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Semaine de travail de quatre jours : la Belgique y pense sérieusement

La semaine de quatre jours de travail, beaucoup de salariés en rêvent mais peu de pays l'appliquent. La Belgique, elle, y pense sérieusement.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
La Grand Place à Bruxelles (Belgique). (OLIVIER HOSLET / EPA via MAXPPP)

Travailler quatre jours au lieu de cinq en gardant le même salaire. Dit comme ça, c'est assez séduisant. Sauf qu'il ne s'agit pas du tout de travailler moins mais d'être plus efficace.

C'est ce que propose sérieusement le gouvernement belge : concentrer sur quatre jours tout ce que l'on fait habituellement en cinq. Sur un temps plein, pour un contrat de 40 heures, par exemple, il s'agirait de travailler 10 heures par jour du lundi au jeudi et... zéro le vendredi. C'est la principale mesure d'un ambitieux projet de réforme du travail mis sur la table en début de semaine, qui doit encore être voté par le parlement.

La coalition d'Alexander de Croo veut tirer les enseignements de la crise du Covid, donner aux salariés plus de souplesse, plus de flexibilité pour concilier leur vie privée et leur vie professionnelle "notamment pour les familles en co-parentalité". Le cinquième jour doit permettre de s'occuper de ses enfants, de prendre des rendez-vous médicaux, de se reposer...

Le gouvernement veut aussi accélérer le retour à l'emploi des personnes licenciées et imposer un "droit à la déconnexion", avec obligation de négocier un accord dans les entreprises de plus de 20 salariés : plus de coups de fils plus de mail en-dehors des horaires de travail. Au final, l'objectif est de faire encore remonter le taux d'emploi pour atteindre 80% d'ici à 2030.

Les syndicats opposés à la mesure

Sauf que l'idée de la semaine de quatre jours ne plaît pas du tout aux syndicats. Pour le Parti des Travailleurs Belges (PTB) c'est juste une "grande opération de communication pour étendre le travail de nuit sans contrôle, pour normaliser la journée de 10 heures et (au passage) mettre hors-jeu les organisations syndicales."


Globalement le projet a reçu un accueil très mitigé des partis et syndicats de gauche. Le président de la FGTB, Thierry Bodson, parle au micro de la RTBF d'un "coup de couteau assassin" : "Sur le terrain, les journées de 10 heures ne sont pas possibles pour un certain nombre de métiers. Cela veut aussi dire des garderies et des écoles accessibles 12 heures par jour. C’est augmenter le risque d’accidents du travail", dit le leader du syndicat socialiste. "Le symbole est très lourd pour nous."

D'autres expérimentations en Europe

Pourtant, ailleurs, ça se passe plutôt bien ! La semaine de quatre jours est en test dans près de 200 entreprises en Espagne. L'expérimentation va durer trois ans ; mais là, la réduction du temps de travail implique parfois une réduction de salaire.

Le Royaume-Uni s'y essaie aussi. "4 Day Week Global", l'organisme à but non lucratif porteur du projet, s'appuie sur le modèle "100/80/100" : travailler à 100% de ses capacités pour 80% de temps de travail tout en percevant 100% de son salaire. Même chose en Suisse où de plus en plus de sociétés sont désormais fermées le vendredi. Argument : "Ce n’est pas au bureau que les bonnes idées surgissent, mais quand on se promène ou que l'on visite un musée” explique Aurelia Zihlmann, la directrice artistique de A + O, spécialiste du design graphique, pour "Le courrier des expats". En Allemagne, c'est tout le secteur de la métallurgie qui a validé la semaine de quatre jours pour sauver 300 000 emplois menacés par la crise sanitaire... 

En France, bien que quelques PME tentent l'expérience, ne rêvez pas : ce n'est pas dans les tuyaux... Même si plusieurs candidats à la présidentielle ont fait de la réduction du temps de travail un argument de campagne : 28 heures pour Philippe Poutou, 32 heures pour Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon. À droite en revanche, le slogan "travailler plus pour gagner plus" est toujours d'actualité.

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