Hydrocarbures : ce que traduit la chute des bénéfices du géant pétrolier Aramco
Moins connu que Total ou Shell, Aramco est pourtant le premier producteur de pétrole au monde. L’entreprise, détenue à 90% par l’État saoudien, a subi donc un revers commercial, entre avril et juin 2023, avec une forte baisse de son bénéfice net : moins 38%. À première vue, pas de quoi pleurer sur son sort. Le bénéfice total engrangé l'an dernier a atteint 150 milliards d'euros – soit environ un tiers du budget de l’État français. Bref, chez Aramco, la disette n'est pas pour tout de suite. Pourquoi en parler ? Ces résultats en baisse dessinent, en creux, plusieurs enseignements. D’abord, pour expliquer ces chiffres, il faut regarder du côté de la Chine. Un quart du pétrole saoudien exporté part en direction de Pékin. Or, l'économie chinoise traverse une mauvaise passe. Le chômage des jeunes est au plus haut, les ménages dépensent moins, les entreprises n'arrivent pas à écouler leurs stocks. Dit autrement, quand la Chine fait du sur place, elle consomme moins d'essence. Et cela se lit dans les résultats d'Aramco.
Dans ces mauvais résultats, on peut aussi discerner un avertissement aux pays producteurs de pétrole. Certes, Aramco connaîtra sans doute des jours meilleurs, car le cours du pétrole fluctue. Mais justement, cette fluctuation entraîne des incertitudes : la rente pétrolière devient de moins en moins sûre, de moins en moins garantie. D’une part, parce que d'autres pays se mettent à augmenter leur propre production de pétrole – l’exemple le plus récent, c’est l’annonce par le gouvernement britannique d’une centaine de permis d’exploitation de gisements d’hydrocarbures en mer du Nord.
L'Arabie saoudite diversifie son économie
Plus de producteurs de pétrole donc, mais moins de clients à terme. Car d’autre part, la consommation d’énergie fossile est découragée. En Europe, la vente de voitures thermiques neuves (essence et diesel) sera interdite à partir de 2040. Là, les réglementations vont devenir de plus en plus strictes, pour lutter contre l'effet de serre. Les revenus du pétrole sont donc à terme moins garantis. C'est pour cela que l'Arabie saoudite veut diversifier ses revenus. Fini l'époque où le pays se contentait de gérer l'immense manne des réserves de brut. L'Arabie saoudite anticipe la fin du pétrole.
Elle mise sur d'autres secteurs économiques. Le royaume tente à tout prix de devenir une destination touristique à la mode – il restaure ses sites archéologiques. Il investit aussi dans son image, avec des centaines de millions de dollars pour attirer les plus grands footballeurs dans les clubs saoudiens. D'ailleurs Canal+ vient d'acheter les droits télévisés du championnat saoudien. Pour le pays, la passion du football est sans doute une source de revenus plus inépuisable que les puits de pétrole.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.