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Mitsubishi : le coup de maître de Carlos Ghosn

Nouveau coup de théâtre dans le secteur automobile : Nissan, l’allié de Renault, met la main sur son rival japonais Mitsubishi, et c’est une sacrée victoire pour Carlos Ghosn.
Article rédigé par Vincent Giret
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)

Empêtré à Paris avec une histoire de salaire mirobolant qui reste en travers de la gorge de ses actionnaires et du Ministre Emmanuel Macron, Carlos Ghosn assure le spectacle sur la scène mondiale, avec un nouveau coup d’éclat : Nissan, l’entreprise que Ghosn avait sauvé lui-même du naufrage il y a quinze ans, et qui est aujourd’hui en pleine forme, met la main sur son concurrent Mitsubishi, le constructeur japonais de 4x4.

C’est un très joli coup, matérialisé par une prise de participation de 34% et par le choix, très prochain, d’un nouveau PDG pour Mitsubishi, par Carlos Ghosn qui pourra ainsi placer un homme de sa garde rapprochée.

Le paradoxe, c’est qu’il y a cinq ans, c’était l’autre grand groupe français PSA Peugeot Citroën qui avait travaillé sur un projet de mariage avec Mitsubishi, l’affaire avait capoté face à l’arrogance du constructeur japonais. Cette fois, c’est Nissan qui rafle la mise et la célèbre marque de 4 x 4 n’est plus aussi flamboyante. Elle vend encore un peu plus d’un million de véhicules par an, mais elle est en plein scandale, car on a découvert chez Mitsubishi une série de fraudes massives sur la consommation. C’était donc le très bon moment pour mettre la main sur le constructeur japonais.

Qu’est-ce que cela change pour l’alliance Renault-Nissan ?

Deux choses importantes. La première, c’est que dans l’automobile, il y a une course à la taille, à la puissance, c’est un marché totalement mondialisé. En s’emparant de Mitsubishi, l’alliance Renault-Nissan se rapproche donc des deux plus grands constructeurs mondiaux qui se disputent la première place, c’est à dire le japonais Toyota et l’allemand Volkswagen qui vendent chacun autour de 10 millions de véhicules par an.

La deuxième chose importante, c’est l’ascension, le poids de Nissan dans l’Alliance qui s’en trouve singulièrement renforcé : c’est vraiment une ironie de l’histoire : au départ, c’est Renault qui a sauvé Nissan du naufrage et aujourd’hui c’est Nissan, qui non seulement a pris le dessus sur Renault, mais accroit sa puissance en mettant la main sur un autre acteur japonais. Les rapports de force au sein de l’Alliance ont donc compétemment changé.

Est-ce que cet ensemble ne fragilise pas Renault qui reste un emblème national ?

C’est tout le contraire. Dans un secteur aussi mondialisé, vous ne tenez que si vous êtes capable de nouer des alliances et c’est exactement ce qu’a réussi Carlos Ghosn avec son groupe, en rapprochant Renault et Nissan d’abord, mais aussi en nouant des partenariats stratégiques avec le Russe Avtovaz, l’allemand Daimler ou le chinois Dongfeng. Et cette construction-là profite à Renault, qui seul, aurait déjà un genou à terre.

Mais cela a une conséquence, l’Etat français ne peut déjà plus faire la loi chez Renault, même avec des droits de vote double. La vérité toute crue, c’est que Renault appartient à un ensemble mondialisé, où les jeux de pouvoir sont très complexes, et où Carlos Ghosn règne en maître absolu, avec une grande habileté et un système de gouvernance totalement à sa main. C’est ce qui fait aujourd’hui sa force, mais c’est aussi ce qui risque de poser problème le jour où Carlos Ghosn se retirera.

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