"Réussir un film, c'est un miracle" : Vincent Perez sort son sixième long métrage
Vincent Perez est comédien, photographe, réalisateur vaudois. C'est par la photo que son œil a observé le monde et qu'il a réussi à figer des émotions avant de les livrer finalement sur scène puis sur grand écran. C'est en 1990 qu'il s'est imposé au niveau international avec le rôle de Christian de Neuvillette dans Cyrano de Bergerac de Jean-Paul Rappeneau. Deux ans plus tard, Indochine de Régis Wargnier sort et le public et la critique sont conquis. Ils l'adoptent, l'adulent avec le prix Jean Gabin pour parfaire le tout. Des films comme Le Bossu de Philippe de Broca (1997), La Reine Margot de Patrice Chéreau (1994), Ceux qui m'aiment prendront le train de Patrice Chéreau (1998) suivront. Wargnier, Antonioni, Ruiz, Kurys, il a joué pour les plus grands réalisateurs en alternant films d'auteur et longs métrages.
Mercredi 27 décembre 2023, il est à l'affiche de son propre film, Une affaire d'honneur, avec Roschdy Zem, Doria Tillier et Guillaume Gallienne. Nous sommes en 1887 et malgré une interdiction des duels, ceux-ci restent une affaire de sang et d'honneur. Il nous raconte l'histoire de Marie-Rose Astié de Valsayre qui s'est battue à l'épée pour l'égalité des salaires, pour le droit des femmes, pour l'évolution des femmes tout simplement.
franceinfo : Ce film n'est-il pas d'abord l'histoire de l'évolution des femmes ?
Vincent Perez : Oui, c'est vrai que c'était vraiment étonnant de découvrir cette figure importante de cette fin du XIXᵉ siècle qui a défrayé la chronique et qui faisait beaucoup parler d'elle parce qu'elle avait des revendications qui étaient incroyablement en avance sur son temps. Petit à petit, elle a trouvé sa place dans cette histoire. L'égalité des salaires, le droit de vote, des trucs hallucinants pour l'époque. Et puis le droit de porter le pantalon qui était interdit aux femmes depuis une loi de 1800, qui interdisait aux femmes de se travestir en hommes. Si elles le faisaient, il fallait qu'elles demandent l'autorisation au préfet. C'était une situation incroyable.
"Marie-Rose Astié de Valsayre s'est notamment battue une grande partie de sa vie pour que les femmes aient droit de porter le pantalon, une loi oubliée puis proscrite en 2013."
Vincent Perezà franceinfo
Qu'est-ce qu'avoir de l'honneur pour vous ?
Je pense que c'est une relation très intime avec soi-même, en fait. C'est où l'on situe soi-même son honneur. L'estime de soi-même. Où situons-nous notre propre dignité. Je pense qu'il y a un peu de cette idée.
Il y a une forme de justesse dans tout ce que vous pouvez faire et dans tout ce que vous avez toujours fait. Là, dans ce film, on ne vous a jamais autant découvert, en tout cas, avoir autant découvert ce que vous étiez, ce qui vous touchait.
Je pense qu'on passe par des périodes. J'ai traversé une période de remise en question où il fallait que justement, je retourne vers une exigence qui était en moi, je vous parle d'il y a une quinzaine d'années, et il a fallu que je me reconstruise. Et c'est vrai qu'en me reconstruisant, je suis passé par la photographie, je suis retourné vers ce que je voulais être, qui je voulais être.
"Ce film est un peu une sorte d'accomplissement de là où je souhaite me situer et continuer à créer une œuvre en tant que réalisateur."
Vincent Perezà franceinfo
Si on devait raconter qui vous êtes aujourd'hui avec votre parcours, que diriez-vous ?
Je pense que je suis la somme de toutes les expériences que j'ai vécues en travaillant avec des réalisateurs incroyables. J'ai eu la chance de travailler avec Antonioni, Ettore Scola, Patrice Chéreau et puis tant d'autres. Avec des acteurs incroyables, que ce soit chez les Anglo-Saxons ou en France. Je suis aujourd'hui à ma place en faisant ce film. Je suis un laborieux, j'aime le travail, j'aime la recherche. J'ai découvert cela avec ce film. En fait, j'adore me plonger, des mois et des mois, dans les recherches pour créer une sorte de bulle, un monde dans lequel je rentre. Et puis à un moment donné, cette bulle est tellement pleine, qu'il y a une histoire qui sort. C'est un peu ce que je faisais quand j'étais enfant. Je passais mon temps dans le dessin, la peinture. C'était ma manière à moi de créer mon petit monde en tant qu'enfant. Et c'est vrai que finalement, aujourd'hui, je fais un peu la même chose.
On sent qu'une page se tourne avec ce film, que vous avez enfin trouvé le bon chemin. Vous imaginez déjà la suite ?
Absolument. C'est ma passion, c'est ce que j'aime faire. J'aime le travail, j'aime l'écriture. J'ai découvert une passion pour l'écriture et c'est vrai qu'il y a quelque chose qui s'est ouvert dans ma vie, qui m'a permis de faire ce film et je travaille sur la suite, bien évidemment. Et je suis toujours acteur. Donc je joue aussi dans des films. Certains vont sortir bientôt notamment Boléro d'Anne Fontaine. J'ai été heureux de travailler avec elle, avec Raphaël Personnaz, Jeanne Balibar et Emmanuelle Devos.
"J'aime le métier d'acteur, c'est un métier magique de donner vie à des mots, d'aller chercher l'âme d'un personnage et de vivre avec. C'est très beau."
Vincent Perezà franceinfo
Je pense qu'être réalisateur ça m'a aussi permis d'aimer encore plus le métier d'acteur.
Que vous procure le cinéma ?
Le cinéma me procure tout, beaucoup de choses dans ma vie. Je vis avec le cinéma. Le cinéma est un métier extrêmement difficile, il faut se battre, ce sont des combats. Réussir un film, c'est un miracle. Ce que j'aime dans ce métier, ce sont ceux qui sont justement à la recherche de ce miracle.
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