À New York, les sans-abri déséquilibrés dans le viseur de la mairie démocrate
À New York, aux Etats-Unis, il y a trop de malades mentaux dans les rues : la ville veut les interner, de gré ou de force.
Depuis le début de l'année, il y a déjà eu neuf homicides dans le métro de New York. Un homme qui en pousse un autre sur les rails, un individu qui distribue des coups de couteau aux passagers. La plupart de ces actes sont commis par des déséquilibrés, car dans les stations les sans-abri en détresse psychiatrique sont de plus en plus nombreux et les New-Yorkais de moins en moins rassurés.
"Arrêter de fermer les yeux"
Fin novembre, dans une directive adressée aux forces de l'ordre, qui comptent désormais 1 200 heures supplémentaires dans les transports en commun, le maire démocrate Eric Adams annonce que les personnes atteintes de maladie mentale seront identifiées par la police, prises en charge et internées. Qu'elles le veuillent ou non. Lui-même ancien policier, il parle d'une "obligation morale". "Le métro n'est pas un endroit" pour celles et ceux qui ont besoin d'être soignés, dit-il. Nous allons "arrêter de fermer les yeux" et de les laisser à la rue, alors qu'ils représentent un danger - pour eux-mêmes ou pour les autres.
NYC Mayor Eric Adams's terrible plan to forcibly hospitalize homeless people with mental illness https://t.co/bhZEqKYzZa
— Salon (@Salon) December 13, 2022
Pourtant son initiative crée la polémique. Eric Adams fait face à des réactions négatives, de la part d'avocats spécialisés dans les droits civils et de défenseurs des sans-abri. Ils s'interrogent sur le respect des libertés individuelles et pointent le fait que cette mesure ne règle pas le fond du problème : le sous-financement chronique de la santé mentale.
Ces dernières décennies, l'Etat de New-York a fermé la plupart des établissements spécialisés ; même en pleine pandémie de Covid, les cliniques privées ont supprimé leurs unités psychiatriques. Medicaid, l'assurance maladie, a baissé les remboursements de prise en charge des patients psychotiques. Sans compter que se loger est devenu un luxe.
Une affaire politique
Les urgentistes notamment estiment que le plan du maire ne propose aucune solution à long terme et qu'il est voué à l'échec. Selon eux, il risque aussi de tendre un peu plus les rapports avec la police.
Happening now! We are sending a message to Eric Adams that public safety is not the involuntary commitment of New Yorkers living with mental illness. Public safety is investment in the programs & services that the most vulnerable New Yorkers deserve. #CareNotCuts pic.twitter.com/9iZBznzm5w
— New York Communities for Change (@nychange) December 7, 2022
Il faut dire que cette décision est aussi une affaire politique : aux élections de mi-mandat, les démocrates, souvent accusés de laxisme en matière d'ordre public, ont perdu quatre sièges dans l'Etat de New York. S'ils veulent remonter la pente, ils doivent donner des gages.
Faire disparaître de l'espace public les SDF susceptibles de pousser des passagers sur les rails ou de leur donner un coup de couteau mortel répond à une attente sécuritaire. Mais cela n'aura quasiment aucun impact sur les statistiques globales de la criminalité. Et la mesure de la municipalité est encore très floue. Un sans-abri interrogé par le New York Times à Penn station, la plus fréquentée de la ville, pose cette question : "qui va décider celui qui est malade mental et celui qui ne l'est pas : la police, vraiment ?" La mairie n'a pas répondu.
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