En Sicile, aux côtés des migrants mineurs
Le port d'Augusta est en première ligne quand il s'agit de parler d'immigration. C’est ici que la marine italienne a débarqué depuis janvier 20.000 personnes sauvées en pleine mer. Le centre de cette petite ville de 33.000 habitants, est loin du port.
Derrière les façades vertes d'une ancienne école vivent 150 mineurs arrivés sans adultes en Italie. Salvatore fait la visite : " Vous voyez, ils sont 10 ou 12 par chambre. Ici, c’était une école, donc ils sont dans les salles de classe. On leur apprend l’italien et la propreté ."
"Nous vivons l'enfer ", Yacou, 17 ans
A l’étage, une salle, fermée par un cadenas, dans laquelle s’empilent des cartons. "Ici, c’est tout ce qui est vêtements, produits d’hygiène personnelle, on leur donne un peu de tout. La première fois, on a acheté 300 pantalons, 500 slips. C’est la Caritas qui paye, ou alors on achète avec notre propre argent ", poursuite le bénévole.
Salvatore est un des 20 bénévoles des paroisses qui épaulent les quelques employés communaux qui s’occupent de ces mineurs, comme Yacou. Il a 17 ans. Il est parti en novembre dernier de Côte d’Ivoire, arrivé depuis 3 jours en Sicile. Il a payé entre 600 et 700 euros pour embarquer en Libye. "En Libye c’est le chaos. Enfants armés. le bateau a pris l’eau. Percé. Je ne conseille à personne le même chemin. Nous vivons l’enfer. "
Et après ? "En théorie, c’est la commune où arrive le mineur qui doit s’en occuper. Mais Augusta, mise sous tutelle de l’Etat, à cause de la mafia, n’arrive plus à gérer les 700 mineurs qui lui sont confiés , comme l’explique Francesco Puglisi, l’un des administrateurs judiciaires de la ville. Je l’ai croisé sur le port, venu assister à de nouveaux débarquements" . Il cherche désespérément des places dans toute l’Italie pour ces mineurs.
Plusieurs mois pour trouver une place d'accueil
"Les structures pour les mineurs sont maintenant toutes pleines. Ce sont de petites structures, de 10 ou 15 places. Donc on arrive à placer une ou deux personnes par jour, mais par exemple, on a eu un débarquement avec 250 mineurs, arrivés en un seul jour, et confiés à la commune. Il nous faut plus d’un mois pour trouver de la place pour 250 personnes ! Du coup, on a des mineurs qui sont chez nous depuis plusieurs mois. "
Une cinquantaine de jeunes ont été accueillis dans des familles, ici. Mais les autres sont assis en silence devant la télé, contraints à l’inactivité alors qu’ils ont travaillé pendant des mois pour payer les passeurs. Ils disent qu’ils s’ennuient, qu’ils veulent aller à l’école. Les bénévoles sont inquiets. Un tiers des jeunes partent, disparaissent dans la nature, et risquent de devenir la proie de la mafia ou de la prostitution.
"Ce n'est pas invasion "
Les associations et de plus en plus les préfectures même, ont le sentiment que la Sicile est laissée seule face à l’urgence humanitaire. Car pour les adultes, c’est la même chose. Les camps d’accueil temporaire sont pleins. Les délais pour les demandes d’asile atteignent un an. Santino Tornesi, responsable de Migrantes à Messine, salue les aides financières européennes apportées à Mare Nostrum, mais voudrait que l’Europe fasse pression sur l’Italie.
" Ces aides ne suffisent pas. L’Europe doit exiger des Etats Membres, que mis à part l’intervention économique, il y ait vraiment une intervention socio politique qui rende gérable cette situation particulière. Qui n’est pas une invasion ! " L’Italie n’est pas le pays qui accueille le plus de réfugiés en Europe. L’année dernière, c’est en Suède et en Allemagne que la protection a été accordée au plus grand nombre de demandeurs d’asile.
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