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Climat, diplomatie : ça chauffe en Arctique

Le Conseil pour l'Arctique qui se tient en Islande réunit les huit pays riverains de cette région du cercle polaire. Au cœur des discussions : la montée des températures. Sur le plan climatique autant que diplomatique.

Article rédigé par franceinfo, Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Un pan du glacier Apusiajik au Groenland s'effondre à cause du rechauffement climatique, le 17 août 2019. Photo d'illustration. (JONATHAN NACKSTRAND / AFP)

Si les participants jettent un oeil au thermomètre jeudi 20 mai, ils verront que sur le littoral russe il va faire plus de 30°C ! Là où, en cette saison, il ne fait pas plus de 10 d'habitude. 
En Arctique, territoire immense, grand comme 20 fois la France, les températures augmentent beaucoup plus que sur le reste de la planète. Selon un rapport du Programme de surveillance et d'évaluation de l'Arctique (AMAP) publié ce jeudi 20 mai, entre 1971 et 2019, l'Arctique s'est même réchauffée trois fois plus vite. Bien plus que ce qu'on croyait jusqu'à présent.


L’été, la banquise fond comme du beurre au soleil : les experts prédisent sa disparition en 2040. La calotte glaciaire ne se porte pas mieux. C'est une menace pour les ours polaires et la biodiversité, pour les quatre millions d'habitants qui voient leur mode de vie bouleversé, sans compter les incendies de forêts, désormais la norme en Sibérie.
Bref, on est au beau milieu d'un film catastrophe. C'est ce dont vont parler les chefs de la diplomatie des huit pays qui composent le Conseil de l'Arctique : Russie, États-Unis, Canada, Islande, Danemark, Suède, Finlande, Norvège. Tous ont promis de coopérer sur ce sujet.

L'Arctique, un gros gâteau dont chacun veut une part

Mais la coopération semble difficile, tant ce territoire est l'objet de convoitises. Vu sous un certain angle, le réchauffement climatique est une excellente opportunité.

La fonte des glaces a ouvert une nouvelle route maritime qui permet, – l'été – de relier l’Asie à l’Europe par le nord, ce qui est beaucoup plus rapide que par le canal de Suez. Le trafic de fret pourrait être multiplié par quatre d’ici cinq ans, les enjeux commerciaux sont énormes.
Le réchauffement rend aussi plus accessibles les gisements d'hydrocarbures. Et les réserves sur terre comme en mer sont considérables : il y a beaucoup de pétrole en mer de Barents, ailleurs on cherche du gaz naturel, mais aussi de l'uranium...
La Russie, qui possède 20 000 kilomètres de littoral fait tout pour étendre ses droits d’exploitation. Elle n’est pas la seule. Le Canada, le Danemark, la Norvège sont sur la même ligne.

Le Groenland lui est au centre de l'intérêt des compagnies minières. Même la Chine, pourtant très loin du Cercle Polaire, revendique d’être un pays "quasi Arctique". Bref, ça se bouscule au portillon. Les questions climatiques vont-elles réussir à dominer les questions géopolitiques ? L'Arctique apparaît surtout comme un gros gâteau dont tout le monde veut une belle part.

Tensions Russie - États-Unis

Cela crée quelques tensions, notamment entre la Russie et les États-Unis : c'était hier la première rencontre officielle entre leurs chefs de la diplomatie, dans un contexte quelque peu tendu. Les relations entre les deux pays sont presque au même niveau qu’à l’époque de la guerre froide. 

Le tour de chauffe du Conseil avait donné lieu à quelques passes d'armes, le Russe Sergueï Lavrov martelant que l'Arctique était de plein droit une zone d'influence "légitime" pour Moscou. Ces dernières années, la Russie a multiplié les réouvertures d'anciennes bases militaires abandonnées après la période soviétique.

Pendant deux heures d'entrevue, l'échange est finalement resté courtois. L'expérimenté Lavrov a même salué des discussions "constructives". Les deux puissances "comprennent la nécessité de mettre fin au climat malsain" des "dernières années". Malgré les "divergences" nombreuses, "notre vision est que si les dirigeants de la Russie et des États-Unis peuvent travailler en coopérant" face aux défis communs, "le monde sera plus sûr", a déclaré de son côté Antony Blinken au début de la réunion. 

Car il s'agissait aussi d'avancer sur la tenue d'un prochain sommet Biden-Poutine, envisagé dans un pays européen, peut-être en juin. Pas d'avancée claire sur ce dossier mais s'"il n'y a pas eu de percée, nous avons préparé le terrain de manière efficace", a dit un haut responsable américain. Sur ce plan-là au moins, la température est – un peu – redescendue.

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