Réunion des chapelles et unification des énonomistes
Il se passe quelque chose d’exceptionnel aujourd’hui dans le petit monde des économistes, toutes les chapelles ont décidé de se réunir cet après-midi pour travailler ensemble. Faut-il croire au miracle ?
Au miracle, c’est un peu prématuré. Je ne peux même pas invoquer l’esprit du 11 janvier, et l’union nationale, car ce projet est en germes depuis plusieurs mois. Les économistes dont je vous parle, vous les connaissez tous, même si vous ne retenez pas toujours pas leur nom, vous les voyez s’affronter sur les plateaux de télévision, ou les entendez se disputer derrière un micro de radio. Et bien ces mêmes économistes ont décidé de se mettre autour d’une table, d’en finir avec les effets de manches et les polémiques stériles, de réfléchir enfin ensemble, et d’entamer aujourd’hui un grand débat qu’ils veulent poursuivre tout au long de l’année.
Dans ce groupe des dix, il y a ceux qui sont très à gauche du mouvement Attac ou ceux encore qui se font appeler les "économistes atterrés" et de l’autre côté, ceux qu’on classe volontiers parmi les plus libéraux, comme l’Institut de l’entreprise ou la Fondation Concorde, il y a des think tank, l’un plutôt classé à droite, l’Institut Montaigne, l’autre à gauche Terra Nova, et au milieu, le Cercle des économistes de Jean-Hervé Lorenzi. Croyez-moi, c’est une petite révolution, dans un tout petit milieu où il n’y a pas toujours eu que de l’amitié.
Mais pourquoi ces économistes décident-ils de débattre maintenant ?
Parce qu’il y a urgence, nous disent-ils. Il se passe aujourd’hui quelque chose dans l’économie mondiale, quelque chose qui rebat les cartes, et qui mérite de partager ensemble un nouveau diagnostic sur la marche du monde. La mondialisation est en train de changer de trajectoire. Quand il y a une crise, même grave, on pense généralement, qu’une fois qu’on l’a surmontée, on revient au monde d’avant. Et bien, ce n’est pas vrai, plus rien ne sera comme avant la crise de 2007-2008.
Nous entrons dans une grande phase d’incertitudes provoquée par des mouvements de fond : la croissance du commerce mondial ralentit dans un monde devenu multipolaire, le vieillissement démographique frappe tous les continents, les inégalités s’accroissent au point de pénaliser la croissance, la productivité ralentit en dépit de la révolution technologique que nous vivons, la crise environnementale va exiger de nouvelles mutations, bref, ce grand basculement commande de sortir, disent ces économistes, des discours qui nous enferment dans le court terme.
Ces économistes veulent aussi éclairer le débat public en France et en Europe ?
Oui, pour renouveler les approches, y compris sur l’Europe et la France, les économistes ont aussi invité des confrères étrangers. Tous pointent le risque très fort d’une croissance plate en Europe pendant la décennie qui vient. L’euro et la place de la monnaie unique seront au cœur des discussions, entre ceux qui veulent en sortir et ceux qui proposent au contraire des ajustements importants et qui refuse le déclinisme. Sur la France, les économistes vont tenter de se mettre d’accord sur la hiérarchie des réformes à entreprendre. Voilà, alors il n’est pas dit qu’il sorte de cette journée de débats un programme en bonne et due forme, mais des idées nouvelles, certainement.
Vincent Giret, du journal Le Monde.
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