Le décryptage éco. Huawei privé de Google : quelles conséquences pour le marché français ?
Sur fond de guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, Google va cesser de fournir son système d'exploitation à Huawei. À quoi faut-il s’attendre sur le marché français ? Le décryptage de Fanny Guinochet ("L'Opinion").
Google suspend ses relations commerciales avec le constructeur chinois Huawei. C'est un ordre de Washington : Donald Trump estime que cet acteur incontournable des télécoms menace la sécurité nationale et la vie privée de ses utilisateurs en raison de ses liens étroits avec le gouvernement chinois, des accusations que le groupe rejette. Et on ne voit pas comment le consommateur français ne serait pas impacté. Parce que très concrètement, c’est tout l’univers Google qui va disparaître des smartphones Huawei. Si vous achetez un téléphone Huawei, vous ne pourrez plus utiliser Google Maps, YouTube, Gmail. Autant dire qu’en France, comme ailleurs dans le monde, les ventes de téléphone Huawei risquent de chuter. On estime que quatre millions de Français ont un Huawei aujourd’hui. C’est 20% des parts de marché de la téléphonie dans l’Hexagone, ça veut dire un téléphone vendu en France sur cinq.
Les dirigeants de Huawei, pourtant, se veulent rassurants. Ils minimisent et essaient de ne pas rajouter à l’inquiétude des consommateurs. Ils ont trois mois pour se retourner : trois mois, c’est le délai que leur a donné Donald Trump pour organiser la séparation avec Google.
Un "plan B" et des doutes
Le géant chinois dit qu’il a un plan B, qu'il est prêt à proposer son propre système d'exploitation, un système concurrent de ceux de Google (Android) et d'Apple (iOS), sur lequel il planche depuis plusieurs années. Mais personne ne l’a vu : est-ce que ce système est vraiment prêt, opérationnel ? Plusieurs experts des télécoms en doutent, et pensent qu’il va manquer quelques mois, voire même des années à Huawei pour le finaliser et remplacer le système Android sur ses smartphones. Et puis, ce n’est pas tout d’avoir la technologie. Ensuite, il faut réussir à l’imposer, à convaincre les développeurs, les consommateurs de l’utiliser. Ce qui ne sera pas une mince affaire.
Le déploiement de la 5G menacé
Le déploiement de la 5G en France n’est pas encore une réalité. Les opérateurs ne pourront déployer la cinquième génération de téléphonie mobile, qui permettra un accès ultra-rapide à l'internet, qu’à partir du début de l'année prochaine, quand les fréquences auront été attribuées par l'État. Du coup, les opérateurs ont encore le choix du fournisseur. Et la France utilise très peu Huawei sur les cœurs de réseau de la 3G ou de la 4G. Une partie des antennes Bouygues et SFR sont équipées par Huawei. Mais il n’empêche, cette affaire va avoir des incidences parce que tout le marché va être bousculé.
Huawei se présente comme le leader incontesté de la 5G. C’est le premier équipementier mondial et s’il sort du jeu, la concurrence va se réduire. Le risque, c’est une montée des prix des autres industriels. Quid aussi des capacités de production des autres, justement ? Est-ce qu’Ericsson ou encore Nokia pourront répondre à la demande ? Une demande qui est forte : plusieurs pays sont en train de déployer la 5G, à des vitesses différentes. En plus des hausses de prix, il va y avoir des retards. Par ailleurs, plusieurs entreprises françaises travaillent avec Huawei, tout un écosystème qui utilise sa technologie et qui pourrait être ennuyé si Huawei est empêché. Un seul exemple : pour l'expérimentation de sa voiture autonome, PSA travaille avec Huawei.
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