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Afghanistan : les troupes américaines quitteront le pays avant le 11 septembre

Les Etats-Unis vont retirer leurs derniers soldats d'Afghanistan. Au plus tard le 11 septembre 2021. C'est la fin de la plus longue guerre de l'histoire américaine.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Des soldats américains en poste à Jalalabad, dans l'Est de l'Afghanistan.Photo d'illustration.

 (MANJUNATH KIRAN / AFP)

Un retrait "total" et "sans conditions" pour enfin sortir du bourbier dans lequel les États-Unis pataugent depuis 20 ans. Officiellement, 2 500 à 3 000 "boys" sont encore déployés dans le pays. Bye bye ! Ils rentrent à la maison ou seront déployés ailleurs en Asie du Sud. C'est la fin du plus long conflit de l'histoire américaine.

La guerre qui a lassé l'Amérique

Washington acte le fait qu'il n'y a pas de solution militaire en Afghanistan, qu'il est temps surtout de mettre un terme à cette guerre sans fin de l'autre bout du monde, menée au nom de la lutte contre le terrorisme. Une guerre qui fatigue l'Amérique et a tué plus de 2 400 de ses soldats. Une guerre qui est aussi un gouffre financier, son coût est estimé à plus de 1 000 milliards de dollars aux États-Unis. Une guerre qui a chassé les Taliban du pouvoir mais ne les a pas empêchés de poursuivre leurs attaques et assassinats ciblés contre les civils.

Pour le symbole, ce retrait sera effectif au plus tard le 11 septembre 2021, pour l'anniversaire des attentats de 2001 commis par Al-Qaida contre le Pentagone et les tours jumelles de New York. Après cette date, il ne restera plus sur place qu'un tout petit contingent dédié à la protection de l'ambassade des États-Unis à Kaboul.

Au plus fort de leur présence, en 2010-2011, quelque 100 000 militaires américains étaient déployés en Afghanistan. L'ex-président Barack Obama avait ramené ces effectifs à 8 400 hommes, puis son successeur Donald Trump avait poursuivi le retrait.

"Abdication du leadership américain ?"

Les Américains s'en vont... ça veut dire que les Taliban ont le champ libre. C'est ce que dénoncent certains élus – des deux bords d'ailleurs – pour lesquels ce départ est "prématuré". "Cela revient à battre en retraite face à un ennemi qui n'a pas été vaincu", dit le chef des républicains au Sénat. Mitch McConnell parle même d'une "abdication du leadership américain".

Sans le soutien militaire de Washington, les autorités de Kaboul vont en effet avoir beaucoup de mal à contenir l'insurrection des Taliban qui ambitionnent de revenir au pouvoir pour imposer leur fondamentalisme religieux comme ils l'avaient fait entre 1996 et 2001. Des Taliban qui n'ont jamais cessé leurs attaques malgré l'accord historique conclu en janvier 2020 par l'administration Trump.

Un accord qui prévoyait même un départ des troupes américaines dès le 1er mai 2021 (en échange de garanties sécuritaires, de l'ouverture de négociations directes entre les insurgés et les autorités de Kaboul, mais aussi d'un engagement à ne plus attaquer les intérêts américains et à rompre tout lien avec Al-Qaida).

Joe Biden avait déjà dit qu'"il serait dur de tenir l'échéance du 1er mai pour des raisons stratégiques". Les Américains vont finalement rester quatre mois de plus. Cela ne plaît pas du tout aux Taliban, qui menacent de ne pas participer à la prochaine rencontre pour la paix prévue du 24 avril au 4 mai à Istanbul sous l'égide de l'ONU. "Tant que toutes les forces étrangères n'auront pas achevé leur retrait de notre pays, nous ne participerons à aucune conférence censée prendre des décisions sur l'Afghanistan", a tweeté un porte-parole des talibans au Qatar, Mohammad Naeem. Le processus est de toute façon au point mort.

Mais les Etats-Unis font au plus vite, ils n’ont rien à gagner à jouer les prolongations: les services de renseignement viennent de publier un rapport selon lequel à court terme la signature de la paix est improbable.  

Risque de guerre civile

Mais le risque, c'est qu'après ce retrait le pays bascule dans le chaos de la guerre civile : les héritiers du commandant Massoud, figure de la résistance il y a plus de 20 ans, tiennent aujourd'hui des postes clés au sein du gouvernement. Ils menacent de reprendre les armes pour ne pas laisser les Taliban confisquer de nouveau l’avenir de 35 millions d’Afghans.

Comme les Américains, l'Otan a fortement réduit sa présence et compte environ 7 000 soldats sur place. Le retrait se fera pour tout le monde de manière coordonnée, notamment pour les Allemands et les Britanniques, qui sont les plus gros contributeurs de l'Alliance atlantique en Afghanistan.

Toute modification de la présence du Royaume-Uni se fera "en accord avec les alliés et après consultation avec nos partenaires" indique le gouvernement britannique qui compte encore 750 soldats sur place. Même chose pour les Allemands, malgré le fait qu'ils viennent de voter l’extension de leur mandat jusqu’en 2022. Tous devraient aligner leur calendrier sur celui de Washington.

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