Dans la galerie d'artunderground Vinzavod, en bordure du centre-ville de Moscou, l'artiste peintreEvguénia Maltseva montre au public ses tableaux depuis deux semaines. Septtableaux dont trois ont été bénis pour en faire des "icônes" au sens propredu terme. Trois tableaux qui représentent les nouvelles icônes russes, NadejdaTolokonnikova, Maria Alekhina, et Ekaterina Samoutsevitch. Sur la toileapparaissent en négatif les visages encagoulés des activistes emprisonnées.Lors de l'inauguration de cette exposition une vingtaine de militantsorthodoxes est venue chercher la bagarre. Ils ont été interpellés par la policede Moscou. Depuis mars dernier, la capitale russe vit au rythme de cesaltercations, de ces débats entre pro et anti Pussy Riot. De nombreux soutiens d'artistes internationauxL'émotion suscitée par cetteaffaire a surpris beaucoup de Russes, y compris les proches des jeunes femmes.De Madonna à Jeanne Cherhal en passant par les Red Hot Chili Peppers, lamobilisation a été très importante. Pourtant malgré tous ces soutiens, "la Russie n'est pas prête à adoucir son jugement en appel" explique Mark Feyguin l'avocat de Nadiejda Tolokonnikova. "C'est une décision politique, et qui restera politique. Vladimir Poutine a besoin de prouver qu'il garde la main sur cette affaire. Et si l'Occident est derrière les Pussy Riot, l'opinion publique en Russie est beaucoup plus partagée. Elle est même dans l'ensemble assez hostile" aux trois Moscovites.Une opinion publique russe très partagée effectivement. Le chauffeur de taxi vous explique "qu'elles ont violé une loi sacrée" , votre voisine de restaurant que "si elles avaient fait la même chose dans la rue, elle aurait accepté, mais dans une église, non. Deux ans de camp, c'est une décision normale" , pour Anastasia une trentenaire Moscovite, de la même génération que celle des Pussy Riot.CondamnationdisproportionnéeDe plus en plus de Russes, malgré tout, ont été progressivementconvaincus de la disproportion de la peine appliquée aux Pussy Riot. "Même ausein de l'église orthodoxe, des prêtres demandent leur libération" assure YaroslavNikitenko, militant pro-Pussy Riot très impliqué dans la mobilisationmoscovite. Au sein du mouvement de contestation, même les franges les plusnationalistes ont récemment pris position en faveur des Pussy Riot, à l'imagede la star politique, le blogueur Alexis Navalny, qui ne défend pas leur actionhonteuse, mais "l'arbitraire qui a entaché leur condamnation" le 17 aoutdernier, "ce même arbitraire qui a poussé des milliers de Russes à descendredans la rue depuis l'hiver dernier pour demander des élections propres" .Quelle que soit la décisionrendue par la justice russe, "cette affaire aura ouvert un débat que lesRusses ne sont pas prêts de refermer" , conclut Sacha Koulaieva de la FIDH, lafédération, "dans un pays où l'arbitraire ne se discute d'habitude pas" . Undébat autour de la place de la religion dans la société, du lien entre Egliseet Etat en Russie. Un débat porté par trois féministes, "ce qui est aussiquelque chose que de nombreux Russes n'acceptent pas ou ne comprennent pas" .Même si le Premier ministreDimitri Medvedev a laissé entendre que la place des Pussy Riot n'était pasderrière les barreaux et a "relancé" le suspense à l'approche de cettenouvelle audience, très peu de personnes croient véritablement à une surprise lorsde ce procès en appel.