Le décryptage éco. France : la schizophrénie des chiffres
La rafale de prévisions économiques que nous avons eu mercredi 21 septembre, en provenance de Bercy, de la cour des comptes et de l’Unedic, nous a étourdi sans qu’on puisse savoir aujourd’hui si la France va mieux ou moins bien. En tout cas, Bercy y croit, la France ne devrait plus être un des plus mauvais élèves de l’Europe.
Michel Sapin l’a annoncé mardi 20 septembre, l’an prochain, la France devrait sortir de plusieurs années de procédures européennes de déficits excessifs. Comme promis à Bruxelles, le déficit français devrait passer sous la barre des 3 %, à 2,7 %. La dette cumulée de l’Etat, de la Sécurité sociale et des collectivités locales, devrait se réduire un tout petit peu à 96% du PIB et la dépense publique devrait baisser d’un point mais la France dépensera quand même près de 56 % de ce qu’elle gagne. Avec une croissance de 1, 5 % cette année et l’an prochain, l’élan va se poursuivre, le ministre de l’Economie et des finances en est sûr. D’ailleurs l’investissement des entreprises devrait être à la hausse de 3, 5 % cette année. Les années de crise devraient donc être derrière nous et, selon Bercy, les comptes publics assainis. La France ne serait donc plus un des plus mauvais élèves de l’Europe en matière budgétaire, on ne peut que s’en réjouir.
L' Unédic et la Cour des comptes sont pessimistes ?
Si l’Unedic nous annonce que le nombre de chômeurs devrait baisser cette année de 124 000 personnes, l’organisme est moins optimiste pour l’an prochain et voit le chômage repartir à la hausse. Ce qui générerait une dette cumulée de 45 milliards d’euros dans trois ans, soit 15 milliards d’augmentation. En revanche, côté sécurité sociale, la dette s’allège un peu mais reste lourde, à 156 milliards d’euros. Et la cour des comptes y voit surtout une embellie plutôt comptable et prône une réforme en profondeur de l’assurance maladie. Si on ajoute à ces chiffres une consommation des ménages qui s’essouffle, un secteur touristique fragile, une reprise timide et de nouvelles dépenses comme l’augmentation du traitement des profs et de la fonction publique hospitalière, ainsi que le déficit chronique des collectivités locales, on n’est plus si certain de se réjouir.
La France va-t-elle mieux ?
La France se redresse légèrement mais la situation demeure très fragile. Il faut aussi en conclure aussi que certaines astuces permettent de bien présenter l’enfant. Certains allégements fiscaux en direction des entreprises, comme l’extension du CICE par exemple, ne pèseront sur le budget qu’à partir de 2018. Et les grandes entreprises devront mettre la main à la poche l’an prochain pour avancer l’impôt. Enfin, ce sont surtout des facteurs extérieurs qui permettent d’alléger la dette, comme la possibilité d’emprunter à des taux proches de zéro pour la rembourser, ou encore le pétrole bas qui a aussi réduit les factures de l’Etat. Tout cela aide mais pourrait ne pas durer. Sur le fond, il n’y a pas eu de réformes structurelles spectaculaires et, malgré une baisse d'un milliard d’euros d’impôts promis l’an prochain, avec 44, 5 % du PIB annoncés, la France restera championne d’Europe en matière de pression fiscale. Alors, si le quinquennat de Sarkozy avait été celui du creusement de la dette, celui de François Hollande restera celui du chômage endémique et de la pression fiscale maximum.
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