Tentative d'assassinat contre Robert Fico : quel est le profil de Juraj Chintula, suspecté d'avoir voulu tuer le Premier ministre slovaque ?
Celui qui a tiré à quatre reprises, mercredi 15 mai, sur le Premier ministre slovaque est un écrivain et poète de 71 ans dont l'histoire dessine le profil d'un homme de gauche aux tentations contradictoires. Cofondateur d'un club littéraire baptisé "Arc-en-ciel", Juraj Chintula lance en 2016 hnutie Proti nasiliu, un mouvement politique et citoyen "contre la violence" dans la société, sous toutes ses formes.
Quelques années plus tard, on le dit pourtant associé à un groupe paramilitaire, selon les révélations d'un journaliste d'investigation hongrois et propriétaire d'une arme à feu, acquise de manière légale a confirmé son fils aux enquêteurs. Juraj Chintula la portait quand il travaillait comme chauffeur pour améliorer sa retraite.
Une vidéo circule depuis mercredi sur les réseaux sociaux. Il y apparaît filmé en gros plan, le visage légèrement tuméfié.
Derrière la caméra, un homme lui demande d'expliquer son geste, il répond : "je ne suis pas d'accord avec la politique du gouvernement. Les médias sont liquidés. Pourquoi la radio télévision slovaque est-elle attaquée ? Pourquoi le juge Mazak (ancien président du conseil de la magistrature) est-il licencié ?" Des propos qui font écho aux articles très critiques vis-à-vis du gouvernement qu'il publie sur son blog.
Un gouvernement qui muselle les institutions et les médias
Avec la réforme de la télévision et l'éviction d'un juge, Juraj Chintula fait référence à deux dossiers à la une de l'actualité qui polarisent la société.
Un projet de loi très contesté veut placer l'audiovisuel public sous la tutelle du politique pour en faire un organe de propagande. Une ultime mesure d'un gouvernement populiste qui depuis six mois tente de museler les institutions et les médias, exactement sur le modèle de ce qu'a fait Viktor Orban en Hongrie, dont le dirigeant slovaque est idéologiquement très proche. Dans les tuyaux, il y a aussi la réforme qui assouplit les peines pour corruption et supprime le bureau du procureur spécial qui depuis 20 ans travaille sur ces sujets.
Ce texte est une telle menace pour l'État de droit que Bruxelles envisage même des sanctions financières contre la Slovaquie. Rappelons que c'est à la suite de l'assassinat d'un journaliste d'investigation, Yan Kuciak, que Robert Fico avait dû démissionner en 2018. Dans son enquête, Yan Kuciak mettait en évidence les liens entre la mafia italienne et le gouvernement.
Consternation internationale
Malgré les dérives du gouvernement Fico, l'attaque dont il a fait l'objet a créé la sidération, en Slovaquie et dans le monde. "Rien ne peut jamais justifier une telle violence", dit le président du Conseil européen Charles Michel. La plupart des dirigeants occidentaux se sont dits profondément choqués par cet événement décrit comme "ignoble", "odieux" ou "consternant".
Tous rappellent que les arguments politiques font partie de la démocratie et pas les tentatives d'assassinat. Mais en Slovaquie, parmi les appels au calme, on entend les plus proches alliés politiques de Robert Fico déjà rejeter la faute de l'attaque sur l'opposition libérale et les médias. Le vice-premier ministre Andrej Danko parle d'une "guerre politique" à venir. La Slovaquie entre en territoire inconnu.
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