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Le vrai du fake. La chute d'une légende d'Hollywood et une drogue de synthèse qui rend cannibale

Vrai ou fake ? Marie Colmant et Antoine Krempf passent au crible deux infos repérées sur le web et les réseaux sociaux.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
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Harvey Weinstein (à gauche) et une jeune femme censée avoir consommé une drogue de synthèse qui rend cannibale (à droite). (MAXPPP - CAPTURE D'ECRAN)

Le vrai : une légende d'Hollywood tombe de son piédestal 

Harvey Weinstein était l’un des hommes les plus importants d’Hollywood, celui qui faisait des carrières, jusqu’à la parution jeudi dernier d’une enquête du New York Times. Depuis, il y a le feu à Hollywood. Et l’affaire Weinstein remonte jusqu’à Washington.

Le quotidien américain révèle que depuis trente ans, Harvey Weinstein, grand patron de la Weinstein Company, était un adepte de la promotion canapé pour les jeunes actrices, secrétaires, assistantes, mannequins, y compris sous la contrainte pour celles qui s’y refusaient. L’enquête du New York Times s’appuie d’ailleurs sur les interviews de ces femmes qui avouent également avoir accepté de l’argent en échange de leur silence.

Un producteur majeur du cinéma d'auteur. Mais qui est donc Harvey Weinstein, largement inconnu du public français ? On peut reprendre la phrase de Meryl Streep pour le caractériser : "A Hollywood, Harvey Weinstein c’est Dieu". Plus prosaïquement, il vient du Queens, un quartier de New York où, avec son frère Bob, il fonde une petite maison de production de cinéma à la fin des années 1970 qu’ils baptisent Miramax. Après dix ans de galère, ils touchent le jackpot avec Sexe, mensonges et vidéo, premier film de Steven Soderbergh, qui récolte la palme d’or au festival de Cannes en 1989. Miramax devient à ce moment-là, l’une des productions clés de Hollywood, Pulp Fiction de Tarantino, Will Hunting de Gus Van Sant, Gangs of New York de Scorsese, etc. En 2005, Harvey Weinstein quitte Miramax pour fonder la Weinstein Company. Il est passé au stade de légende.

Un soutien régulier des démocrates. Riche à milliards, ce libéral est aussi l’un des plus importants donateurs du parti démocrate, l’un des financiers de la campagne de Barack Obama, dont il prendra une de ses filles en stage, puis l’année dernière d’Hillary Clinton. C’est là que l’affaire Weinstein prend une dimension politique. L’occasion est trop belle pour le parti républicain qui publie la liste des démocrates concernés et le montant des dons. Ces derniers n’ont pas tardé à réagir en annonçant qu’ils versaient toutes les sommes à des œuvres de charité.

Weinstein, quant à lui, a publié une lettre d’excuses en expliquant qu’il voyait un thérapeute pour amender son comportement. Et à Hollywood, qu’est-ce qui se dit ? Rien. Silence radio total. Pas un mot de la grande Meryl Streep, de Julia Roberts, ni même de George Clooney. Personne jusqu’à présent n’a soufflé mot.

Le fake : au Brésil, une drogue rendrait cannibale

Un compte Facebook basé au Brésil a énormément de succès, depuis qu’il a partagé deux vidéos censées montrant deux consommateurs de cette drogue de synthèse. Elle est appelée la Flakka, sels de bains ou encore Cloud nine. Sur la première de ces vidéos, on voit une femme qui gît sur la remorque d'un fourgon. Elle a les yeux révulsés et s'arrache les cheveux. Sur la seconde vidéo, un jeune homme se frappe violemment le crâne sur le parebrise d'un bus. Ces deux vidéos impressionnantes sont accompagnées d’une alerte sur la drogue du zombie. Le message prévient qu’elle arrive au Brésil et qu’elle peut transformer en cannibale celui qui en prend. Résultat : 1,7 million de partages sur Facebook en l'espace d'une semaine. Et des dizaines de médias relaient ces vidéos brésiliennes censées montrer les ravages de la drogue, en insistant bien au passage sur ses effets.  

Il faut démonter plusieurs éléments de cette affaire. D'abord sur l'origine de ces vidéos. Le compte Facebook qui les a rendues populaires les a en fait chipées ailleurs. La vidéo de la jeune femme a été publiée par le site du quotidien brésilien O Globo, qui nous explique que les faits remontent au  28 septembre. Selon ce journal, la femme traînait au milieu d'une route. Elle a été amenée à l'hôpital, qui est formel : aucun test toxicologique n’a montré la présence de la drogue dite du zombie dans le sang de la patiente. Même absence d'infos, de contexte, pour les images du jeune homme énervé contre un bus. La vidéo trainait depuis plusieurs jours sur YouTube sans référence à la drogue.

Le compte Facebook qui a rendu ces deux vidéos très populaires n'a aucun élément solide pour affirmer que ces deux jeunes personnes ont pris de la drogue du zombie. Et par conséquent, les médias qui se basent uniquement sur cette publication virale pour faire des articles, non plus.  

Des articles affirment aussi que cette drogue du zombie rend cannibale. On nous dit qu’au moins un cas de cannibalisme lié à cette drogue a été enregistré aux Etats-Unis l'an dernier. On nous renvoie sur une sombre histoire qui s'est déroulée en août 2016 en Floride. Un couple de quinquagénaire assassiné par un jeune homme de 19 ans. Quand les policiers sont arrivés sur place, le meurtrier était en train de manger des morceaux de visage, sûrement à cause de la Flakka, la drogue des zombies, disait-on à l'époque, notamment dans des médias français. Sauf que là encore, les résultats de la toxicologie du jeune homme arrêté sont sans appel : aucune trace de drogue dans son organisme.

Il n’existe aucun élément pour affirmer que les vidéos du Brésil montrent des personnes sous l'emprise de la drogue du zombie. Et absolument aucun élément pour dire que cette drogue rend les gens cannibales.

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