriver à tout le monde et avec des étrangers qui font sans doute du trafic d'enfants.
"Attention au Kiabi, lit-on ainsi sur le post, une maman avait son enfant dans la poussette, elle s'est tournée un instant, plus de gosse. Les gérants ont fermé les portes et fouillé le magasin. Le petit était dans une cabine d'essayage avec trois hommes d'origine roumaine, ils lui changaient les habits et étaient en train de lui raser les cheveux !" Bref, tous les ingrédients pour que cette histoire soit massivement relayée au nom du principe de : "Je partage au cas où."
Finalement peu importe si on ne sait pas où cela s'est passé, dans quel magasin précisément ni quand la tentative d'enlèvement a eu lieu ou si les autorités ou les médias en ont parlé.
C'est faux. Cette histoire est donc une légende urbaine. Le principe même de ces légendes est qu'elles reviennent par cycle sur les réseaux sociaux. Ces dernières années, on a donc eu la même histoire dans des Kiabi du Nord, de Bayonne ou de Tarbes. On a aussi eu la version Ikéa en Belgique ou Auchan en Ardèche. En fait, en cherchant rapidement, je suis remonté à 2007 avec ce message posté sur un forum : "Je viens d'apprendre cette nouvelle et depuis je suis sur mes gardes ça me fait peur j'en dors plus ! Une dame dans une grande surface à Orléans était en train de regarder des produits dans les rayons et quand elle se retourne sa fille n'était plus dans le Caddie ! Paniquée elle hurle et la sécurité du magasin bloque toutes les portes. Au bout de 30 minutes ils arrivent à retrouver la petite dans un placard bâillonné et entièrement rasée !!"
Bref, le même message partagé il y a maintenant plus de 10 ans, mis à part cette histoire de Roumains qui a visiblement été ajoutée par la suite. Cette rumeur en rappelle une autre qu'on a d'ailleurs appelé à l'époque la rumeur d'Orléans et qui ressemble beaucoup à l'histoire du Kiabi. On est en 1969. L'histoire racontait que des jeunes femmes enlevées dans des cabines d'essayages de magasins tenus par des commerçants juifs pour alimenter un réseau de traite des blanches. Histoire totalement infondée, mais voilà ce qu'en disait des ados d'Orléans interrogés à l'époque à la télévision : "Il doit bien y avoir du vrai là-dedans... pas de fumée sans feu." Exactement le même genre de commentaires qu'on lit en ce moment sur Facebook dans la rumeur du Kiabi et des Roumains. Bref, sur les ressorts du partage des rumeurs, les réseaux sociaux n'ont visiblement rien changé.
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