Sectes : ce que l'on sait des 98 personnes retrouvées mortes dans une forêt kenyane
C’est un petit morceau de forêt, 300 hectares, pas très loin de l’Océan Indien. Dans cette forêt au Kenya désormais délimitée par des rubans jaunes, on ne passe plus. Enfin, si, quelques personnes passent : des médecins légistes, des policiers, qui s’y enfoncent, qui coupent les arbustes, les buissons qui leur barrent la route, et, qui, à l’aide de pioches, fouillent la terre rouge. Les recherches ont commencé vendredi 21 avril. Et depuis, des corps, encore des corps. Un peu plus chaque jour. Surtout des enfants.
Paul Mackenzie, chef charismatique, fondateur de sa propre église
L'homme qui dirigeait cette communauté s'appelle Paul Mackenzie. Un "pasteur", qui poussait ses fidèles à jeûner, pour rencontrer Jésus. Son métier à la base était pourtant chauffeur de taxi. Et puis effectivement, il a créé l'"Église internationale de Bonne Nouvelle", il y a 20 ans et ouvert une chaîne YouTube sur laquelle il diffusait ses ordres, très variés, à plusieurs milliers de fidèles. Les perruques ? L’œuvre du démon. La scolarisation des enfants ? Pas question. Et de préciser : "L'éducation n’est pas reconnue par la Bible".
Dans le journal kenyan, The Nation , un père cherche désespérément sa femme et leurs cinq enfants. "Je crains le pire, explique-t-il. Ma femme a changé, quand elle a commencé à suivre les prêches de ce Pasteur sur son écran". Elle a fini par le suivre, dans la forêt. Ces jours-ci, dans le bush, les enquêteurs trouvent aussi, encore, des vivants, affamés, qui ne veulent pas être secourus. "Dieu nous attend, disent certains, laissez-nous tranquilles." Un vieil homme, le grand-père d’enfants disparus demande : "Pourquoi le gouvernement ne peut-il pas nous protéger des sectes ?"
Un pays profondément religieux où les petites églises "indépendantes" se multiplient sans contrôle
Le gouvernement de Nairobi parle aujourd'hui de 4 000 églises différentes, de pasteurs autoproclamés, souvent sans formation religieuse, qui séduisent des populations rurales et pauvres : tel homme incite ses ouailles à donner beaucoup d'argent, tel autre leur demande de ne surtout pas mettre les pieds dans un hôpital...
Le Conseil national des églises du Kenya a bien tenté de proposer une surveillance de ces églises indépendantes, mais elles ont refusé. Et ce n’est pas allé plus loin. Paul Mackenzie, lui-même, avait été repéré. Arrêté plusieurs fois et plusieurs fois libéré.
Les autorités kenyanes, critiquées, promettent désormais, une réglementation plus stricte. En attendant, Paul Mackenzie, est en détention. Et pour protester contre ce qui lui arrive, il a entamé... une grève de la faim.
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