L'investissement, la condition pour une reprise durable
La France, Fabienne, souffre en fait d’une vraie panne d’investissement. Cette panne ne date pas d’hier, ni même d’avant hier, en fait la situation s’est dégradée au début des années 2000, il y eut un léger mieux juste avant la crise de 2008, puis une rechute, et depuis trois ans une médiocre stagnation, à la baisse même, dirait-on dans les salles de marché.
La situation est devenue si critique que la France n’a toujours pas retrouvé son niveau d’investissement d’avant la crise financière. Bref ça bloque. Et si on élargit un peu le tableau, on voit qu’en Europe la situation n’est pas plus rose : cette panne est une panne générale. Le niveau de l’investissement productif est en Europe inférieur de 20% à ce qu’il était avant la crise. Il y a donc à la fois un blocage français mais aussi un vrai blocage européen.
Comment expliquer cette situation, et surtout en France ?
Le niveau d’investissement dit beaucoup de chose d’un pays. A travers cet indicateur, on mesure la capacité d’un pays à se projeter dans l’avenir. Le modèle en la matière, ce sont les Etats-Unis, la crise n’était même pas encore finie que les Américains commençaient à réinvestir massivement avec une foi inébranlable en l’avenir.
Les économistes disent qu’il y a en fait trois grandes causes pour expliquer les pannes d’investissement : en général cette panne frappe des pays à la démographie vieillissante - ce n’est pas le cas de la France mais c’est vrai pour d’autres pays en Europe, – elle frappe ensuite des pays où il y a un vrai problème de confiance, et des pays portent aussi en eux une profonde aversion au risque. Et là ça ressemble beaucoup plus au cas français. Vous connaissez l’adage, on ne fait pas boire un âne qui n’a pas soif. La France manque d’envie et de confiance en l’avenir pour investir. Ça sera donc d’autant plus difficile à débloquer.
Le problème du "mal investissement"
A cela s’ajoutent en France deux autres problèmes : le premier, c’est que l’investissement public est contraint en raison de la situation des finances de l’Etat et des collectivités. Et le second problème : c’est qu’il y a en France, un mal investissement : le peu qu’on investit, on ne le met pas au bon endroit, on investit dans des secteurs qui ne réparent pas vraiment l’avenir, comme l’immobilier, au lieu de moderniser ou de monter en gamme notre appareil productif, d’équiper nos usines de robots, ou d’investir dans la recherche et l’innovation.
Les mesures que va annoncer Manuel Valls peuvent remédier à cette panne ?
Manuel Valls sait que sans investissement, il n’y a pas reprise durable de la croissance, pas vraiment de création d’emplois. Il n’y a malheureusement pas de mesure magique, le gouvernement tente donc de faire feu de tout bois, coup de pouce fiscal pour inciter les entreprises à bouger, mobilisation de la banque publique d’investissement, création d’un fonds pour les PME, tout ça va dans le bon sens. Mais il faudra aussi traiter le problème de la confiance, et là on touche à la crédibilité des réformes et au-delà même de la crédibilité de l’action publique et de la politique. Un vaste programme, aurait dit le général de Gaulle.
Vincent Giret, du journal Le Monde.
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