Le monde de Marie. La confession d’un travailleur humanitaire d'Oxfam
Tous les jours, Marie Colmant revient sur un sujet passé (presque) inaperçu. Vendredi, le témoignage d'un humanitaire pas trop rassurant sur ce qui se passe dans des ONG.
Depuis le scandale déclenché par les dénonciations de prostitution à l’encontre de l’ONG Oxfam, certains travailleurs humanitaires réagissent. Et pas toujours comme on se l’imagine. "Les travailleurs humanitaires ne sont pas des Saints, je le sais, j’en étais un et j’ai fait n’importe quoi." C’est sur ces mots que débute l’étrange confession d’un travailleur humanitaire australien publiée hier dans le quotidien britannique The independent. Il s’appelle Andrew MacLeod et il n’est pas tout à fait n’importe qui dans l’humanitaire puisqu’il a publié en 2013 un livre souvenir de ses vingt ans sur le terrain, où il dénonçait déjà les dérives inquiétantes de certains travailleurs.
Que raconte donc Andrew MacLeod ? D’abord qu’il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Dans l’humanitaire, il y a une foule de gens formidables et une poignée de sales types. Il explique ensuite que les humanitaires sont multiples, il y a le spécialiste du développement, la spécialiste des inondations qui prévient qu’il faut se méfier des serpents qui remontent à la surface en cas de crues subites, et il y a aussi les accros à l’adrénaline, ceux qui aiment quand ça barde. Andrew MacLeod appartient plutôt à la catégorie des idéalistes et sa spécialité c’est la gestion des catastrophes.
Un milieu où rien n'est simple
Il y a vingt ans, il était au Rwanda, après le génocide, pour aider à rebâtir. Le pays est encore tendu et la Croix Rouge qui l’emploie impose des règles très strictes à ses employés : couvre-feu, interdiction de partir où que ce soit sans avoir averti quelqu’un et surtout, surtout, interdiction formelle de porter des armes. Du coup le soir, explique Andrew MacLeod, soit on reste dans sa chambre, soit on fait la fête. Et lui, il parle de beaucoup de picole, beaucoup de sexe aussi. Jusqu’au jour où il franchit la ligne rouge, il part avant le lever du soleil, armé jusqu’aux dents, sans le dire à personne pour aller voir une forêt infestée de milices hutus, avec un attaché militaire américain. J’ai eu de la chance, il ne s’est rien passé, mais voilà le genre de décision imbécile qu’on prend quand on travaille dans de tels contextes, dit-il. Alors non, conclut-il, rien n’est simple, raison de plus pour avoir l’œil.
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