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Le sursaut espagnol

L’Espagne bat tous les records de croissance et de création d’emplois alors qu’elle était au fond du trou il n’y a pas si longtemps. Elle vient de connaître un cinquième mois consécutif de baisse du chômage. Peut-on dire que le pays est enfin sorti de la crise ?
Article rédigé par Vincent Giret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)

 Son cas fait rêver… Certes, l’Espagne porte certes encore de nombreux stigmates de cette crise, mais elle est indéniablement, avec l’Irlande, le pays en forme de l’Europe. Ces deux pays ont d’ailleurs quelques points communs : ils avaient tous les deux été terrassés par la crise financière de 2008, leur système bancaire avait complètement implosé. L’un et l’autre ont consenti une austérité extrêmement sévère, ils ont accepté dans la douleur de changer les règles du marché du travail.

Et il faut le dire, même si c’est déplaisant à entendre, ces programmes d’austérité et de réformes ont manifestement payé puisque l’Irlande et l’Espagne affichent les deux meilleurs taux de croissance en Europe, désormais supérieurs à 3%, voilà qui permet de faire vraiment reculer le chômage. En Espagne, c’est le 5e mois consécutif de baisse, une baisse nette et franche. Chaque mois, depuis le début de l’année, l’Espagne redonne du travail à plus de 100.000 chômeurs. Tous les secteurs en profitent : le tourisme, mais aussi la construction qui avait été quasi anéantie et même l’industrie parce que l’Espagne est redevenue compétitive, attractive. Elle reprend des parts de marché, y compris d’ailleurs parfois à la France.

Ce n’est pas seulement le chômage qui va mieux en Espagne, c’est tout le pays qui est en train de changer.

L’Espagne a bien conscience de vivre un moment historique, une sorte de "moment-charnière". C’est un autre pays qui se dessine, sept ans après le début de la crise. En Espagne, trois crises se sont conjuguées : une crise sociale (dont le pays n’est d’ailleurs pas encore sorti, le taux de chômage reste élevé, supérieur à 20%), une crise territoriale avec des revendications d’autonomie qui demeurent très fortes, une crise morale et politique tant le fléau de la corruption a éclaboussé toutes les institutions et les partis traditionnels.

Il y a dans ce pays désormais une énergie nouvelle, on le voit dans les indicateurs économiques, mais aussi une soif de changement, de renouvellement, une volonté d’électrochoc qui a fait émerger sur la scène de nouvelles générations, de nouvelles têtes, de nouvelles forces politiques. A gauche mais aussi au centre, une refondation est à l’œuvre et on pourra en mesurer l’ampleur lors des élections régionales de la rentrée, puis en décembre lors des législatives.

Pourquoi ce sursaut espagnol ne s’est-il pas produit également en Grèce ?

C’est vrai, ces deux pays n’ont pas le même destin, alors qu’ils sont sortis de la dictature l’un et l’autre à peu près au même moment au milieu des années 70. Si on regarde sur la longue durée, les trente glorieuses qui ont suivi pour la Grèce ont été une période assez exceptionnelle tant la Grèce a connu d’épisodes troublés, tant elle a souffert tout au long de son histoire d’une absence d’Etat et d’une authentique culture politique sur lesquelles fonder vraiment les piliers d’une prospérité partagée.

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