Les acquittés du Ponant lâchés dans la nature à Paris
Abdurahman Ali Samatar descend du scooter comme on sort d'un
tour de manège. C'est la première fois de sa vie, dit-il, qu'il monte sur un
deux-roues. Il vient de faire un tour dans Paris avec son avocat qui l'a
volontairement fait passer devant le Palais de justice.
Abdurahman est libre depuis moins d'une semaine. Avec un
autre Somalien, il a été acquitté par la cour d'assises de Paris. Il découvre
la liberté et la France avec deux autres compatriotes, Abdulqader Guled Said,
également acquitté, et Abdullahi Youssouf Hersi, condamné à quatre ans de
prison, une peine couverte par sa détention provisoire.
Abdurahman a 28 ans et un physique de basketteur poids
plume. Des yeux noir ébène. Il était pêcheur
de langouste dans le nord de la Somalie il y a quatre ans. Il a été arrêté par
l'armée française dans un pick-up, soupçonné d'avoir trempé dans la prise
d'otage du Ponant. Ramené en France, il reste deux ans sans pouvoir communiquer,
seul Somalien incarcéré dans la prison d'Osny.
Aujourd'hui, le jeune pêcheur vit dans un foyer d'accueil
près de la gare de Lyon avec ses deux compagnons d'infortune. C'est une
solution provisoire. Abdurahman est sorti de prison avec les vêtements donnés
par les codétenus, des tickets de métro, et quelques centaines d'euros gagnés
en travaillant en prison.
Son premier achat est un téléphone portable trouvé à Barbès pour appeler deux
de ses sœurs et un de ses frères qu'il a régulièrement ligne. Aujourd'hui, il
fait le deuil de sa famille et de ses nuits à la belle étoile près de la plage
dans son pays.
Depuis sa sortie de prison, le trio de Somaliens est pris en
charge par les avocats qui ont payé deux nuits d'hôtel en urgence et trouvé le
premier foyer d'accueil. Ils envisagent de faire une demande d'asile pour leurs
clients, mais la procédure est longue. Les trois hommes attendent donc de
savoir si le parquet fait appel du verdict, sans papier, sans statut.
Il y a six mois, un premier Somalien avait été acquitté dans
une autre affaire de piraterie, celle du Carré-d'As. Abdulahi Ahmed Guelleh vit
avec 280 euros dans un foyer en banlieue parisienne. Il attend l'examen de sa
demande d'asile, sans avoir le droit de travailler.
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