Le décryptage éco. Fillon, Macron, deux libéralismes
La victoire de François Fillon, est en matière économique, la victoire d’une ligne clairement libérale.
La ligne économique de François Fillon est clairement libérale, avec des marqueurs libéraux, des mesures libérales emblématiques et c’est, pour la droite française, un moment inédit et historique. Jamais un candidat de la droite à l’élection présidentielle, plébiscité par les électeurs de son camp n’avait porté un tel programme, une telle rupture libérale. La droite française fut volontiers assez bonapartiste, et assez peu libérale dans la pratique, et souvent tout aussi interventionniste et dépensière que la gauche. Même Valéry Giscard d’Estaing n’avait osé en matière économique assumer un tel programme libérale. Et c’est clairement cette offre politique, matinée d’un conservatisme très classique en matière sociétale, qui a été choisie à une très large majorité hier. Le programme économique d’Alain Juppé contenait aussi une dose de libéralisme, mais elle était un peu plus diluée, plus douce, avec une posologie plus étalée dans le temps et surtout une méthode d’administration moins radicale. Les trois marqueurs de cette rupture Fillon sont connus :
1. Une baisse de 100 milliards de l’ensemble des dépenses publiques en cinq ans, ce qui représente à peu près une baisse de 8%.
2. Une diminution de 500 000 postes dans la trois fonctions publiques et en ciblant aussi les contractuels.
3. Une politique de l’offre clairement orientée vers les entreprises et un choc fiscal de plus de 40 milliards d’euros de réductions de charges sociales et fiscales pour la compétitivité des entreprises.
Autre offre libérale, celle d'Emmanuel Macron
On a bien une situation totalement inédite, avec deux offres qui se revendiquent libérales, l’une à droite et l’autre venue de la gauche. Mais dans l’esprit et leur déclinaison, ces deux offres n’ont pourtant pas grand chose à voir. Et sans doute, d’ailleurs, le succès de François Fillon va-t-il aider Emmanuel Macron a démontrer la singularité de sa vision. Bien sûr, ce qui saute aux yeux, c’est qu’autant François Fillon est conservateur en matière sociétale, autant Emmanuel Macron est pour le coup libéral sur toutes les questions de société. Mais restons sur l’économie : François Fillon répète qu’il est devenu libéral au cours de son passage à Matignon, en raison de la gravité de la situation financière de la France et son risque de faillite. Sans lui faire injure, on peut donc dire que son approche libérale, fondée sur un diagnostic, est d’abord et avant tout une approche financière et même arithmétique, avec des chiffres tout ronds qui claquent aux oreilles de son électorat.
Emmanuel Macron, au contraire, ne promet nulle purge programmée, mais il affirme vouloir utiliser le libéralisme comme une clé, comme une arme, pour débloquer la société française, déconstruire un système de rentes, de statuts, de règlements, de normes pour libérer l’initiative et redonner une place à ceux qui sont aujourd’hui à l’extérieur du système. Il partage avec François Fillon des mesures techniques libérales, une même volonté par exemple de déconcentrer le dialogue social et de laisser les entreprises et les salariés se mettre d’accord au plus près des réalités du terrain, mais Emmanuel Macron ne changerait pas pour autant la durée légale du travail. Ces deux là ne partagent ni la même philosophie, ni le même diagnostic, ni la même méthode.
Plusieurs libéralismes
C’est exactement ce que nous enseigne l’histoire, le libéralisme n’est pas monolithique, pas même aux Etats-Unis, le libéralisme a recouvert là-bas plusieurs formes et au nom d’un pragmatisme assumé, il a souvent mêlée laisser faire et interventionnisme public. Le libéralisme de François Fillon est d’abord celui d’un redressement martial et il devra prouver que ce projet là peut recueillir plus de 50% des voix en France. Emmanuel Macron veut que son libéralisme soit un progressisme et son défi est d’en montrer la crédibilité.
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