Guérilla en Colombie : après la libération du père du footballeur Luis Diaz, la pays espère remettre le processus de paix sur les rails

Une bonne nouvelle pour Luis Diaz, le joueur colombien de Liverpool : son père, enlevé il y a 14 jours en Colombie par la guérilla de l'ELN, a été libéré jeudi 9 novembre.
Article rédigé par franceinfo, Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Luis Manuel Diaz avait été kidnappé à Barrancas, la Guajira, Colombie, le 31 octobre 2023. Après des négociations de paix avec le gouvernement colombien, l'ELN l'a libéré jeudi 9 novembre. (ESTEBAN VANEGAS HANDOUT / MAXPPP)

Certes Luis Diaz, le joueur de Liverpool, a essuyé une défaite, 3 buts à 2, jeudi 9 novembre, face aux Toulousains en Ligue Europa, mais ça n'empêche pas l'aillier colombien d'être sur un petit nuage. Quelques heures seulement avant la rencontre, il a appris la libération de son père, enlevé le 28 octobre en Colombie, dans une station-service, par la guérilla de l'ELN, Armée de libération nationale. 

Une libération qui fait la "une"

Cette libération a d'ailleurs fait la "une" des médias colombiens, comme la chaîne de télévision RTVC, qui a suivi en direct l'arrivée de Luis Manuel Diaz en hélicoptère dans la ville de Valledupar, dans le nord du pays, puis son transfert en voiture jusque chez lui, à Barrancas, près de la frontière avec le Venezuela.

Celui qu'on appelle "Mané", 56 ans, entraîneur d'un club de football amateur, a été libéré grâce au travail de la commission humanitaire de l'Église et de l'ONU, qui supervise les négociations entre la guérilla et le gouvernement.

Attendu à son arrivée chez lui par une foule de sympathisants brandissant tambours et trompettes, Luis Manuel Diaz est apparu émacié et affaibli, mais en bonne santé. Il a passé "quatre jours à marcher lorsqu'ils l'ont retenu et deux jours alors qu'ils allaient le remettre", a déclaré aux médias Monseigneur Francisco Ceballos, membre du groupe qui l'a accueilli.

Déploiement de militaires

"Mané" a en quelques mots remercié tous ceux qui l'avaient soutenu pendant cette épreuve. Son épouse, Cilenis Marulanda, enlevée en même temps que lui par des hommes armés circulant à moto, avait été relâchée quelques heures seulement après l'attaque.


Des forces spéciales avaient été déployées pour rechercher M. Díaz dans la région de La Guajira, une chaîne de montagnes située à cheval sur les deux pays. Avant de retirer ses militaires, à la demande de l'ELN, pour faciliter la libération. La police avait également offert une récompense de 48 000 dollars pour toute information permettant de le retrouver.

Quelque 245 kidnappings depuis le début de l'année

Cet enlèvement a mis en danger le processus de paix, parce qu'il a rompu la "confiance", selon les mots du chef de l'État, qui s'était installée entre les autorités colombiennes et les guérilleros. Cela fait plus d'un an que les deux parties négocient la paix ; un cessez-le-feu est même en vigueur depuis le 3 août. Frêle espoir dans un conflit qui dure depuis 60 ans et a tué au moins 450 000 personnes.

Depuis qu'en 2016 les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie) ont commencé à déposer les armes (à l'exception d'une faction d'environ 3 500 hommes qui a fait dissidence), L'ELN est la dernière armée de guérilla du pays et n'a jamais cessé les enlèvements. C'est ce qui lui permet de se financer grâce aux rançons, en plus de l'argent du narco trafic.

Qulque 245 kidnappings ont été recensés entre janvier et septembre. Selon des sources officielles, une trentaine de personnes sont toujours entre les mains des combattants guévaristes.

Mais faire ce "coup" avec le père d'un joueur membre de l'élite du football mondial, "était une erreur", a admis Antonio Garcia, le commandant militaire de l'ELN. La délégation chargée des négociations avec la faction a déclaré dans un communiqué que l'enlèvement "n'aurait jamais dû se produire".

Le monde du football salue la bonne nouvelle

La Fédération colombienne de football, l'une des organisations sportives les plus importantes du pays, a remercié "le gouvernement, les forces armées et la police nationale, ainsi que toutes les institutions et les fonctionnaires qui ont rendu possible la libération de Luis Manuel Díaz".

Jurgen Klopp, l'entraîneur de Liverpool, s'est lui aussi félicité. Luis Diaz, 26 ans, l'un des joueurs les plus talentueux de l'équipe nationale de Colombie, qui n'avait pas été retenu pour le match précédent, au lendemain de l'enlèvement de ses parents, a d'ailleurs pu annoncer sa titularisation après l'annonce de la libération de son père.

Gustavo Petro, premier président colombien de gauche et lui-même ancien guérillero, s'est engagé à délaisser la méthode militariste de son prédécesseur pour désarmer "par le dialogue" les derniers rebelles : dissidence des FARC, ELN, groupes paramilitaires et criminels. Cette libération va peut-être remettre le processus de paix sur les rails.

Après la libération du père de M. Díaz, la délégation gouvernementale chargée des pourparlers de paix a exigé dans une déclaration que l'ELN libère immédiatement toutes les personnes qu'elle "détient encore en captivité" et mette fin à sa pratique des enlèvements. "Il est insoutenable de soutenir, d'un point de vue éthique, que le commerce d'êtres humains est légal, même dans les conditions d'un conflit armé".

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