L’afflux des réfugiés inquiète les élus angevins
A la sortie de la gare SNCF d’Angers, sous un escalier, des couvertures entassées. Le soir, ils sont une quarantaine à dormir là, dans le froid grandissant de novembre. Quelques semaines plus tôt, ces campeurs nocturnes se serraient sur le parvis de l’Hôtel de Ville. On leur a demandé de partir, comme on leur demandera certainement de quitter la gare. Pour eux, c’est aussi une manière d’être vus, pour qu’on ne les oublie pas.
D’autres se réfugient là où ils auront un peu plus chaud, une maison en ruines fera l’affaire. En 2009, ils étaient principalement Darfouris. L’an dernier Erythréens. Cette année Somaliens, comme Liban Yusuf, 26ans, chemise sous un pull beige immaculé. Ce n’est pas parce qu’il est SDF qu’il va renoncer à l’élégance. Il nous mène jusque dans un ancien abattoir en friche, entre un centre commercial et des locaux de la banque alimentaire. Du verre par terre, un couloir plongé dans le noir, et une lourde porte cadenassée.
La ville n’est pourtant pas avare en hébergements d’urgences. 650 places pour une agglomération de 280.000 habitants, et un tissu associatif exemplaire. Droit au Logement, l’Office Saint-Vincent-de-Paul, le Secours Catholique, l’Abri de la Providence… Les structures ne manquent pas, qui tentent d’aider les plus démunis, qu’ils soient Français ou étrangers.
Sans parler des démarches individuelles. Des Angevins comme Jean-Louis Verneau ouvrent leurs portes à ceux qui sinon dormiraient dans la rue. Lui est à la retraite, engagé dans un collectif sans structure légale. Ancien géomètre, il a parcouru la planète, rencontré toutes ces cultures. Il en reste des photos-portraits éparpillées sur le sol d’un appartement capharnaum chaleureux. Il considère qu’accueillir ces migrants n’est qu’un juste retour des choses, son simple devoir d’humain.
Tant de volonté, tant d’énergie dans une même ville, mais ça ne suffit pas. La demande est trop forte. Rose-Marie Véron est l’adjointe au maire (PS) chargée de l’action sociale.
Rose-Marie Véron rencontre aujourd’hui Claude Guéant au ministère de l’Intérieur. A ses côtés notamment le président (UMP) du Conseil Général du Maine-et-Loire, Christophe Béchu. Le problème dépasse les clivages politiques. Il est d’abord administratif.
Pour enregistrer une demande d’asile, un étranger doit passer par une plate-forme "Eurodac", un endroit où déposer son dossier pour la préfecture. En 2008, par souci d’économie, l’Etat fermait près de la moitié de ces plate-formes en France. Et aujourd’hui, dans la région Pays-de-la-Loire, tous les réfugiés affluent vers Nantes et Angers.
Près de la gare, les salariés d’Espace Accueil tentent d’aider les migrants. Mais chaque matin, ils sont tellement nombreux à attendre que les rendez-vous sont attribués en à peine quelques minutes. Neuf cents nouveaux arrivants à traiter chaque année : le temps passe trop vite, beaucoup devront revenir le lendemain.
Tous, élus comme associations, veulent une réorganisation des plate-formes, davantage d’équité entre les départements. "L’Anjou, parce qu’il est une terre d’accueil et d’entraide, fait les frais de l’absence de solidarité à l’échelle régionale ", s’indigne Christophe Béchu.
Ils aimeraient aussi des moyens supplémentaires, mais ce n’est peut-être pas l’essentiel. Ils veulent surtout se sentir épaulés. La prise en charge des demandeurs d’asile devrait relever de l’Etat. Ils le rappelleront sans doute à Claude Guéant. En attendant l’arrivée des réfugiés syriens.
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