Le rappeur Médine imagine "des cours de sens critique" pour enseigner la liberté d’expression
Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd'hui, le rappeur Médine pour son nouvel album : "Grand Médine".
Grand Médine est le nouvel album très personnel de Médine, tourné notamment vers la famille, un thème qui lui est cher. Ses grands-parents émigrent d’Algérie pour aider à la reconstruction du Havre alors que son père n’a que quatre ans. Adulte, ce dernier travaille dans une société d’emballage et son épouse française est mère au foyer puis assistante maternelle. Une histoire familiale riche de cultures qui lui a inculqué de fortes valeurs et des outils pour construire sa vie comme il l’explique à Elodie Suigo : "Je me souviens de belles discussions avec mon père, dans les périodes les plus complexes comme l’adolescence. Il m’a donné pas mal de sens critique et je suis très content de ça".
La musique comme échappatoire
Il confie que la musique a été son salut : "Elle m'a sauvé dans le sens où, adolescent dans un quartier dans les années 90, j'étais en proie à pas mal de trucs. Avoir une occupation aussi importante que la musique, ça nous faisait sortir et voyager du quartier. Donc, ça m'a préservé de pleins de trucs".
Dans ce nouvel album, il va plus loin que dans les précédents, il se livre un peu plus, peut-être fend-il un peu l'armure ? "Je pense que tout le monde a besoin d’une carapace aujourd’hui. Ce n’est pas pour rien que c’est un album des plus intimes, je me révèle, je parle de mes failles. Mais quand, en réalité, je me sens un peu agressé par pas mal de choses dans le débat public, forcément il me faut une carapace sinon ce n’est pas vivable".
La lutte contre les amalgames
Il revient sur ce qui le dérange dans ce débat public et les difficultés rencontrées parce qu’il est musulman : "Tout ce qui est critique sans même avoir pris le temps d’écouter mes albums ou même entendu une de mes paroles. Voilà, ce que je représente, le simple fait que je m’appelle Médine, que je sois musulman, tout ce qui est dans mon ADN en fait, déjà de facto, ça me disqualifie." Lorsqu'Elodie Suigo évoque l’assassinat du professeur Samuel Paty pour avoir voulu enseigner la liberté d’expression, Médine condamne fermement cet acte barbare.
Je me sens beaucoup plus proche, moi personnellement, de ce prof d’histoire que de l’assassin. Quand bien même certains seront tentés de faire des amalgames. Pourtant je suis musulman.
Médineà franceinfo
Et il poursuit en expliquant que si ses enfants avaient été dans sa classe, "à aucun moment, je ne leur aurais demandé de détourner le regard pour un dessin, pour une caricature". Selon lui, il faudrait même des cours de caricatures : "Des cours de sens critique plutôt ! C'est ça qui serait beaucoup plus agréable parce qu’on irait tellement loin dans ces cours, on se permettrait tellement d’aller titiller la ligne pour pouvoir à la fin du cours recentrer les choses et que chacun rentre dans son milieu culturel avec ces outils-là qui nous permettent de relativiser sur nos propres quotidiens".
Médine pratique sa religion à sa manière. Il explique dans sa chanson God Complex s’être éloigné des mosquées pour se rapprocher de l’essentiel, de Dieu. Une liberté qui lui est constamment reprochée, menacé de mort autant par l’ultra-droite que Daech : "Parmi les attaques que je subis au quotidien, il y a tout un tas de personnes qui se revendiquent religieux justement et qui sont très virulents sur mon mode de vie. Donc, ils se permettent de me juger sur la façon d’éduquer mes enfants, sur la façon de se vêtir de mon épouse, sur tout et n’importe quoi... Donc je me permets de les critiquer avec virulence parce que c’est une réponse à la hauteur des attaques qui me sont faites".
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