Législatives : le banquier d'affaires Matthieu Pigasse appelle "à voter Nouveau Front populaire pour éviter le retour de la bête immonde"
Le banquier d'affaires et patron de presse, Matthieu Pigasse, a appelé jeudi 20 juin sur franceinfo "à voter Nouveau Front populaire" aux prochaines législatives. juge l'hommes d'affaires. "Ce n'est pas deux extrêmes qui sont l'un en face de l'autre, selon lui. Il y a d'un côté un bloc de gauche uni et de l'autre, l'extrême droite".
Le patron des Inrockuptibles et de Radio Nova, notamment, considère "qu'il faut tout faire pour faire barrage au Rassemblement national", car "ce n'est rien d'autre que le retour de la bête immonde du siècle précédent, mais avec des nouveaux masques". Le patron du Medef, Patrick Martin, a jugé les programmes du RN et du Nouveau Front populaire "dangereux" pour l’économie : "Le Medef n'a jamais été ni courageux, ni réformiste et on voit qu'il ne change pas", a raillé Matthieu Pigasse. "Le sujet n'est pas économique. Le sujet pour les années et les décennies qui viennent, c'est un choix de société", selon Matthieu Pigasse.
franceinfo : Êtes-vous inquiet par l'arrivée possible du RN au pouvoir ?
Matthieu Pigasse : Oui, je suis inquiet, évidemment, du résultat possible des élections législatives. Nous sommes à un moment absolument clé. Je suis un homme de gauche, engagé et je considère qu'il faut tout faire pour faire barrage au Rassemblement national.
Le Medef dit que le RN et le Nouveau Front populaire sont dangereux pour l'économie. Êtes-vous d'accord avec cette position ?
Ce qui est bien avec le Medef, c'est qu'on n'est jamais déçu. Le Medef n'a jamais été ni courageux, ni réformiste. On voit qu'il ne change pas. J'aimerais savoir, au fond, le regard qu'il porte sur le bilan économique de la présidence d'Emmanuel Macron et de son ministre de l'Économie et des Finances. Ce bilan, ce sont1 000 milliards de dettes publiques supplémentaires sur les deux mandats, une dérive des finances publiques et un déficit budgétaire hors de contrôle, des mesures antisociales qui ont été prises. Il ne faut pas recevoir de leçon de politique économique ou de discipline financière de ces gens-là.
On ne peut pas mettre le RN et le Nouveau Front populaire dos à dos, sans choisir son camp, selon vous ?
Ce ne sont pas deux extrêmes qui sont l'un en face de l'autre. Il y a d'un côté en effet l'extrême droite et il y a de l'autre un bloc de gauche qui est réunifié, réorganisé et rééquilibré. Il a comme caractéristique de représenter l'ensemble des composantes ou des sensibilités de la gauche : la gauche de la gauche, la gauche communiste, les socialistes, les sociaux-démocrates, les écologistes. Il ne faut pas se tromper d'ennemi. Il y a d'un côté un bloc de gauche uni et il y a de l'autre effectivement l'extrême droite.
Ça veut dire que vous appelez clairement à voter Nouveau Front populaire ?
J'ai toujours eu un engagement clair et fort. J'appelle en effet à voter Nouveau Front populaire. Je considère qu'il faut tout faire pour faire barrage au Rassemblement national. Le Rassemblement national, ce n'est rien d'autre que le retour de la bête immonde du siècle précédent, mais avec de nouveaux masques. Enlevez leurs masques et vous verrez la même chose. Vous verrez la même haine, vous verrez le même rejet de l'autre, vous verrez le même repli sur soi, vous verrez la même société de la peur et de la défiance. Vous verrez la même société des coupables. Quand ça va mal, il faut toujours un coupable. Le coupable, c'est toujours l'autre et l'autre, c'est celui qui n'est pas comme vous ou pas comme nous. C'est l'immigré, l'étranger, l'homosexuel, le musulman ou la femme. Cette société emmurée que nous propose l'extrême droite nous amène précisément dans le mur.
Est-ce que vous estimez que le programme du Nouveau Front populaire est réaliste sur le plan économique au regard des déficits publics ?
Au risque de vous décevoir, je vous dirais que le sujet n'est pas économique. Le sujet pour les années et décennies qui viennent, c'est celui d'un choix de société et d'un choix de valeurs. Vous avez le choix aujourd'hui entre une société fermée et une société ouverte. La société fermée, c'est celle que veut le Rassemblement national, une société du repli sur soi, une société du rejet de l'autre, une société de bouc émissaire. C'est une société qui consiste à fermer les portes, les fenêtres, les frontières, les esprits, ou une société ouverte sur le monde et sur les autres. Dire que la reconnaissance de la différence, c'est une force, c'est une richesse, c'est ça fondamentalement le choix aujourd'hui qu'il faut faire.
Vous dîtes que "le sujet n'est pas économique", mais les Français qui font face à l'inflation au quotidien et qui n'arrivent pas à payer leurs factures, sont-ils prêts à entendre votre discours ?
Je viens de vous expliquer pourquoi il ne fallait pas voter Rassemblement national. Je peux vous expliquer maintenant pourquoi il faut voter Nouveau Front populaire. Le chaos, c'est la dislocation de la société, c'est l'arrêt de la croissance, c'est l'explosion des inégalités, ça fait des années que je dis que les inégalités sont une bombe placée au cœur de la société, qu'elles ont atteint un niveau qui est inacceptable et injustifiable.
Les agences de notations sont en embuscade. Le monde du business dit que la France n'a pas les moyens de dépenser plus. Il se trompe ?
Le monde du business pense ce qu'il veut. Le courage n'est pas la vertu la mieux partagée. En effet, il faut une nouvelle politique économique. C'est une nécessité absolue qui doit reposer sur trois piliers : plus de production évidemment, plus de distribution par la hausse, par exemple, du SMIC ou des salaires et plus de redistribution. C'est cet alliage-là qui permettra de lutter contre le chaos. J'entends, à la veille de chaque élection majeure, toujours le même spectre de la grande peur. Comme si les bolcheviques allaient revenir demain avec le couteau entre les dents. La réponse est non. Il n'y a pas de peur financière ou économique à avoir en cas de victoire du Nouveau Front populaire. C'est même l'inverse. L'expérience a montré que chaque fois que la gauche a été au pouvoir au cours des 30 dernières années, le taux de croissance a été plus élevé que dans les cas où elle n'était pas au pouvoir.
Pensez-vous que l'arrivée de la gauche au pouvoir pourrait remettre en question les investissements étrangers en France ?
Je ne le pense pas. Encore une fois, il y a un choix profond à faire de société et de politique économique. En cas de victoire du Nouveau Front populaire, il n'y a pas de grandes peurs à avoir ou de grandes craintes.
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