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Le monde d'Elodie. Stephan Eicher : "Le déconfinement, c'est une chanson à faire !"

Le chanteur suisse installé en Camargue se projette vers l'avenir avec ses "Homeless songs"

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Stephan Eicher, chanteur suisse, au Printemps de Bourges, festival de musique, en avril 2015. (GUILLAUME SOUVANT / AFP)

Elodie Suigo : Stephan Eicher, que représente pour vous le déconfinement ? Le déconfinement, c’est une chanson à faire ! La vie doit reprendre, pour beaucoup de gens qui ont besoin d’un revenu, tout bêtement. Même si j’adore avoir un ciel sans avions, qu'il y ait de la place pour les oiseaux et que les voitures qui m’ont toujours énervé ne roulent pas, c’est vital de pouvoir gagner sa vie ! 

Avez-vous vécu ce confinement comme un retour à l’essentiel ? 

Je suis resté en Camargue pendant le confinement. Quand ça a commencé, j’étais en tournée. On était en train de prendre le bus pour monter à Paris pour faire l’Olympia et on a dû s’arrêter, ce qui a été assez douloureux pour nous, les musiciens. Je ne vous cache pas que c’est un choc qui a duré longtemps. Après, j’ai décidé de rester là, en Camargue, où j’ai mon studio. Il y a toujours des phases où je ne sors pas, quand je crée. J’espérais que ce serait une phase comme ça, mais je n’ai pas eu envie de créer. Le confinement, c’est comme si on n’avait plus de futur. Bien entendu, on a toujours un futur, mais pour le moment, on n’a pas de futur, pas de rendez-vous, pas de projection. La musique, c’est pour plus tard… 

Votre dernier album s’appelle Homeless songs, C’est un album avec un côté fait maison. Avez-vous davantage apprécié ce dernier album Stephan Eicher ? 

Oui et ça a vraiment relancé un lien avec mon public, parce que j’étais en tournée avec ce nouvel album et je peux vous dire, même si ça sonne maintenant comme une anecdote inventée, que les trois-quatre derniers concerts avant l’arrêt, j’ai senti quelque chose de très apaisant, comme un sentiment amoureux, une légèreté qui m’a envahi juste à ce moment-là et ensuite, il y a eu cette saloperie qui est arrivée (rires) ! Mais il y a une raison à tout à la fin. Il faut seulement attendre que la lumière revienne. 

Beaucoup de fans vous ont suivi pendant cette période particulière et puis il y a eu ce concert dans une cuisine et on a appris que vous cuisiniez ! 

Les musiciens ne savent pas cuisiner, parce qu’on est toujours en tournée, on mange toujours après un concert dans le dernier restaurant à être encore ouvert. Je me disais "Je vais me ridiculiser à faire la cuisine et des petits concerts à travers Internet dans ma cuisine". À partir de 17 heures, je quitte le studio et je vais en cuisine, hachant de pauvres légumes que je cuis trop longtemps… (extrait de la chanson Déjeuner en paix). 

On sent que ça a été une période d’introspection pour vous ce moment suspendu, avec une pensée assez émue pour le personnel soignant… 

Oui, je passe beaucoup de temps ici en France, je paye mes impôts en France, cela veut dire que j’ai un lien avec votre société, que j’ai une grande tendresse pour elle. On était aussi en tournée au moment des Gilets jaunes sur les ronds-points. Je trouve assez marrant que maintenant ce soit ces gens là qu’on applaudit. Les  gens qui travaillent dans les hôpitaux, ceux qui conduisent des camions, ceux qui sont derrière les caisses, tous ces gens qu’on a regardé comme des fouteurs de merde, tout à coup, c’est eux qu’on applaudit ! Alors maintenant, j’espère vraiment que quand tout sera fini, ces gens recevront la noblesse qui leur appartient et la noblesse, c’est quelque chose qui se traduit très facilement : c’est 500 ou 600 € de plus ! 

Comment ça se passe en Suisse, Stephan Eicher, pour les artistes alors qu’en France, les intermittents du spectacle ont été rassurés par les déclarations du président Macron ? 

En Suisse il n’y a pas le régime des intermittents du spectacle comme en France. Ça donne une autre ambiance et j’ai beaucoup d’amis français pour qui ce régime va être la seule façon de survivre. En Suisse, les musiciens sont dans la merde, mais l’État a promis de les soutenir. 

Vous êtes inquiet ? 

Pire qu’inquiet, je suis paniqué. Notamment pour mes techniciens et mes musiciens. Pour moi, un peu moins, parce que j’ai des revenus de mes compositions. Si vous passez une chanson de moi après cette interview je recevrai 40 ou 50 centimes et si vous faites ça beaucoup et bien je vais survivre. Mais, retourner dans le monde avant, je n’en ai pas très envie. Je trouve que le ciel est beau sans les avions mais je suis peut-être un romantique… 

Comment imaginez-vous ce monde d’après ? 

Ça m’a toujours énervé les amis qui disaient  "Allez, on prend un avion à 28 € pour aller de Berlin à Barcelone boire une bière". Je crois qu’il y a des choses à changer. C’est un moment où on pourrait repenser les choses. Parce que je remarque que les plantes changent dans les champs et dans les jardins, que les truites, dans une rivière que je connais bien en Suisse, ne sont plus là. Et là, on a un grand problème et on ne peut pas rester à la maison à se cacher derrière Netflix sur un sofa ! On doit changer un peu les valeurs. Ce serait le moment, je trouve. Moi je suis prêt. 

Avec cette vidéo à regarder sur Internet, vidéo de Prisonnière et puis votre dernier album Homeless songs, toujours disponible. Au plaisir Stephan Eicher, merci beaucoup ! 

Bye bye ! Courage !            

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