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Funérailles d'Idriss Déby : pourquoi Emmanuel Macron se rend aux obsèques du président tchadien

Le président français est arrivé au Tchad, vendredi 23 avril, pour assister aux obsèques du président Déby. Le pays est un allié précieux pour la France dans le combat contre les groupes djihadistes terroristes.

Article rédigé par franceinfo, Elise Delève
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Idriss Déby, président tchadien reçu à l'Elysée par Emmanuel Macron, président de la République française, le 12 novembre 2019. (LUDOVIC MARIN / AFP)

Si Idriss Déby père a dirigé le Tchad d'une main de fer pendant 30 ans, son fils, Mahamat Idriss Déby semble suivre le même chemin. Après la mort du président mardi 20 avril sur la zone de combats dans le nord-ouest du pays, il s'est tout de suite arrogé les pleins pouvoirs. Il a dissous l'Assemblée nationale et le gouvernement. Il est devenu président de la République, chef de l’État et chef suprême des armées.

Mahamat Idriss Déby, 37 ans, était jusque-là le patron de la Direction générale des services de sécurité des institutions, très puissante au Tchad. Il s’occupait notamment de la garde rapprochée de son père et coordonnait ses déplacements. Militaire de carrière, comme son père, il n'a cependant pas d'expérience gouvernementale et restait jusqu’à présent plutôt discret. Dès l’annonce de la mort du président, il a mis en place un Conseil militaire de transition, composés de 15 de ses fidèles généraux. Ils jurent que la période de transition ne durera que 18 mois et que des élections "libres et démocratiques" seront organisés.

Emmanuel Macron assistera aux obsèques

Alors que la France est en pleine troisième vague de la pandémie du Covid, pourquoi Emmanuel Macron se rend sur place ? Le président français ne peut pas vraiment faire autrement. Le Tchad est au cœur de la lutte contre le djihadisme au Sahel. C'est le pilier du G5 Sahel, cette force conjointe anti-terroriste qui regroupe en plus du Tchad, la Mauritanie, le Burkina Faso, le Niger, le Mali et les militaires français de l'opération Barkhane. Le Tchad,le plus gros contingent africain, a récemment envoyé 1 200 soldats. Ses militaires, très aguerris, sont les mieux formés, ils ont l'habitude du terrain de guerre. Ils ont déjà combattu au Soudan, en Centrafrique et au Mali.

Le QG du G5 Sahel se trouve d'ailleurs au Tchad, dans la capitale N'Djaména. Pour la France, ce pays est la pièce maîtresse de sa stratégie contre le terrorisme. À l’annonce de la mort du président Déby, Paris a tout de suite réagi en parlant d’un "ami courageux" de la France. Même s’il réclame une transition "pacifique", Emmanuel Macron vient en quelque sorte adouber le fils de son allié de 30 ans, en dépit de toutes réserves sur la manière dont Mahamat Idriss Déby a pris le pouvoir par intérim. La France ne veut surtout pas que le Tchad soit déstabilisé, il faut assurer une continuité car si la situation s'envenime à l'intérieur du Tchad, le nouveau président pourrait rappeler ses troupes déployées au Sahel et c'est toute la force du G5 qui serait déséquilibrée.

Idriss Déby a besoin de la France

Si Mahamat Idriss Déby s’investit au Sahel, le fils d'Idriss Déby attend en retour un fort soutien français. Si la situation intérieure se dégrade, il aura besoin de la France. Elle pourra venir à son secours si les rebelles s'approchent trop près de la capitale. Paris l'a déjà fait à de multiples reprises pour aider son père, la dernière opération datant de 2019 : deux mirages français ont bombardé une colonne de rebelles venus de Lybie et qui prenaient la direction de la capitale N'Djaména.

Niveau géographique, le Tchad est encerclé de foyers de tension : Lybie, Soudan, Centrafrique, Nigeria, Niger. Mahamat Idriss Déby veut s'assurer que la France sera là si besoin. La venue d'Emmanuel Macron lui prouve que oui. En revanche, l'opposition, muselée dans le pays, ne voit pas d'un bon œil le déplacement du président français. "Monsieur Macron doit respecter notre Constitution", dénonce un opposant rencontré par notre correspondante sur place. Plusieurs partis d'opposition ont dénoncé la prise de pouvoir du fils du président défunt. Ils estiment que c'est "un coup d'État institutionnel". Ils rejettent "catégoriquement" la transition militaire et demandent l'instauration d'un "gouvernement dirigé par des civils". La France réclame un "processus démocratique". Avec Idriss Déby père, elle a longtemps fermé les yeux sur ces sujets et Idriss Déby fils le sait.

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