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L'Espagne, de nouveau en première ligne face à l'épidémie de coronavirus

En quelques jours, l'Espagne est redevenue le pays européen le plus touché par le coronavirus.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Un infirmier prend la température d'un homme dans un centre de test au coronavirus temporaire installé à Madrid où la situation sanitaire est de nouveau critique. (OSCAR DEL POZO / AFP)

Les chiffres sont éloquents : entre 8 et 9 000 nouveaux cas de contamination au coronavirus chaque jour. L'Espagne compte plus de 534 000 cas, avec un "taux d'incidence" de 106 personnes contaminées pour 100 000 habitants, deux fois plus qu'en France. Madrid, la capitale, est redevenue l'épicentre de l'épidémie : on y enregistre quasiment un tiers des nouveaux cas répertoriés.  

L'hôpital des pandémies n'est pas encore prêt  

En ville, les cabinets des médecins généralistes, les premiers à poser les diagnostics, sont pleins à craquer et dans les hôpitaux, les malades du Covid occupent de plus en plus de lits. Plusieurs établissements d'ailleurs ont décidé de reporter, une fois de plus, les opérations non urgentes or certaines sont en suspens depuis le mois de mars. Près de l'aéroport un nouvel hôpital est en cours de construction. Un complexe gigantesque qui a déjà son surnom : "l'hôpital des pandémies". Il pourra accueillir 1 000 patients en cas de crise sanitaire. Les bétonneuses tournent à plein régime, mais il ne sortira pas de terre avant le mois de novembre, trop tard pour faire face à cette deuxième vague qui toutefois touche des patients plus jeunes et est moins mortelle qu'au printemps.  

Des médecins de ville épuisés  

Depuis la "première vague" qui est passée sur le pays, les médecins n'ont pas vraiment eu le temps de souffler. Ce n'est pas un problème d'équipement : les structures de santé ne manquent ni de masques, ni de gants, ni de respirateurs mais d'hommes et femmes ! À tel point que le syndicat des médecins de la communauté de Madrid, Amyts, menace de faire grève. Il demande des embauches et une limitation du nombre de patients : 30 par jour maximum, et pas jusqu'à 60 comme aujourd'hui.   

Un collectif de soignants envisage lui de porter plainte contre le gouvernement régional - compétent en matière de santé. D'autres ont écrit une lettre ouverte, demandant aux autorités régionales d'agir pour "éviter un nouvel effondrement du système". En Espagne les professionnels de santé ont été bien plus qu'ailleurs en Europe  touchés par le coronavirus, jusqu'à 20% des malades.

Les politiques d'austérité pointées du doigt

Face au rebond de l'épidémie, l'Espagne paie sa longue politique d'austérité en matière de santé. C'est en tout cas l'une des explications possibles. Les centres de santé, qui ont subi d'importantes coupes budgétaires, ne sont pas capables aujourd'hui de traiter rapidement les cas positifs. Il peut se passer trois, quatre jours avant qu'on demande à quelqu'un avec qui il a été en contact, ça n'aide pas à endiguer l'épidémie.  

Un autre facteur entre en ligne de compte : la politique. Dans ce pays décentralisé, les tensions sont fréquentes entre le pouvoir central et les 17 communautés autonomes, qui ont d'abord eu du mal à accepter et à appliquer les règles sanitaires imposées par Madrid. Depuis la fin de l'état d'urgence, ce sont elles qui ont repris en main la gestion de l'épidémie, mais, pressées de relancer l’activité économique, la plupart on fait "à leur sauce", en prenant des décisions sans se coordonner sur le port du masque, la fermeture des discothèques...   La plupart des régions n’ont pas hésité à recourir à de nouveaux confinements (parfois très localisés, à l'échelle d'un quartier par exemple), pour contenir les nouveaux foyers. Cela n'a pas fait fléchir la courbe des contaminations, pas plus que le port du masque, obligatoire dès le mois de mai dans les lieux publics clos, et depuis la fin août, dans les salles de classe et les cours de récré dès l'âge de 6 ans.

La culture de la fête et des rassemblements entre amis, notamment l'été, chez les jeunes, est un autre facteur identifié de reprise de l'épidémie.  

Le Premier ministre Pedro Sanchez "préoccupé"  

Les Espagnols, qui n'hésitent pas à parler de "traumatisme" pour évoquer l'épidémie (30 000 morts, et l'un des confinements les plus drastiques et les plus longs de toute l'Union européenne), sont aujourd'hui inquiets du rebond qui se dessine. Certains parents d'ailleurs ne veulent plus envoyer leurs enfants à l'école, faute de garanties sanitaires suffisantes. Le droit à la santé, disent-ils, prime sur le droit à l'éducation. Un comportement qui, sur le papier, est sanctionné par des amendes et des peines de prison. En juin, le Premier ministre Pedro Sanchez assurait, triomphant, que le virus avait été "vaincu". Aujourd'hui, il se dit "préoccupé".

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