L'ABCD de l'égalité est expérimenté depuis l'automne dans 275 écoles primaires réparties dans dix académies. Le but est de lutter contre certaines inégalités ou stéréotypes. Il a été l'objet de vives critiques de certains opposants qui estiment que l'école dépasse sa fonction. Reportage dans une école primaire près de Lyon qui pratique l'ABCD de l'égalité.Ce matin-là, il pleut dans la cour de l'école, les enfants jouent, et leur enseignant de CM1-CM2 repère déjà quelques habitudes. "Vous voyez, les garçons courent dans tous les sens, ils occupent tout l'espace et les filles sont là dans leur petit coin, à jouer à la marelle ", constate-t-il.De retour en classe, il leur distribue des plans de la cour, les élèves doivent alors tenter de retracer leur parcours. Le but est que les garçons se rendentcompte de l'espace qu'ils prennent, parfois au détriment des filles qui souhaiteraient jouer avec eux. "Il faut que chacun se sente libre dans lacour ", explique le maître. Certaines filles disent tout de suite qu'elles se sentent exclues, même si certains garçons tempèrent : "Y'a bien des filles comme Yasmine qui jouent au foot, et il y a bien du foot féminin à la télé ", explique l'un d'eux.Une femme présidente de laRépubliqueDeuxième exercice de cetteséance d'ABCD, elle durera une bonne heure, les enfants sont invités à dire cequ'ils pensent de certaines phrases, comme "les garçons jouent au foot,les filles à la marelle ", "les filles font des histoires ","les garçons se bagarrent ou les filles sont plus calmes ". Les débatssont animés mais la plupart des enfants en arrivent vite à la même conclusion :"On va débattre, mais il faut rétablir l'égalité parfois ", dit unepetite fille, "parce qu'on peut très bien être plus fortes au foot ".Et la discussion glisse sur les métiers prétendument de femme ou d'homme."On pourrait imaginer que des hommes deviennent sages-femmes " confieune petite fille. De son côté, un élève assure : "Bien sûr qu'une femmepeut être présidente de la République ".Il ne s'agit donc pas du toutde gommer les différences entre les filles et les garçons. On est très loin dumodèle de certaines crèches suédoises où les garçons s'habillent en filles, etles filles en garçons. Simplement, les élèves sont amenés à prendre consciencede certains clichés qui persistent grâce à des lectures ou des débats enclasse. Les enfants de 10 ou 11 ans le comprennent très bien : "L'ABCD del'égalité a été fait pour que les hommes et les femmes soient égaux, ça nousmet sur un bon chemin ", explique un élève. "Il ne faut pas qu'on seprive de choses qu'on peut faire parce qu'on est une fille ", conclut unecamarade."On est beaucoup plusexigeant pour le soin des cahiers avec les petites filles" (une directriced'école)De leur côté, les enseignants de cette école sont convaincus de l'intérêtpédagogique de ce dispositif. Ils ont reçu une formation d'une journée et ilsse sont eux-mêmes rendu compte que leurs pratiques étaient parfois dépassées."On est beaucoup plus exigeant pour le soin des cahiers aves les petitesfilles ", explique la directrice qui accepte volontiers cette remise enquestion. Pour elle, il faut que les enseignants et les enfants prennentconscience des ces différences entre les filles et les garçons mais il ne fautpas qu'elles les "enferment dans un carcan ".Dans cette école, aucunélève n'a été absent lors des récentes journées de "retrait del'école" contre ce dispositif. L'enseignant de cours moyen l'assure,"il y a besoin de plus d'égalité pour bien apprendre ". "Ce qui aété dit dans les textos contre l'ABCD de l'égalité, ce n'est pas ce qui se passe en classe, c'est du fantasme ", ajoute-t-il.A LIRE AUSSI ►►► DECRYPTAGE | Qu'est-ceque la théorie du genre ?Aujourd'hui certains opposants à ce dispositif demandent l'arrêt de cet ABCD del'égalité mais la plupart des syndicats enseignants souhaitent qu'il soitgénéralisé à toutes les écoles en septembre 2014. Le ministre de l'Educationl'a également promis.