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Cinéma : "En étant acteur, tu traverses des vies entières en très peu de temps", assure Clovis Cornillac

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, le comédien et réalisateur, Clovis Cornillac. Ce mercredi 8 février 2023, il est à l'affiche du film "Les têtes givrées" de Stéphane Cazes.
Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
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L'acteur Clovis Cornillac, en 2021, au Festival du film francophone d'Angoulême. (YOHAN BONNET / AFP)

Clovis Cornillac est acteur et réalisateur. Il a très vite marché dans les traces de ses parents. Son père, Roger Cornillac est metteur en scène et sa mère, Myriam Boyer, est une actrice incontournable du cinéma français, avec laquelle il a fait ses débuts à la télévision, il avait 13 ans à l'époque. Le cinéma est lui aussi devenu une cour de récréation. Il a commencé comme délinquant en 1985 dans le film Hors-la-loi de Robin Davis. Depuis, il y a eu Karnaval de Thomas Vincent (1998) ou Mensonges et trahisons et plus si affinités... de Laurent Tirard, qui lui a valu de décrocher le César du meilleur acteur dans un second rôle. Impossible de ne pas citer Un long dimanche de fiançailles (2004) ou de saluer son incarnation d'Astérix dans Astérix aux Jeux olympiques aux côtés de Gérard Depardieu en 2008. Ce mercredi 8 février 2023, Clovis Cornillac est à l'affiche du film Les têtes givrées de Stéphane Cazes. Il joue un prof d'une classe de Segpa (Section d'enseignement général et professionnel adapté) dans un collège au pied du Mont Blanc.

franceinfo : Vous incarnez un professeur qui s'intéresse à l'humain, à son environnement et notamment à la préservation des glaciers. On vous sent très investi dans ce rôle.

Clovis Cornillac : Je suis très heureux effectivement du travail de Stéphane Cazes, le réalisateur, parce que je trouve qu'il avait un projet de film qui était ténu avec pour héros, une classe de Segpa qui parle de transition écologique, de réchauffement climatique. Quand tu ne connais pas la personne, tu as l'impression que c'est quelqu'un qui aurait pu mettre tous ces sujets-là en se disant : "Voilà, je vais monter mon film parce que je prends des sujets d'actualité". Et il s'avère que Stéphane est quelqu'un d'extrêmement impliqué dans tous ces sujets-là depuis des années. Et la manière qu'il a de traiter ces sujets, ça, c'est vraiment la force du film, il les rend lumineux. Il a une manière de dire : "Il faut croire en ses rêves". C'est un mantra qui est sujet à critiques, à être ridiculisé en permanence. De toutes façons, maintenant, dès qu'on est positif et que tu crois en l'humanité et dans les gens, eh bien en général, tu es quand même pris pour un imbécile. Donc, on est quelques-uns dans cette situation. On a bien vu que le film sur le public, à travers toutes les projections en France, arrive à donner du jus aux gens après. Ce qu'on appelle des feel good depuis quelques années, c'est-à-dire des sujets sociétaux forts, délicats arrivent à ne pas être bête et touchent les gens. 

Ce prof, justement, va prendre soin des autres. C'est ce côté positif que vous décrivez, et qui est très important parce qu'il y a aussi un travail de transmission. C'est aussi ça être prof.

Une classe de Segpa pour ceux qui ne connaissent pas bien, ce sont des élèves qui ont du mal avec la scolarité et souvent avec eux-mêmes, de fait. Ce sont des gamins qui ne sont pas plus bêtes que les autres, c'est simplement que l'école n'est pas toujours faite pour tout le monde. La vie de gamins, de temps en temps, en dehors de l'école est suffisamment complexe pour qu'ils aient du mal à émerger d'eux-mêmes et ça peut créer des caractères qui sont, on va dire, agressifs parce que c'est une manière de se défendre, ou bien introvertis. Mais il y a un point commun qui est le manque de confiance en soi et qui est la dévalorisation de soi-même. Et la manière dont ce prof agit, tenait vraiment à cœur à Stéphane, un gars qui n'est pas prof, c'est-à-dire qu'il parle aussi de l'Education nationale parce qu'effectivement, elle manque de profs, que ce gars-là qui est un entraîneur de ski et qui c'est complètement isolé du monde, restant dans un drame personnel, va se retrouver à accepter le poste de prof de cette classe de Segpa.

Ce prof en redonnant du jus à ses élèves se redonne du jus. Il y a quelque chose de vertueux de toute façon à être dans une spirale positive.

Clovis Cornillac

à franceinfo

Les rêves des enfants vont bon train dans ce film, dès l'instant où ce prof leur redonne confiance en eux, ils ont tous des rêves. Vous rêviez à quoi, enfant ?

Je ne sais pas. À plein de choses, je pense. Ça doit être aussi pour ça que je suis devenu acteur. C'est-à-dire que souvent, quand on est gamin, on a envie d'être policier et puis un jour on a envie d'être voleur et donc, pendant toutes ces expériences que j'ai eu comme acteur, j'ai été ces gens-là. Finalement, c'est comme une expérience intime. Tu traverses des vies entières en très peu de temps et tu te les appropries. C'est comme si tu constituais une bibliothèque de points de vue, de sentiments qui est finalement idéale quand tu es assez bon à rien, en vrai. J'aurais pu mener à bien aucun de mes rêves, à part celui d'être tout le monde.

Qu'est-ce que le cinéma vous a apporté du coup ? Est-ce que ça vous a permis justement de vous rendre compte que ce rêve d'enfant vous a permis de grandir, d'évoluer, de vous faire du bien aussi ?

En fait, je suis toujours impressionné de me dire que ça continue. Quel coup de bol ! Et puis la chose absolument folle qui m'est arrivé et que je n'avais absolument pas prévu, c'est la réalisation.

Après avoir fait acteur au cinéma et au théâtre, à un moment, je me suis octroyé le droit de faire un film et ce jour-là, j'ai été artiste.

Clovis Cornillac

à franceinfo

Est-ce que justement d'être réalisateur permet aussi de raconter vos histoires et donc de vous raconter vous-même en quelque sorte ?

Je ne sais pas si c'est dire plus de soi, mais ce qui est certain, c'est que la manière dont je fabrique du cinéma, c'est mon monde. Le cadre m'interroge, les costumes m'interrogent, la musique, le montage-son, c'est-à-dire que tout est une écriture et quand tu es impliqué dans toutes ces écritures-là, c'est fou parce que tu inventes ton monde comme un artiste et c'est fabuleux.

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