La France et l'Allemagne jouent le parfait amour... ou presque
Peut-être un peu des deux. Oui, il y avait bien, dans cette entente mise en scène, une part de théâtre diplomatique, un intérêt commun bien compris. Angela Merkel a accueilli le premier ministre avec égards et tact car elle sait la situation politique française complexe, tendue, périlleuse même et en dirigeante responsable, elle n’avait aucun intérêt à déstabiliser davantage Manuel Valls. Elle a ainsi assuré le service minimum, sur la question du déficit français, bottant en touche, affirmant que c’était à la Commission d’apprécier les efforts et les promesses françaises.
Manuel Valls de son côté, au moins dans cet échange public, n’a pas fait de surenchère, ni appelé « l’Allemagne à assumer ses responsabilités », comme il l’avait fait la semaine dernière dans son discours à l’Assemblée. Le premier ministre a au contraire prononcé les mots que nos voisins attendaient, retournant la formule, « La France doit assumer ses responsabilités », a assené Manuel Valls. « J’ai besoin de la confiance du peuple allemand », a même proclamé le premier ministre. Tactiquement, c’était parfait. Ni couac, ni fausse note.
Mais quand ils se sont vus loin des caméras, en tête à tête, vous pensez que le discours a été différent ?
On peut le penser, Fabienne. Si Manuel Valls a demandé à la chancelière, de faire un effort pour relancer la machine européenne, ayant elle des marges budgétaires, on imagine aisément qu’Angela Merkel lui a répondu que cela n’était pas envisageable : pour une raison simple, il y a un consensus gauche – droite en Allemagne pour que le budget du pays soit à l’équilibre : l’Allemagne est confronté à un défi démographique majeur et elle veut être sûre d’être en mesure de payer les futures pensions de ses retraités. Si Manuel Valls a tenté une nouvelle fois sa chance, en demandant à Mme Merkel de donner un coup de pouce aux salaires outre-Rhin pour relancer la demande intérieure et ainsi stimuler la croissance en Europe, le premier ministre a du se heurter au même refus de la chancelière : depuis 2011, les salaires outre-Rhin augmentent déjà plus vite que la productivité. Sans doute la chancelière s’est-elle montrée plus accommodante sur la question des investissements en Europe. Ce serait là déjà, une toute petite victoire française.
Mais vous pensez Vincent que la France et l’Allemagne ont tellement divergé qu’elles n’ont plus rien à se dire, ni à partager ?
La vérité, c’est qu’en matière économique, la dissymétrie entre nos deux pays, en terme de puissance et d’influence, est aujourd’hui vertigineuse. La relation franco-allemande s’est comme vidée de sa substance, faute d’attention, faute d’intérêt réciproque, manifesté par les élites des deux pays. S’il reste une routine politique et administrative franco-allemande, la France et l’Allemagne ne portent plus aucun projet européen à la hauteur de la crise qui nous assaille et des enjeux du moment. Nos dirigeants sont plus inspirés pour des commémorations, - fussent-elles émouvantes – que pour nous dessiner un avenir commun.
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