En France, un couple sur trois se sépare. Une statistique pour certains, un enfer pour d'autres qui, après desannées de vie commune, voient l'incompréhension, la haine parfois,brouiller les pistes jusqu'à ce qu'aucune communication ne soit pluspossible.Et au milieu, parfois pris en étau, il y a souvent desenfants. Souvent aussi, les parents ne parviennent pas à se mettre d'accord surle mode de garde. C'est à ce moment-là que le juge aux affaires familiales peutdemander une enquête sociale. Dans le dossier que nous avons choisi de suivre, la mission a été confiée àl'association Apcars. L'une de ses enquêtrices, assistante sociale et psychologuede formation, va s'occuper de cette famille.Marianne Gérodolle, 56 ans, va rencontrer une famille de quatre membres, les deux enfants et les deux parents. Elle va les écouter, noterce qu'ils lui disent et puis d'ici quelques semaines, elle remettra un rapportd'une vingtaine de pages au juge aux affaires familiales qui décidera comment, quand et avec qui chacun des membres va vivre.Première étape, Marianne Gérodolle arrivechez le père dans le 12ème arrondissement de Paris.Dans l'appartement où il vit avec ses deux fils une semaine sur deux, il y ades instruments de musique, des dessins, des livres... Dans chaque pièce, on perçoitla présence des deux enfants même s'ils ne sont pas là.Assisà la table du salon face à elle, le père raconte un épisode douloureux, un lundi soir. Il va chercher ses enfants à lasortie de l'école. La mère est là. Elle refuse qu'il les ramène chez lui. Elle aappelé la police. "Je venais simplement récupérer mes enfants " plaide-t-il. Les enfants sont eux au milieu de ce drame qui se joue devant l'école, devantleurs copains... Pendant deux heures, l'enquêtrice écoute cet homme dire savérité, sa version des faits.A quelques jours d'écart, l'enquêtriceva entendre une toute autre version, celle de la mère. Dans un trois pièces àla déco soignée, les BD, les figurines de Barbapapas cohabitent avec des revuesd'art. Cette femme d'une quarantaine d'années raconte de son côté le quotidiende cette garde alternée dont elle semble tant souffrir. "J'ai l'impressionqu'on me les prend toutes les semaines " explique-t-elle.Aprèsdeux heures de discussion, l'enquêtrice repart. Mais avant elle rappelle que sonobjectif essentiel c'est le bien-être des enfants. Elle reviendra d'ailleurs aprèsles vacances scolaires pour les rencontrer. L'enquêtrice partie, la maman ditson soulagement d'avoir été entendue.Lesdeux parents sont au moins d'accord sur une chose, la juge n'a pas pris letemps de les écouter : une dizaine de minutes pour la mère et 25 secondes pour le père, selon lui.Ilest vrai que la magistrate chargée de ce dossier n'a pas encore pris sadécision. Audrey Prodhomme a préféré prendre son temps et revoir tous lesmembres de la famille à la suite d'un événement qui lui a fait craindre undanger pour les enfants. La juge a reçu un courrier des enfants lui expliquantqu'ils avaient menti sous la menace d'un des deux parents.A la suite de cela,elle a rencontré une nouvelle fois parents et enfants et ordonné cette enquêtesociale pour tenter de démêler une affaire manifestement très compliquée. Tous ses dossiers ne le sont pas autant mais la magistrate en gèrebeaucoup, 600 affaires en moyenne par an.Dansces circonstances, les enquêtes socialesapparaissent encore plus nécessaires. L'enquêteur/enquêtrice a le temps d'aller chezles enfants pour évaluer si leur bien-être est respecté avec ses propres critères,qui ne sont pas seulement matériels. La taille du logement compte moins que le respect duparent à l'égard de son enfant.Ces enquêtes ont un coût, 700 euros par dossier. Lafamille paie ou l'Etat si elle n'en apas les moyens. Les magistrats y ont fréquemment recours en partie parce queles pères revendiquent de plus en plus souvent une place auprès de leurs enfants à égalité avec les mères. Lafamille change, la justice s'adapte.