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À l'école de la scène de crime

Homicides, assassinats... Une fois l'alerte donnée, le ou les corps retrouvés, les enquêteurs entrent dans une phase essentielle de leurs investigations : le relevé des indices et la recherche de traces laissées par les auteurs. Un travail long et méthodique pour identifier et comprendre le déroulement des faits. Reportage avec les apprentis enquêteurs de la gendarmerie.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Lundi dernier, vers 7h du matin,
les services de gendarmerie du sud de la Seine-et-Marne sont prévenus par
téléphone d'un drame. Un quadruple homicide a eu lieu dans une ferme familiale
isolée du petit village de Diant. Une enfant de 4 ans fait partie des victimes.

On compte également un blessé, rescapé de la tuerie. C'est lui qui a prévenu les
gendarmes. Secours et enquêteurs arrivent sur place quelques minutes plus tard.
Le travail des secours terminé, les décès constatés, le secteur est bouclé et la
scène de crime peut être gelée. Le travail des enquêteurs et des experts de la
gendarmerie nationale commence.

Un exercice grandeur nature

En réalité, ce drame est un exercice
grandeur nature pour les officiers stagiaires de la police judiciaire de la
gendarmerie nationale. Leur dernière épreuve avant d'être lâchés sur le terrain
et de pouvoir, à leur tour, mener des investigations. "Le scénario, c'est un
vol d'engrais agricoles en vue de fabriquer des explosifs qui tourne mal. Les
stagiaires ne savent rien de ce qu'ils vont découvrir et doivent réagir selon
nos procédures criminelles. C'est une vraie scène de crime. Des ossements ont
même été cachés dans la zone. Tous nos moyens sont réquisitionnés pour cet
exercice
, explique Thierry Lezeau, capitaine-formateur au Centre national de
formation de police judiciaire de la gendarmerie.

"Des conditions réelles pour mettre en situation et stresser nos élèves qui seront bientôt confrontés à l'insupportable "

Les pompiers, la
sécurité civile, des médecins légistes, des experts de l'IRCGN (l'Institut de
Recherche Criminelle de la Gendarmerie Nationale, basé à Rosny-sous-Bois) jouent
le jeu également. "Ce sont des conditions réelles pour mettre en situation et
stresser nos élèves qui seront bientôt confrontés à
l'insupportable
", explique le capitaine.

Aux quatre coins de la ferme, les
jeunes enquêteurs, équipés de combinaisons intégrales et de masques, communiquent
beaucoup. Ils délimitent par équipe des périmètres autour des corps. Ils ne
touchent pas aux corps avant l'arrivée des médecins légistes mais se concentrent
sur les zones à ratisser.

"On redonne la parole aux corps"

Début d'un travail d'équipe fastidieux et méthodique
où chaque centimètre carré est étudié, ratissé, discuté. Chaque objet, chaque
indice simple repéré est aussitôt signalé par des triangles jaunes numérotés
posé au sol. Ces indices seront placés sous scellés plastiques, numérotés et
informatisés. Mais seulement après que la scène de crime ait été photographiée
sous toutes les coutures, voire modélisée en trois dimensions grâce aux outils laser
de l'IRCGN. Le laser utilisé dernièrement par les gendarmes en Haute-Savoie pour
figer la scène de crime de la tuerie de Chevaline.

"On redonne la parole aux corps ", explique une gendarme stagiaire. "Les procédures sont toujours les mêmes. On
les répète. Notre obsession, c'est de ne rien oublier. Quand on ne sait pas faire
techniquement, qu'un aspect devient trop scientifique, on fait appel à nos
spécialistes
", ajoute-t-elle.

Des procédés scientifiques dignes des "Experts"

La scène de crime est aujourd'hui devenue high-tech à l'image
de la série américaine "Les Experts". Gendarmerie et police françaises ont
pris pied dans le 21e siècle en utilisant des procédés scientifiques le
plus souvent communs, validés par la plupart des polices occidentales qui
échangent entre elles informations et données.

Exploitation des traces ADN
organiques ou synthétiques, micro-analyse, marquage chimique, nanotechnologie,
téléphonie, sont désormais des fondamentaux pour envisager une scène de crime.
Sur le terrain, les gendarmes stagiaires savent désormais lire l'invisible. Un
téléphone retrouvé sur une scène peut ainsi parler d'au mois 5 façons
(empreintes, ADN, téléphonie, origines du matériel, etc.).

Modélisée par
ordinateur, une projection de sang sur un mur peut aider à déterminer l'arme
utilisée et la position des corps au moment des faits. Une aide scientifique que
les enquêteurs stagiaires ont désormais toujours en tête pour relever les
indices à exploiter en labo.

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